L’auteure est médecin vétérinaire et éthicienne. Ex-présidente de l’Ordre des médecins vétérinaires du Québec, elle travaille au Groupe de recherche en épidémiologie des zoonoses et santé publique, offre des formations et intervient régulièrement sur les relations humains-animaux et l’approche « Une seule santé ».
J’ai grandi dans une ferme laitière. Nous avions plusieurs chats : des farouches arrivés d’on ne sait où et des sociables abandonnés au bord de la route par des citadins. Ces chats se pointaient, se reproduisaient et, parfois, disparaissaient sans laisser de traces. Étaient-ils morts ? Avaient-ils choisi une autre étable ? On ne le savait pas vraiment. Ces félins avaient leur utilité dans l’écosystème des fermes en régulant la population de rongeurs. En contrepartie, ils étaient logés et nourris, afin qu’aucun animal affaibli, chatte gestante ou chaton ne manque de nutriments. Un chat étant un chat, ils chassaient quand même !
Le rôle des chats a bien changé depuis. Ils sont devenus des membres à part entière de la famille. Est-il préférable pour eux de rester en tout temps à l’intérieur ou de pouvoir parfois circuler en liberté dans le quartier ? C’est un débat qui a cours depuis longtemps. Votre vétérinaire et vous devez bien sûr tenir compte des avantages et inconvénients pour le bien-être du chat lui-même, mais aussi penser à la population du secteur et à la protection de la biodiversité, c’est-à-dire à l’intérêt supérieur collectif.
Il faut savoir que le chat domestique (Felis catus) n’est pas une espèce indigène au Québec. Elle a été volontairement introduite par les Européens pour ses qualités de prédateur. La plupart de nos amis félins en sont les descendants.
L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) fait figurer le chat depuis l’an 2000 parmi les 100 espèces les plus envahissantes au monde, végétales ou animales. Ce félin a en effet contribué à l’extinction de nombreuses espèces d’oiseaux, partout sur la planète. Sur certaines îles de la Basse-Californie, par exemple, le starique de Cassin a disparu. Au Royaume-Uni, les populations d’étourneaux et de moineaux sont en baisse.
Dans ce contexte, la pression pour la garde des chats à l’intérieur ira croissant. La Ville de Québec, entre autres, demande maintenant aux propriétaires de chat de ne pas laisser leur animal de compagnie aller dehors, à moins qu’il demeure sur leur terrain.
Pourquoi la tendance actuelle est-elle de privilégier l’intérieur ?
Votre chat vivra probablement plus longtemps s’il reste en sécurité à l’intérieur. Vous verrez de nombreux sites Internet citer une longévité très faible (de deux à cinq ans) pour un chat d’extérieur, mais on parle alors de chats errants, cette donnée ne s’applique pas à ceux qui retournent à la maison, ont de bons soins de santé, etc.
Une étude publiée en 2022 dans PLOS One montre même une longévité semblable pour les chats de famille toujours à l’intérieur et ceux ayant accès à l’extérieur, mais un biais de sélection pourrait expliquer ce résultat, car la recherche incluait principalement des animaux morts de maladies plutôt que d’accidents. Quand on s’attarde à toutes les causes de décès possibles, on constate que plusieurs sont évitables : les chats qui ne sortent pas risquent évidemment moins de subir un traumatisme, la cause de décès la plus fréquente, selon une étude portant sur plus de 4 000 chats morts en Angleterre. Par ailleurs, ceux qui s’aventurent dehors s’exposent davantage à des maladies comme la péritonite infectieuse féline (PIF) ou le virus de l’immunodéficience féline (FIV). Celles-ci sont contractées généralement par des contacts étroits avec d’autres chats.
Un chat d’intérieur cause moins de nuisances telles que des miaulements intempestifs et des batailles parfois très sonores. La stérilisation de l’animal réduit ces problèmes, mais pas celui des crottes non hygiéniques. En gardant votre chaton à l’intérieur, vous aurez aussi la certitude qu’il ne s’accouplera pas avant la date de stérilisation, donc qu’il n’augmentera pas la population de chats errants ou en refuge.
Outre les nuisances pour le voisinage, la protection de la biodiversité est un enjeu collectif d’importance à prendre en considération. Tout comme les chats de ferme de mon enfance, les chats chassent même sans avoir faim ! Dans les années 80, j’ai eu une chatte dégriffée, ce qui ne l’empêchait aucunement de chasser. Ceux qui ont vécu avec des chats ne seront pas surpris d’apprendre qu’elle a plusieurs fois ramené à mes pieds des oiseaux, ce qui ne me réjouissait guère. Aujourd’hui, certains colliers pour chats très colorés peuvent réduire le problème, les oiseaux voyant venir le chasseur. Les grelots seraient plus efficaces pour les petits mammifères, mais il faut faire preuve de prudence avec ces conclusions.
Les félins sont des prédateurs, c’est dans leur nature. Nous sommes de plus en plus conscients de l’importance de protéger la biodiversité, et les chats font malheureusement partie du problème.
Un chat heureux
Bien des gens aiment laisser sortir leur chat pour sa santé mentale, mais on peut répondre à ses besoins à l’intérieur. Garder un animal captif vient avec la responsabilité de lui offrir un milieu convenable et stimulant, ce qui inclut des jouets, des interactions sociales et des activités. En d’autres mots, vous devez mettre en place toutes les conditions requises pour le bien-être de votre chat d’intérieur. Vous en tirerez aussi des bénéfices : il risque beaucoup moins d’avoir des comportements indésirables. Il faut l’admettre, de nombreux chats d’intérieur finissent par avoir des problèmes de comportement (faire leurs besoins à des endroits inappropriés, endommager les meubles, par exemple) par manque de stimulation ou parce que le milieu est mal adapté.
Dehors en toute sécurité
Premièrement, n’oublions pas qu’il y a d’autres façons de lui donner accès à l’extérieur, comme le promener en harnais ou lui offrir ce qu’on appelle désormais un « catio », une aire de jeu fermée, souvent attenante à une fenêtre. Le chat peut alors percevoir les odeurs et sons environnants et observer le voisinage.
L’alimentation comme source de stimulation
Chercher sa nourriture est une activité normale pour l’espèce féline, alors pourquoi ne pas faire travailler votre chat pour qu’il obtienne ses aliments ? Pour lui, ce sera plus un jeu qu’un travail, et ça le stimulera. Sa nourriture peut lui être offerte dans des jouets interactifs l’obligeant à chercher et manipuler chaque morceau. Il existe des modèles commerciaux, mais vous pouvez aussi trouver des idées d’objets à fabriquer vous-même, ou faire aller votre imagination. Un distributeur ludique sécuritaire peut également occuper votre chat pendant votre absence.
Le jeu, pour la santé mentale et physique
Favoriser le jeu de votre chat est essentiel pour son bien-être. Il peut jouer seul ou en votre compagnie avec une multitude de petits jouets de peluche et balles de différentes textures. Les chats aiment pouvoir se déplacer en hauteur, alors les étagères et les points d’observation élevés sont appréciés. Ils aiment souvent pouvoir se cacher. Un élément primordial à fournir est un griffoir, car ils ont besoin de faire leurs griffes. Expérimentez avec différents modèles et assurez-vous de placer l’objet à un endroit pratique et accessible afin que votre chat l’adopte et épargne vos meubles, vous vous éviterez bien des frustrations !
Que vous décidiez de laisser sortir votre chat ou non, discutez-en avec votre médecin vétérinaire afin que votre animal soit adéquatement vacciné, vermifugé et protégé contre les tiques et les puces. Le plan sera adapté à ses besoins. Peu importe votre choix, il est primordial que votre chat soit micropucé et/ou qu’il porte une médaille, selon la réglementation de votre ville. Surtout, n’omettez pas de le faire sous prétexte que Minou reste à l’intérieur. Il suffit qu’il se glisse une fois par une porte laissée ouverte pour prendre la poudre d’escampette.
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Les chats domestiques en liberté constituent une réelle nuisance et on estime qu’ils tuent entre 100 et 350 millions d’oiseaux chaque année au Canada. Leurs propriétaires, qui la plupart du temps ignorent tout des félins, s’imaginent que parce qu’ils les nourrissent bien ils ne chasseront pas. Pourtant même les chats obèses tuent des tas d’ oiseaux ! De plus en plus de villes dans le monde interdisent de laisser errer son chat, avec raison. Au Québec, ni les gouvernements, ni les vétérinaires, ni les SPCA n’éduquent les propriétaires de chiens et de chats aux risques et aux nuisances associés aux animaux domestiques en liberté (et sans surveillance) qui errent dans les villes et les bois, menaçant ainsi la faune et polluant ces milieux avec leurs excréments. On préfère nourrir le mythe à l’effet qu’un animal en liberté est un animal heureux et bien traité par son propriétaire. Vive l’ignorance !
Le chat contrairement au chien,enterre ses excréments…. on le considère d ailleurs, comme un animal propre du fait de ce comportement , et de ces nombreux toilettages…. entre autre ….
Vous indiquez de sortir le chat en le promenant avec un harnais… mauvaise idée de vouloir le promener, ce n’est pas un chien. Toutefois, nous avons réussi avec notre chat de l’attacher, avec une longue corde et son harnais, à l’arrière de notre cours. La 1ère semaine, il a fait un « Houdini » de lui même en s’extirpant de son harnais à quelques reprises, mais il a ensuite compris que c’est cela ou aucune sortie. Il s’est adapté à cette libération contrôlée. Cela lui permet d’être dehors, de dormir sous la haie de cèdres, d’être plus heureux qu’être seulement à l’intérieur. Il faut parfois démêler sa corde, mais pas trop souvent. Il a déjà réussi à chasser un oiseau malgré la corde, mais c’est très rare.
Pas une bonne idée non plus. La première et dernière fois que j’ai fais attaché mon beau chat Caramel à une corde dans notre cour arrière, il a mangé toute une volée par le chat du voisin et ne s’en est jamais remis. Il est décédé quelques jours plus tard. RIP.
Bonjour,
Mon chat sort, surtout la nuit. Au petit matin, je trouve souvent une souris sur mon balcon. De temps en temps, il attrape un petit oiseau. Mais il attrape plus de souris que d’oiseaux. Je pense qu’en ville, l’animal le plus utile c’est le chat, qui nous protège de la vermine. Les Égyptiens l’avaient compris il y a bien longtemps… Mon chat n’a pas besoin que je le divertisse avec des gadgets, il s’occupe bien avec ce que la nature lui offre. Je m’occupe évidemment de le protéger par des vaccins, de le stériliser afin qu’il n’augmente pas la population errante et de bien le nourrir. Bien sûr, lorsqu’il part pour la nuit, j’ai peur qu’il lui arrive quelque chose. Mais il a ses instincts qui le protègent. Il vit sa vie de chat, comme je vis ma vie d’humain. J’ai la chance de vivre dans un quartier où mes voisins laissent sortir leurs chats et acceptent bien cette cohabitation. Quoi qu’en disent les partisans de l’enfermement des chats, il n’y a pas beaucoup de désagréments à la libre circulation des chats, s’ils sont stérilisés (évitant ainsi les odeurs et la reproduction). Mais c’est certain que si vous avez un bac de sable pour vos enfants dans votre cour, les chats, stérilisés ou non, vont y voir une litière. Mettez-y un couvercle… Dans mon quartier, il y a longtemps que je n’ai pas vu de chats errants. Mais je vois régulièrement les chats de mes voisins et le mien, sur les balcons, dans les ruelles et c’est toujours agréable d’admirer leur démarche féline… pourquoi se priver de ce plaisir? Ça fait si longtemps maintenant qu’on a perdu le contact avec la nature…
Vous écrivez « De temps en temps, il attrape un petit oiseau. Mais il attrape plus de souris que d’oiseaux ». Sérieusement, comment pourriez-vous savoir ce que votre chat chasse et tue à moins de le suivre toutes une nuit avec un collier muni d’une caméra ? Ne ne prenez pas mal mais en réalité, vous n’en savez rien ! Le chat ne rapporte pas toutes ses proies. Par ailleurs, La réalité est que les chats chassent les souris et les campagnols, qui ne sont pas considérés des espèces nuisibles. Ils sont peu efficaces contre les rats, une proie trop grosse pour eux. Les scientifiques s’opposent à l’utilisation des chats comme forme de lutte contre les rongeurs, car ils sont totalement inefficaces dans l’élimination du rat. Par ailleurs, les municipalités peuvent vous mettre en infraction s’il est prouvé que votre chat laisse ses excréments chez vos voisins. Ce n’est pas leur responsabilité de couvrir leurs carrés de sable ni de clôturer leur potager et leurs plate-bandes. En passant j’aime les chats, j’en ai presque toujours eu.
1er problème : la plupart sont incapables de faire la différence entre les chats « en famille » et les chats errants. Une étude française avait montré que les chats demeurant dans une famille tuent 10 fois moins de proies que les chats errants. Bien sûr nos chats qui vont à l’extérieur tuent des oiseaux et c’est regrettable, mais ils représentent 10 % des mortalités. Et les chats errants ne sont pas près de disparaître quoi qu’on en dise…
2e problème : ces chats errants sont eux-mêmes beaucoup moins dangereux pour la faune que l’HUMAIN, et on ne l’enferme pourtant pas dans sa maison ! Parlons plutôt d’étalement des banlieues/perte d’habitat, destruction des zones humides, voitures/camions et fenêtres d’immeubles (où les oiseaux vont allégrement se fracasser, désolée pour les âmes sensibles qui se lamentent à la vue d’un chat d’extérieur) et surtout nos pesticides et autres produits chimiques qui ont failli décimer plusieurs espèces…
Ajoutons la crise climatique, qui viendra peut-être à bout de l’humain envahisseur. J’ai bien besoin d’un chat heureux sur mes genoux pour abaisser mon éco-anxiété!
Une étude de l’Université de Georgie a démontré qu’en moyenne, un chat domestique (avec un propriétaire) tue entre 6 et 18 oiseaux par année, et 8 à 21 petits mammifères.
Les chats errants tueraient de 23 à 46 oiseaux et de 129 à 338 petites bestioles par année. Évidemment, ce sont des moyennes, et tous les chats domestiques ayant été évalués n’allaient pas dehors tous les jours . Un bon chasseur à lui seul peut causer beaucoup de ravages, surtout en ville, notamment là où il y a des mangeoires. Ces chiffres ne vous paraissent peut-être pas alarmants parce qu’ils ne portent que sur un seul prédateur. Mais multipliez-les par plusieurs millions ! On estimait qu’il y avait 8,1 millions de chats domestiques au Canada en 2020. Depuis la pandémie, ce chiffre a augmenté. Faites le calcul. Vivre dans le déni, pointer les autres du doigt, ça ne règle aucun problème, c’est de la fuite face à la réalité. On le fait tous dans diverses situations, sans comprendre le phénomène. Cet article nous le résume: https://issuu.com/bulletinlibrex/docs/bulletin_urgence_ecologique_2020/s/11475577
Claire accuse les autres de déni de réalité, pourtant pas un mot sur les humains qui causent bien plus de mortalité. Bien plus facile d’attaquer les chats.
Et puis, si on enlève tous les chats errants, ce qui est irréaliste, la nature les remplacera par un autre prédateur comme les chiens errants, les coyotes ou peut-être les hermines. Il y aurait juste trop de souris, mulots et autre rongeurs sans ça.
Voir chaque attaque d’oiseau comme une fin évitable c’est être dans le déni que la nature finit toujours par avoir le dernier mot.
Mettons plutôt nos énergies sur la fin de l’attaque humaine envers la nature.
J’y pense, j’ai eu et connu vraiment beaucoup de chats, et AUCUN de ceux qui allaient à l’extérieur n’était obèse. Par contre, j’ai vu plusieurs chats d’intérieur obèses, d’autres qui sont morts après de longues maladies parce que leurs propriétaires ne voulaient pas les laisser aller. Alors pour le bonheur à l’intérieur, ça reste à prouver, en comptabilisant correctement les désavantages des deux côtés…