
L’imprimante fonctionne sans arrêt depuis deux heures dans les bureaux de Consult, une jeune entreprise montréalaise. Quand la machine se tait enfin, le fondateur, Daniel Finkelstein, en sort un triangle en plastique gris d’une dizaine de centimètres de long : un aileron de planche de surf, prêt à être utilisé.
« Je fais un dessin à l’ordinateur, j’appuie sur la touche d’impression et, quelques heures après, j’ai le produit en main. On vit le futur ! » dit avec enthousiasme Daniel Finkelstein, 26 ans.
Derrière lui, l’imprimante 3D entame déjà la fabrication d’un nouvel objet. L’appareil, légèrement plus petit qu’un photocopieur, n’émet qu’un léger bourdonnement. Son apparence banale cache toutefois une technologie qui promet de révolutionner la production des biens de consommation.
Le concept est simple. L’imprimante 3D dépose sur une plaque une mince couche de résine, de plastique ou de métal, selon son type. Une fois cette couche solidifiée, une autre lui est superposée, et ainsi de suite jusqu’à ce que l’objet soit terminé.
On peut fabriquer de tout : prothèses, bijoux, pièces d’automobile, meubles, jouets, vêtements (des gants, par exemple). Et comme le traditionnel moule est remplacé par un fichier informatique, chaque produit peut facilement être personnalisé avant sa fabrication. Vous pouvez commander une poupée à l’image de votre enfant ou un étui de protection unique pour votre téléphone cellulaire.
La technologie existe depuis 1984. Mais à l’image des premiers ordinateurs, les imprimantes 3D de l’époque étaient difficiles d’utilisation, peu efficaces et coûteuses. Aujourd’hui, des modèles professionnels se vendent à partir de 15 000 dollars. La société américaine MakerBot offre même un appareil maison, le Thing-O-Matic, pour environ 1 300 dollars.
« Maintenant que l’impression 3D est plus accessible, nous allons assister à l’apparition d’un nouveau milieu manufacturier, qui desservira le marché local », croit Terry Wohlers, un consultant américain qui s’intéresse à cette technologie depuis 25 ans. « Si vous cassez une pièce qui ne se vend plus, vous pourrez l’apporter au centre commercial et vous en faire imprimer une nouvelle, identique. »
Du chemin reste tout de même à parcourir avant qu’on trouve une imprimante 3D au dépanneur du coin, à côté du photocopieur. Outre les coûts, le dessin pose problème. Si gribouiller un lapin s’avère difficile pour la plupart des gens, imaginez le faire en 3D !
Quelques entreprises, dont la française Sculpteo et l’américaine Shapeways, règlent ce problème en offrant un service en ligne d’impression clés en main. Les clients choisissent parmi une gamme d’objets prédessinés, qu’ils personnalisent selon leurs besoins. « Ils peuvent changer la forme, la couleur ou ajouter du texte », explique le PDG et cofondateur de Sculpteo, Clément Moreau.
Une autre technologie, le scanneur 3D, élargit l’éventail des possibilités. Cet appareil fabrique un fichier en trois dimensions à partir d’un objet existant. Pour l’instant, seule la forme extérieure peut être copiée, pas le mécanisme. N’empêche, pour des choses simples, comme des figurines, cela ouvre la porte au piratage. Après la musique, les objets ?
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Jean Charest, le clone
L’actualité a commandé une figurine du premier ministre du Québec à la société Sculpteo, afin de tester l’efficacité des services d’impression en 3D.
Nous avons fourni une photo de profil de Jean Charest et une photo de pied en cap. Onze jours plus tard, il a été possible de voir un aperçu avant impression. On aurait dit une figurine de Stephen Harper !
Le résultat manquait de nuances. Nous avons donc demandé quelques modifications par courriel : ajouter de la calvitie au niveau des tempes, ne pas cacher le gras du menton, mettre les cheveux plus blonds que gris et leur donner un peu de texture pour qu’ils aient l’air bouclés.
Après un total de 28 jours et une dépense de 100 dollars, le produit était livré dans une petite boîte en carton. Verdict : cloner Jean Charest demeure une entreprise risquée…
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