Doit-on craindre la listériose ?

Cette semaine dans l’émission STAT, des personnes âgées ont contracté cette infection dont on entend rarement parler. S’agit-il d’une maladie grave ? Quels en sont les traitements ? C’est ce que nous allons voir ensemble.

Photo : Daphné Caron pour L’actualité

Notre collaborateur le Dr Alain Vadeboncœur, urgentologue et professeur titulaire à l’Université de Montréal, est conseiller médical pour l’équipe de l’émission STAT. Il s’inspire ici des intrigues de la série télévisée pour donner des renseignements plus approfondis sur certaines des maladies diagnostiquées à l’écran. 

Alerte au divulgâcheur : ne lisez pas ce texte si vous n’avez pas encore regardé l’épisode de jeudi de l’émission STAT !

La listériose est causée par la bactérie Listeria monocytogenes, assez présente dans l’environnement, y compris dans le sol, l’eau et les aliments.

Cette bactérie peut survivre et se multiplier dans des conditions limites, comme les températures de réfrigération et de congélation, ce qui rend son élimination difficile. Il est pourtant essentiel d’y arriver pour éviter l’infection.

La contamination des aliments

La maladie de la listériose est surtout contractée en consommant des aliments contaminés. Les aliments en cause comprennent les viandes et les produits carnés, les produits laitiers, les fruits de mer, les légumes et les fruits crus, par exemple. Dans l’épisode, l’origine reste incertaine. Ce sera aux autorités de santé publique de trouver la réponse.

Les viandes et les produits carnés crus (ou insuffisamment cuits) peuvent ainsi être contaminés par la bactérie Listeria monocytogenes. Les produits laitiers non pasteurisés sont également à risque.

Les fruits de mer crus (ou insuffisamment cuits) causent aussi parfois l’infection. Même les légumes et les fruits crus peuvent nous contaminer, en particulier s’ils ont été mal lavés ou en contact avec des surfaces souillées. De même pour les aliments préparés prêts à manger, tels que les sandwichs et les salades. Donc un peu tout, comme on le voit.

Une infection rare au Canada

L’incidence de la listériose est faible au Canada, ce qui est rassurant. Elle peut avoir des conséquences graves, en particulier chez les personnes à risque, qui peinent à se défendre. Même si c’est une des causes de mortalité par intoxication alimentaire les plus fréquentes, le nombre global de décès reste bas.

En 2020, par exemple, on a dénombré 42 cas confirmés de listériose au Canada, dont certains liés à la consommation de saucisson. Sur ces 42 cas, 29 personnes ont été hospitalisées. Aucun décès n’a été signalé au Canada cette année-là.

En 2008 par contre, 22 personnes sont décédées au Canada à la suite de la « crise de la listériose », liée à des produits de l’entreprise Maple Leaf, ce qui a mené à une enquête où des erreurs ont été notées et des changements ont été recommandés pour éviter une nouvelle contamination. 

L’incidence de la listériose aux États-Unis est également relativement basse. En 2020, 1 674 cas confirmés ont été signalés aux États-Unis ; 1 590 personnes ont été hospitalisées et on a recensé 178 décès.

L’épidémie la plus grave aux États-Unis, qui s’est produite en 2011, était liée à la consommation de melons contaminés par la bactérie. Elle a causé 33 décès et plusieurs maladies graves, en plus d’entraîner l’un des plus importants rappels de produits alimentaires de l’histoire.

Selon l’OMS, on dénombre environ 250 000 cas de listériose dans le monde chaque année. On pense que de 20 % à 30 % de ces cas de listériose déclarés dans le monde seraient létaux, ce qui correspond à quelque 50 000 décès chaque année, une estimation qui varie toutefois beaucoup selon les sources consultées.

L’incidence de la listériose diffère d’un pays à l’autre. Elle est généralement plus élevée dans les pays en développement, où les normes d’hygiène alimentaire sont souvent moins strictes.

Notez aussi que, globalement, la listériose est probablement sous-déclarée, car tous les cas ne sont pas signalés aux autorités sanitaires, les symptômes bénins ne menant pas à des visites à l’hôpital ni à des décès, évidemment.

Comment se manifeste la listériose ?

La maladie est parfois grave, voire mortelle, en particulier chez les personnes dont le système immunitaire est affaibli, les femmes enceintes et les nouveau-nés.

Les symptômes comprennent de la fièvre, des douleurs musculaires, des maux de tête, des nausées et des vomissements. Bref, comme un peu n’importe quelle autre infection au départ, d’où la difficulté de la distinguer d’autres infections gastro-intestinales courantes.

Chez les personnes au système immunitaire affaibli, la listériose se manifeste parfois sous forme de septicémie, une infection grave où la bactérie circule dans le sang, ce qui menace la vie, ou même de méningite, infection des enveloppes du cerveau et de la moelle épinière.

Chez les femmes enceintes, la listériose entraîne quelquefois une infection du fœtus, un accouchement prématuré ou une fausse couche. L’enfant peut ainsi naître avec la maladie et devoir être traité.

Par ailleurs, le fait que les symptômes apparaissent de quelques jours à plusieurs semaines après la consommation d’aliments contaminés rend la maladie difficile à diagnostiquer.

Traitement et complications

La listériose est généralement traitée par des antibiotiques courants administrés par voie intraveineuse ou orale, selon la gravité de l’infection et l’état de santé de la personne touchée.

Dans les cas plus graves, comme pour certains patients de l’épisode, une hospitalisation est nécessaire pour surveiller l’état du malade et fournir des soins de soutien en plus de l’antibiothérapie.

Les complications possibles de la listériose, dont la septicémie, la méningite et la pneumonie, trois problèmes graves qui menacent parfois la vie, font l’objet de soins spécifiques et exigent habituellement un séjour aux soins intensifs.

La prévention

Bien que les infections à la bactérie Listeria monocytogenes restent rares, comme on le voit, la prévention demeure essentielle, étant par ailleurs efficace contre plusieurs toxi-infections alimentaires.

D’où l’importance des règles d’hygiène dans la préparation industrielle des aliments et des repas à la maison, d’une cuisson adéquate et surtout du respect de la chaîne du froid, des pratiques bien établies depuis longtemps dans beaucoup de pays.

On peut ainsi diminuer le risque d’être exposé non seulement à la listériose, mais aussi aux autres infections alimentaires, comme la salmonellose, la campylobactériose, l’infection à Escherichia coli (« maladie du hamburger »), les infections à norovirus et les (parfois) foudroyantes toxi-infections alimentaires staphylococciques et à Clostridium perfringens, pour nommer les plus courantes.

Mais tout cela sera sans doute pour une future chronique, celle-ci étant déjà terminée ! En attendant, n’oubliez pas de respecter les règles de base de l’hygiène alimentaire, surtout lorsque vous cuisinez pour de très jeunes enfants, des personnes âgées et des femmes enceintes.

C’est qu’on voudrait surtout leur éviter les visites aux urgences !

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Je ne suis en rien un scientifique, mais l’amateur de fromages au lait cru que je suis peut donner un bon conseil à ceux qui craignent la listériose : éviter de manger la croûte de ces fromages-là et vous réduirez le risque presque à néant. Sur ce, bon appétit!

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