Confession : je suis un fan fini du Pharmachien. Connaissez-vous? C’est Olivier Bernard, un pharmacien iconoclaste, qui sur le web s’attaque avec un humour décapant à plusieurs mythes en santé.
Non seulement le Pharmachien est plein d’esprit, mais à coup de bandes dessinées mordantes et de vidéos pas piqués des vers, il nous informe. Et nous aide à développer une vision plus critique des soins de santé.
C’est un cas, je vous dis. En connaissez-vous d’autres, des pharmaciens qui disent publiquement à une journaliste, et avec le sourire, que l’homéopathie est « l’arnaque du siècle »?
Il va même plus loin :
« C’est pareil comme boire un verre d’eau du robinet. C’est super utile pour les gens qui ont trop d’argent et qui cherchent un moyen de s’en débarrasser. ».
Et toc!
Et lequel d’entre eux dénonce les pseudo-vertus des colliers de noisetier ? Et des bracelets magnétiques? Tiens, avant d’en acheter, je vous suggère de regarder l’essai qu’il a mené sur le sujet. Autre classique : les recettes pour faire votre propre homéopathie à la maison. Délectable. Et détonant.
Le Pharmachien aborde d’autres thérapies à l’effet non démontré, en donnant l’explication : l’effet placebo, dont la puissance est par ailleurs étonnante.
Mais alors, pourquoi les pharmaciens vendent-ils tous ces produits? Réponse franche à la journaliste Judith Lussier:
« L’homéopathie, les colliers de noisetier, les produits détoxifiant, les pharmacies en vendent parce que les clients en demandent. Les pharmaciens propriétaires veulent faire plaisir à leur clientèle. Moi, j’éduque les gens sur mon blogue pour qu’ils cessent d’en demander et que ces produits-là meurent par eux-mêmes. »
Le Pharmachien se ne gène heureusement pas non plus pour se payer la tête des médecins, ceux qu’on voit dans les séries télévisées, en particulier. Et il planifie sa vision d’une série qui serait basée,cette fois, sur la vie d’un… pharmacien:
« Un pharmacien désillusionné et aux méthodes non conventionnelles, en dispute avec son ex-femme propriétaire d’une pharmacie concurrente, tentant de renouer avec sa fille étudiant en médecine et tourmenté par sa sœur naturopathe, tombe amoureux d’une représentante pharmaceutique aux motivations incertaines et se retrouve malgré lui entraîné dans une série de mésaventures aussi mystérieuses qu’hilarantes … »
J’ai hâte.
En attendant, nous avons droit à une hilarante tranche de sa vie : le récit de son propre séjour dans une urgence, où il vit intensément… ses piqures! Tordant et plein d’autodérision efficace.
Tout en rigolant, le Pharmachien pose toutefois des questions fort sérieuses, qui traitent de notre rapport à la maladie, aux soignants, au système de santé, aux traitements qui marchent et aux thérapies plus ou moins farfelues.
Il ose remettre en question plusieurs croyances. L’humour devient alors un bon moyen d’aborder ces sujets parfois délicats.
Informer ainsi les gens sur la santé m’apparaît fondamental, surtout d’un point de vue critique. Mais ce n’est pas nécessairement facile. Le professionnel doit parfois remettre en question des vérités largement partagées, mais tout de même erronées. Et heurter certaines convictions,
J’ai traité ailleurs de l’importance de remettre en question ce qui n’aide pas les gens à vivre mieux ou plus vieux. Ce qui définit simplement l’efficacité d’un traitement.
Dans l’émission les Docteurs, j’ai par exemple abordé la question du dépistage du cancer de la prostate, qui n’est plus recommandé depuis quelques années par plusieurs autorités neutres – ou bien seulement avec des réserves importantes et l’obligation d’en aborder les limites avec les patients. Un gros débat.
Aborder ces questions controversées avec le grand public, moins au courant des controverses, demande un certain doigté. Le Pharmachien y arrive avec humour et efficacité.
Le discours du Pharmachien est aussi juste et balancé que pertinent. Mais j’imagine que les utilisateurs et surtout les fabricants des colliers de noisetiers ou des bracelets doivent grincer quelque peu des dents. Et peut-être certains pharmaciens propriétaires.
Qu’un pharmacien aborde la question délicate des traitements vendus en pharmacie mais dont l’efficacité présumée ne repose sur aucune base scientifique est essentiel. Parce que le conflit d’intérêts sous-jacent doit être ouvertement abordé, surtout à l’heure où la profession va élargir (ce que j’encourage) son droit de prescription.
J’oubliais! Que répond donc le Pharmachien à la journaliste qui lui demande:
« Et les suppositoires, ça fonctionne?
– Oui. Mais c’est moins populaire au Québec qu’en Europe, par exemple. Ici, on n’est pas super confortable avec ce procédé, on dirait. »
Confortable!
Les curieux pourront en lire plus dans sa Bible des suppositoires, ou il traite ce sujet en profondeur.
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