L’auteur est urgentologue, ex-chef du département de médecine d’urgence de l’Institut de cardiologie de Montréal. Professeur titulaire à l’Université de Montréal, il enseigne, participe à des recherches en médecine d’urgence et intervient fréquemment sur les enjeux de santé.
En médecine, un traitement ne peut être administré sans le consentement du patient, sauf en cas d’urgence. Il faut notamment lui exposer les effets potentiels de sa maladie, en décrire les suites avec et sans l’intervention proposée, bien répondre à ses questions, puis choisir avec lui la meilleure stratégie.
Durant les premières phases d’une pandémie, quand on doit agir rondement, on peut invoquer l’urgence de la situation pour passer outre la démonstration des risques et des avantages. Mais lorsqu’on a le temps, il faut aller chercher auprès de la population ce qui se rapproche le plus d’une décision partagée.
Pourtant, alors que nous disposons aujourd’hui du temps requis, je constate que les actions à mener ne sont toujours pas abordées ainsi, même si on ne peut plus parler d’urgence. La pandémie est devenue une situation familière, les gens en connaissent davantage à propos du virus et de ses effets (l’information ayant été largement diffusée), et les bénéfices des approches préventives (vaccins, masques, distanciation, ventilation, etc.) sont bien établis, autant que leurs effets négatifs, généralement légers.
Pour les vaccins, objets de campagnes soutenues, j’ai tendance à penser qu’il sera difficile de renseigner davantage la population, voire de convaincre plus de gens, à moins que les choses n’empirent de nouveau. À tout le moins, la grande accessibilité actuelle devrait permettre à tous d’obtenir les doses nécessaires pour être bien protégé.
Les traitements pour les formes graves, quant à eux, sont administrés dans tous nos hôpitaux, tandis que les médicaments efficaces contre les infections légères (ce qui se résume pour l’instant au Paxlovid) seront bientôt mieux distribués. Demeure la difficile question des cas de COVID de longue durée, qui reste dans l’ombre parce que rarement évoquée par les autorités, alors qu’elle devrait faire partie des conversations publiques.
Des échanges posés et factuels sur les risques et les avantages de maintenir ou de retirer les mesures de prévention devraient donc être la norme.
Dans une telle situation, où les zones floues sont de moins en moins présentes, des échanges posés et factuels sur les risques et les avantages de maintenir ou de retirer les mesures de prévention devraient donc être la norme, même si tenir de telles discussions à grande échelle n’est pas toujours facile et s’il est ardu de conserver dans l’espace public une approche constructive, notamment à cause de la polarisation actuelle.
Mais nous recevons encore un peu trop passivement des affirmations vagues et énoncées avec un certain paternalisme, du genre : « on pense que c’est le temps de faire ceci ou cela », « on a décidé de », « on croit qu’il faut », etc. De sorte que les autorités relâchent ou resserrent les mesures sans aller au fond des choses, sans vraiment divulguer les objectifs concrètement poursuivis et sans qu’on puisse comprendre les hypothèses sur lesquelles elles s’appuient.
Pour ma part, ce ton me ramène loin en arrière, quelques décennies au moins, à une époque où trop souvent, quand on discutait des traitements à envisager pour un malade, on se contentait de l’informer des décisions médicales, sans lui détailler les risques et avantages ni aborder des questions autrement plus importantes, mais complexes, telles que ses souhaits et attentes à l’égard des résultats escomptés.
Heureusement, les temps ont bien changé en clinique. Décréter une intervention sans engager un échange approfondi est aujourd’hui considéré comme un manquement au devoir de divulguer les informations, de s’assurer qu’elles sont comprises et de permettre ainsi à la personne soignée sinon de faire son choix elle-même, du moins de participer pleinement à une décision partagée.
Je ne vois pas pourquoi, dans ce contexte, on se refuse encore à une approche plus ouverte, pédagogique et informative, prenant exemple sur les soins, à propos de ces choix ayant de tels effets sur nos vies, dans un sens ou dans l’autre, qu’il s’agisse d’avancer ou de reculer, à quel rythme et pour combien de temps.
Les questions sont pourtant simples. Par exemple, si on relâche des mesures, à quelle quantité de cas, d’hospitalisations, de diagnostics de COVID de longue durée et de décès de plus doit-on s’attendre — sans oublier les répercussions sur les délestages ? Et si on les resserre, quelles seront les conséquences sur la santé mentale, l’apprentissage, l’économie, l’emploi ou que sais-je encore ? Bref, quels sont les vrais enjeux, dans les deux cas de figure ?
L’important, pour la suite des choses, surtout avec cette pandémie qui s’étire et va continuer de nous malmener, c’est que nous soyons en mesure de mieux comprendre ces décisions prises en notre nom, pour y participer davantage. Au point où nous en sommes, il est temps d’exiger qu’on nous serve autre chose que des généralités ; nous devons dorénavant être partie prenante de ces actions qui concernent tout le monde.
Cette chronique a été publiée dans le numéro de mai 2022 de L’actualité.
« Ensemble », « décision partagée », « être partie prenante », « un certain paternalisme »; oui.
« Pour les vaccins, […] il sera difficile […] de convaincre plus de gens ».
À qui l’dites-vous ! Imaginez, a-t-on déjà vu « vaccin » aussi « bâtard » ? À l’égard duquel se demande-t-on : mais à qu[o]i sert-il donc ! Voyant que ça tombe comme des mouches quand même, premier ministre après premier ministre, maire après mairesse, ministre et députée après ministre et député; tous parfaitement (triplement) vaccinés…
Très encourageant, très incitatif à… N’est-ce pas ?
Et ce sans compter qu’on ignore tout d’éventuels effets secondaires à moyen long terme desdits vaccins, hein. On a beau ne pas être complotiste-conspirationniste, même d’un point de vue logique scientifique rationnel conventionnel, on peut en « r’venir » un moment donné d’un tel méli-mélo semblant de plus en plus amateur ou à la va-par-là ou comme-ci comme-ça / « on verra » ben…
il me semble que cet article pourtant bien réfléchi, ne vous a pas calmé dans votre révolte. Personnellement je suis 3x vacciné et j’ai quand même attrapé le BA.2. Je filait très mal pendant 3 jours mais je suis confiant que les vaccins m’ont aidés.
Certains que vous mentionnez ne seraient peut-être plus de ce monde s’ils n’avaient pas été vaccinés. Et depuis qu’on le donne ce vaccin, ils sont où vos effets secondaires? En tout cas, s’il y en a, ils ne durent pas aussi longtemps que les symptômes de la covid longue, que je ne vous souhaite pas.
La question que je me pose depuis le début de la pandémie est la suivante: « Est-ce que la majorité de nos belles personnes âgées vivant dans nos CHSLD auraient été d’accord à passer leurs dernières années de vie en isolement? Avec les visites et sorties réduites au minimum? Ou auraient elles plutôt été préféré, pour la plupart, prendre le risque de voir leur vie peut être un peu écourtée en échange d’une meilleure qualité de vie, de plus de visites de leurs enfants et de leurs petits enfants? Enfants et petits enfants qui auraient aussi tous pu continuer à travailler et à profiter de la vie… Pendant cette foutue pandémie, est-ce qu’on a cherché à protéger des gens qui ne nous l’ont même pas demandé? » Je me le demande toujours. On aurait pu au moins leur poser la question, il me semble.
C’est une bonne question. Pour certaines personnes, la question aurait pu être posée en effet. Il y a tout de même plusieurs problèmes. D’abord, un grand nombre des personnes résidant en CHSLD ont des troubles cognitifs qui les rendent inaptes à de telles décisions. Ensuite, le risque n’est pas qu’individuel en pandémie, et en particulier dans ce genre de centre: la décision ne peut donc être seulement individuelle, puisqu’elle peut avoir un impact sur d’autres personnes. Enfin, il y a la question plus globale de l’impact sur l’ensemble de la société. En fait, une pandémie est une situation où les droits individuels doivent parfois céder le pas aux droits collectifs.
LA COVID -19 est en sa sixième vague ! les gens de plus de 60 ans devraient être vacciner ou si cela serait exagérer !Je suis actuellement convaincu d’avoir eu mes trois doses en-tête d’une quatrième qui ne devrait pas tarder Mais je n’ai aucune nouvelle date du cheminement des soins en OMHM ! J’ose croire qu’à soixante-dix ans on fasse affaire avec une clinique mais dans le passé on annonçait en avance la venue pour aller se faire vacciner car il se rendait sur place même ! Serait-ce obligatoire ou sans formalités afin de suivre les restrictions de la Santé Nationale ! Fates-moi part du message actuel !
Entièrement d’accord avec le texte du Dr. Vadeboncoeur. Depuis le départ du Dr. Arruda je suis continuellement à me dire après les points de presse de son remplaçant, que j’espère que quelqu’un sait où on s’en va. Que les décès qui continent à se multiplier sont causés par des gestes…lesquels, Surement des infos. qui nous aideraient à sauver qques vies.