LA THÉORIE
L’orchidée, la drosophile, le saumon, le brontosaure, le colibri, et votre cousin François… Toutes les espèces ont les mêmes ancêtres : les premières cellules vivantes apparues sur Terre, il y a 3,8 milliards d’années. C’est à partir de celles-ci que la vie s’est développée, grâce à la sélection naturelle, mécanisme par lequel les individus les mieux équipés pour faire face aux conditions de leur environnement survivent mieux, et ont donc plus de chances de se reproduire et de léguer ainsi leurs caractéristiques à leur descendance.
Pour qu’il s’enclenche, ce processus a besoin de quelques ingrédients.
La variation
Les individus d’une espèce ne sont pas tous identiques. L’un a les yeux bleus. L’autre, une allergie. Ces différences sont dues soit à des erreurs dans la copie du génome d’un organisme à un autre, soit au brassage de gènes lorsque deux individus sexués donnent naissance à un rejeton. Ces mutations se produisent par hasard (le gène de la fourrure dense n’apparaît pas parce qu’il fait plus froid…) et la majorité sont sans conséquence. Mais il arrive qu’une mutation rende l’individu plus fragile ou lui donne un avantage, comme une plus grande capacité respiratoire.
La reproduction différenciée
Un environnement donné — une île, par exemple — ne peut accueillir qu’un nombre limité d’individus d’une espèce — disons des chevreuils. S’ensuit une compétition pour les ressources vitales : de toute la population de chevreuils nés une année, une partie seulement vivra assez longtemps pour se reproduire à son tour. Certains individus réussiront grâce à un avantage engendré par une mutation génétique.
L’hérédité
Cet avantage, ils le légueront à leur progéniture. Comme ils seront plus nombreux à se reproduire, l’avantage se propagera dans la population. Au bout de 1 000 générations, la mutation sera devenue la norme chez les chevreuils de l’île.
Le temps
La nature a eu besoin de trois milliards d’années pour créer les premiers organismes multicellulaires. Mais des changements peuvent se produire en quelques générations seulement.
Des changements d’environnement
Les glaciations, les sécheresses, la disparition d’écosystèmes, l’isolement d’une population créent de nouvelles conditions de vie qui favorisent des caractéristiques différentes et contribuent à modifier les espèces, à en créer de nouvelles. Un animal adapté à un environnement glaciaire (l’ours polaire) aura moins de chances de survivre à un fort réchauffement climatique qui le priverait de son terrain de chasse sur la banquise.
LES PREUVES
Elles s’accumulent par milliers depuis 150 ans.
Morphologie
Mon bras, la patte de la vache, la nageoire de la baleine et l’aile de la chauve-souris ont des squelettes très semblables. La preuve que tous ont évolué à partir d’ancêtres communs.
Génétique
Le code génétique est le même pour tous les êtres vivants. Chez la majorité des animaux, une série de gènes orchestre l’organisation des cellules qui formeront l’embryon. Or, cette séquence est presque la même pour les insectes et pour les vertébrés.
Histoire
Les fossiles permettent de « voir » des espèces disparues depuis des millions d’années. En les étudiant, on peut retracer la modification des espèces au fil du temps.
VRAI
Les plus aptes survivent
Au 19e siècle, à Manchester, en Angleterre, une population de phalènes du bouleau a changé de couleur en quelques décennies. Au départ, la majorité de ces papillons nocturnes étaient pâles. Ils passaient donc inaperçus sur les bouleaux clairs où ils se posaient le jour, échappant ainsi à leurs prédateurs. Mais la pollution a noirci les arbres. Ce sont alors les papillons sombres, les quelques moutons noirs du lot, qui y ont trouvé un couvert. Ils ont donc gagné en nombre. Mais depuis 1960, la pollution diminue. Les papillons sombres se font de nouveau plus rares et les pâles, plus nombreux ! Ainsi, les individus les mieux adaptés aux circonstances ont plus de chances de survivre et de se reproduire. Le mieux adapté ne veut pas nécessairement dire le plus fort ou le plus grand.
FAUX
L’homme « descend » du singe
L’homme ne descend pas du singe. Il est un singe. Avec le chimpanzé, notre plus proche cousin, nous partageons un ancêtre, ni humain ni chimpanzé, qui vivait il y a six millions d’années. Le gorille est un cousin plus éloigné : notre ancêtre commun vivait il y a 10 millions d’années.
Les espèces les plus récentes sont les plus évoluées
Jusqu’au 19e siècle, la science essayait d’organiser les espèces vivantes sur le modèle d’une échelle. Les plantes en bas, puis les différentes espèces animales dans un certain ordre jusqu’à l’homme, tout en haut. On sait aujourd’hui que cette vision est fausse : la vie ne s’est pas améliorée, mais diversifiée. Et l’intelligence n’est, pour la nature, qu’une stratégie de survie parmi d’autres. L’homme n’est pas plus évolué, par exemple, que la pieuvre commune, capable de prouesses de camouflage à faire rougir David Copperfield (cliquez ici pour voir sa métamorphose). Il a simplement pris une trajectoire évolutive différente. Et il n’est pas certain, d’ailleurs, que l’espèce humaine survive plus longtemps que les pieuvres…
C’EST PROUVÉ !
Même si elle se perfectionne constamment (elle évolue !), la théorie de l’évolution n’est plus une hypothèse depuis longtemps. Dans le langage courant, une théorie est une hypothèse, ou supposition, qu’il reste à prouver. En science, le mot a une définition différente. On appelle théorie scientifique une idée confirmée par des observations ou des expériences. On parle ainsi de la théorie héliocentrique, selon laquelle la Terre tourne autour du Soleil. La théorie de l’évolution est la conception générale qui permet de comprendre et d’organiser toute l’information qu’on possède sur la vie et son développement.
PAS DE CONTROVERSE
Voilà près de 150 ans que des chrétiens tentent de discréditer la théorie de l’évolution et, parfois, d’interdire son enseignement. Selon eux, la Bible raconte la création du monde telle qu’elle a eu lieu. Ils croient qu’il y a 10 000 ans Dieu a créé la Terre avec toutes les espèces végétales et animales comme elles existent aujourd’hui, puis qu’Il a façonné l’homme à son image pour régner sur sa création. Même déboutés par les tribunaux et contredits par de nombreux hommes d’Église, ils mènent leur combat au moyen, notamment, de musées de la création (plus de 25 aux États-Unis). Celui de l’Alberta présente une réplique de l’arche de Noé ainsi que des fossiles « prouvant » que l’homme a cohabité avec les dinosaures…
Le créationnisme ou le dessein intelligent suscitaient l’appui de 54 % des Américains en 2005 (sondage Harris) et commencent à faire des gains en Europe. Au grand désespoir des scientifiques, pour qui il n’y a pas de controverse. « Il y a un nom savant pour désigner une hypothèse soutenue par des milliers de preuves, dit le biologiste Graham Bell. Cela s’appelle un fait ! »