À la conquête de Jupiter

De par sa taille, Jupiter crée son propre environnement, dans lequel ses lunes trouvent peut-être les conditions nécessaires pour abriter la vie.

Jupiter et sa lune Ganymède. (Photo : NASA / JPL / University of Arizona)

De la vie comme on en trouve dans les abysses du Pacifique ou de l’Atlantique pourrait exister ailleurs dans le système solaire. Et la sonde de la mission Juice, que l’Agence spatiale européenne (ESA) s’apprête à lancer vers Jupiter en avril, pourrait être l’outil qui le confirmera. 

Jupiter, la plus grosse planète du système solaire, vient en cinquième position dans l’ordre d’éloignement du Soleil. La mission Juice (pour JUpiter ICy moons Explorer) consiste à envoyer une sonde qui va survoler cette géante gazeuse et ses trois plus importants satellites, les lunes Io, Europe et Ganymède. Puis, la sonde se placera en orbite autour de Ganymède pour analyser plus en détail son environnement et sa dynamique. Objectif : vérifier si ces lunes présentent des caractéristiques qui pourraient les rendre propices à la vie. 

« En raison de sa taille énorme, Jupiter engendre un réchauffement de ces satellites par ce qu’on appelle un effet de marée [la gravité qu’elle exerce fait bouger les roches au centre des lunes dont le frottement génère de la chaleur]. Ce qui fait qu’on trouve probablement de l’eau sous forme liquide sous leur croûte glacée », explique Olivier Hernandez, astrophysicien et directeur du Planétarium Rio Tinto Alcan, à Montréal. L’eau est l’une des conditions essentielles pour que puissent exister des formes de vie. 

Composée de roches et de glace et située à environ un million de kilomètres de Jupiter, Ganymède est la seule lune du système solaire connue pour produire un champ magnétique, comme la Terre. Approximativement deux fois plus petite que la Terre, elle pourrait compter plus d’eau liquide que celle-ci, sous forme d’océans emprisonnés entre deux couches de glace. Ce sont ces océans qui pourraient offrir des conditions de vie pas si éloignées de celles des micro-organismes extrêmophiles des abysses terrestres.

La sonde de cinq tonnes sera lancée par une fusée Ariane 5 depuis la Guyane française. Elle mettra huit ans à rejoindre Jupiter, qui ne peut être atteinte en ligne droite avec les lanceurs actuels. Elle empruntera une trajectoire tout en boucles, mais économe en carburant, car elle n’a pas de générateur thermoélectrique à bord, qui lui permettrait de poursuivre sa route pendant des décennies, comme les sondes Voyager. « La sonde va notamment frôler Mars, Vénus et Mercure pour profiter de leur force de gravitation, ce qui va impliquer plusieurs manœuvres », précise Olivier Hernandez. Mais de cette manière, elle aura encore assez d’énergie à l’arrivée pour récolter des données scientifiques pendant quatre ans et se placer en orbite autour de Ganymède. Si tout se passe bien, la sonde finira par s’y écraser au plus tôt à la fin de 2035, selon l’ESA. 

Dix sondes spatiales de la NASA ont survolé Jupiter depuis 1973, dont une, Juno, est toujours dans ses environs. « Il reste beaucoup à découvrir. Les instruments plus récents de Juice devraient notamment collecter des données clés sur l’atmosphère et les nuages de la planète, mais surtout sur les lunes, peu couvertes par la NASA », estime Olivier Hernandez. Jupiter génère un énorme champ électromagnétique, le plus important de tout le système solaire, ce qui complique le design des sondes. Celle-ci renferme 10 instruments scientifiques logés dans un petit cylindre blindé, cerné de grands panneaux solaires. 

« D’ici à ce que les données nous arrivent, on aura peut-être trouvé des traces de vie sur Mars ou sur des exoplanètes, mais les caractéristiques de Ganymède en font aussi une candidate remarquable », croit le spécialiste.

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