Douleurs à l’estomac : reflux, ulcère, gastrite ou dyspepsie fonctionnelle ?

Un mal d’estomac peut être dû à une infection, à une indigestion et à bien d’autres choses encore. Voici comment distinguer les causes probables et choisir le bon traitement.

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Il nous arrive tous, après un repas copieux ou trop arrosé, de « mal digérer », d’avoir mal à l’estomac. Quand ce malaise ou cette douleur se répètent régulièrement ou dépassent le seuil du tolérable, nous viennent en tête les reflux gastrique, ulcère d’estomac et gastrite, des maux aux noms familiers, mais aux contours plutôt flous.

Il peut être difficile de les distinguer. On les confond d’ailleurs souvent avec un trouble moins « célèbre », mais encore plus fréquent, la dyspepsie fonctionnelle. Chacun a ses propres causes et symptômes, et les traitements varient. 

Serait-ce du reflux gastro-œsophagien ?

On parle couramment à tort de brûlements d’estomac. « Quand on souffre de reflux, ce n’est pas l’estomac qui fait mal, c’est le contenu de l’estomac qui fait mal à l’œsophage », précise le gastroentérologue Nicolas Benoît, qui pratique à l’hôpital Pierre-Boucher. L’œsophage est ce tube qui relie notre bouche et notre estomac. À son extrémité inférieure se trouve un sphincter qui s’ouvre pour laisser passer la nourriture et les liquides, puis se referme hermétiquement.

Si le sphincter est défectueux, le contenu de l’estomac, additionné des puissants acides qui assurent la digestion, remonte dans l’œsophage. Or, tandis que les parois de notre estomac sont conçues pour résister à cette mixture corrosive, notre œsophage ne bénéficie pas d’une telle protection. Le contact avec la solution acide est donc très douloureux.

Nous éprouvons tous à l’occasion la sensation de brûlure causée par le reflux, après avoir consommé par exemple de l’alcool, des plats épicés ou des aliments acides. La douleur est plutôt diffuse, localisée derrière le sternum, et accompagnée ou non de régurgitations. Les médicaments antiacides en vente libre suffisent généralement à soulager l’inconfort provoqué par le reflux occasionnel.

Ou plutôt un ulcère d’estomac ?

Les causes les plus fréquentes de l’ulcère d’estomac — de son vrai nom l’ulcère gastroduodénal — sont bien connues : les anti-inflammatoires non stéroïdiens, comme l’ibuprofène (Advil), et la bactérie Helicobacter pylori (H. pylori), qui est présente dans l’estomac d’environ 15 % des Québécois.

Dans les deux cas, la muqueuse protectrice de l’estomac est fragilisée, ce qui favorise l’apparition d’une lésion qui expose les couches sous-jacentes de la paroi gastrique, qui ne sont pas protégées contre les acides digestifs.

On imagine sans peine le résultat et la douleur qui s’ensuit. Intense et très localisée, elle est généralement ressentie sous le sternum, parfois au milieu du dos. Difficile de la confondre avec d’autres troubles gastriques, note le Dr Benoît : « Ça arrive rapidement, et c’est aigu. Bien souvent, la douleur de l’ulcère conduit directement à l’urgence. » La plupart du temps établi à la suite d’une gastroscopie, le diagnostic est simple et tangible. « Un ulcère, ça se voit : la muqueuse est complètement érodée. »

Et si c’était une gastrite ?

La gastrite est en fait un terme fourre-tout pour toutes les inflammations de l’estomac. Elle se manifeste habituellement par une douleur dans le creux sous le sternum et a de multiples causes possibles, allant du tabac à la radiothérapie. Les deux principales sont la bactérie H. pylori et les anti-inflammatoires, comme pour l’ulcère, qu’elle précède souvent.

Si elle peut être circonstancielle — après une gastroentérite, par exemple —, il ne faut pas la prendre à la légère si elle s’installe et devient chronique, car elle peut dégénérer en cancer de l’estomac, prévient le Dr Michaël Bensoussan, gastroentérologue à l’hôpital Charles-Le Moyne.

Par conséquent, « dès que les gens ressentent des symptômes gastriques qui perdurent, ils devraient insister auprès de leur médecin pour dépister H. pylori ». Éradiquer la bactérie est facile et peut éviter bien des complications, souligne le Dr Bensoussan. « Seulement environ 1,5 % des gastrites chroniques deviendront des cancers de l’estomac. Par contre, tous les cancers de l’estomac auront d’abord été des gastrites chroniques. »

Qu’est-ce que la dyspepsie fonctionnelle ? 

« J’estime que 75 % des patients qui me consultent pour une difficulté à digérer ou des douleurs à l’estomac vont avoir un diagnostic de dyspepsie fonctionnelle, explique le Dr Nicolas Benoît. C’est méconnu, mais extrêmement fréquent. »

Comme pour son proche cousin le syndrome du côlon irritable, ses symptômes sont variés et difficiles à décrire, même par ceux qui les endurent : nausées, sensation de satiété précoce, ballonnements, douleur diffuse ou crampes de l’estomac…

Si on observe l’intérieur de leur estomac, il semble parfaitement normal, mais il est en fait hypersensible. Le diagnostic comme le traitement peuvent demander temps et patience. Les antiacides fonctionnent bien pour certains, mais quand les solutions pharmacologiques n’apportent pas le soulagement espéré, il faut tâcher d’améliorer les habitudes de vie, dont l’alimentation.

Dans quel cas devrait-on consulter pour des douleurs d’estomac ?

En excluant l’ulcère, qui impose une consultation d’urgence, si les maux d’estomac surviennent plus de trois fois par semaine pendant quelques semaines, il est judicieux de consulter un médecin.

Si on soupçonne la présence de la bactérie H. pylori, on procédera au dépistage. S’il s’avère positif, on traitera l’infection avec des antibiotiques et un médicament inhibiteur de la pompe à protons (IPP), qui réduira la production d’acide gastrique et permettra à la muqueuse de guérir.

Hormis les solutions pharmaceutiques, travailler sur les habitudes de vie, dont l’alimentation, l’activité physique et le sommeil, peut grandement améliorer les choses en amont, tout comme une meilleure gestion du stress. Il n’est donc pas futile de dire à quelqu’un qui a toujours mal à l’estomac de se détendre. « Ce n’est pas seulement un bon conseil, dit en souriant le Dr Bensoussan, c’est scientifiquement prouvé. »

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Bonjour
Vos articles sont toujours très intéressant et utiles.
Suggestion: Ce serait intéressant de vous lire sur le problème de la mauvaise haleine qui affecte beaucoup de personnes hommes ou femmes et qui parfois est chronique chez plusieurs même s’ils ont une bonne discipline de vie ,d’alimentation,d’hygiène buccale etc.
Quelles en sont les causes physiques ?Existe il des soins ? Etc.
Merci

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En effet le traitement de H. pylori est simple mais il faut préciser qu’il est très désagréable. Les effets secondaires sont importants au point que j’aurais renoncé à le refaire si le résultat avait été négatif. Par contre les bienfaits sont très appréciés au quotidien.

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