William Emond fait un doctorat sur le thème du mal des transports à l’Université de technologie de Belfort-Montbéliard, en France.
Comme chaque année, la saison estivale rime avec les départs en vacances. Si certains attendent cette période avec impatience, d’autres la redoutent… La raison ? Les longs voyages en voiture, en bateau, en bus, en train ou en avion qui se transforment pour eux en véritable calvaire.
Un mal des transports qui n’est pas anecdotique, puisque près d’un tiers de la population serait sensible à la « cinétose » — une pathologie dont on ne connaît toujours pas exactement les causes à ce jour. Toutefois, selon la théorie la plus acceptée à ce sujet, elle serait causée par une mauvaise perception des mouvements auxquels nous sommes exposés.
Les départs et retours de vacances estivales semblent particulièrement propices à l’installation de ce malaise insidieux… Nous sommes, pour ceux qui y sont sensibles en tout cas, plus fréquemment malades lors de ces trajets que lors de nos parcours habituels !
Notons aussi que de nombreux passagers ressentent une sensation de fatigue, de somnolence, d’apathie ou un manque d’énergie sans avoir rien fait de spécialement épuisant : il s’agit en fait de manifestations légères de cinétose, ce qui montre que beaucoup plus de gens sont touchés qu’on ne le pense.
Pourquoi cette susceptibilité apparemment exacerbée ? Les raisons sont en fait multiples… Comparés à des trajets normaux, ces voyages induisent des conditions particulières, toutes potentiellement capables d’augmenter l’incidence et l’intensité des symptômes. Voici quelques éléments d’explications… ainsi que quelques conseils pour minimiser ce risque.
Les longs trajets : une répétition de mouvements préjudiciables
En voiture, plus on voyage longtemps et plus on est susceptible de se sentir malade, comme le démontrent plusieurs modèles mathématiques de prédiction du mal des transports.
En effet, c’est le cumul de mouvements désagréables qui nous fait franchir le seuil au-delà duquel les symptômes se déclenchent. Chez certaines personnes, ils peuvent apparaître au bout de quelques minutes à peine… tandis que chez d’autres, ils se manifestent plus lentement. Seuls les longs trajets peuvent alors les pousser dans leurs derniers retranchements et les rendre malades elles aussi, après plusieurs heures de route, de vol, de bateau…
Et les activités déployées pour faire passer le temps lors d’un long trajet peuvent contribuer davantage à ces sensations de malaise. On préfère en effet souvent se concentrer sur des activités distrayantes : lire un livre, regarder un film, jouer à des jeux vidéos ou surfer sur les réseaux sociaux… Sauf que ces tâches visuellement stimulantes nous absorbent au point que nous ne nous concentrons plus sur les informations visuelles qui nous permettent d’assimiler les mouvements du véhicule. Cela crée un conflit de perception du mouvement. Par conséquent, il devient beaucoup plus facile de tomber malade.
L’ambiance à bord : des risques qui s’accumulent
En été, la température intérieure du véhicule est difficilement réglable, avec le soleil qui y impose souvent une chaleur étouffante : des conditions qui ont tendance à accentuer les symptômes de cinétose.
Dans un milieu chaud, notre corps doit fournir un effort pour réguler sa température — par la transpiration ou la respiration, par exemple. Ces différents signes sont autant de symptômes dits primaires, car ils peuvent contribuer à l’émergence d’autres symptômes plus conséquents : dilatation des vaisseaux sanguins, malaise, nausée ou vomissements, le cas échéant.
Pour contrer ces effets, on serait tenté de mettre en route la climatisation, qui pourrait elle-même, au contraire, aggraver la situation pour les passagers qui y sont très sensibles. Les systèmes de ventilation ou d’aération de l’habitacle montrent également leurs limites.
Les odeurs désagréables constituent un autre facteur susceptible d’accentuer les symptômes de malaise en voiture : les odeurs de pollution, de cigarette, de renfermé ou même celle du cuir seraient la deuxième cause du mal des transports ! Un scénario qui risque plus de se produire lors de la saison de départs en vacances, où des pics de pollution sont régulièrement enregistrés et où les rayons du soleil font chauffer les matériaux. On sait par ailleurs qu’une région du cerveau (l’area postrema) est capable de déclencher hypersalivation et nausée rien qu’en détectant certaines odeurs — un réflexe protecteur contre les toxines et autres poisons.
Le trafic routier : une contrainte physique et mentale
Dans une voiture, ce n’est pas la vitesse qui rend malade, mais plutôt ses variations, surtout lorsqu’elles sont abruptes. Les mouvements d’accélération et de freinage seraient même les plus perturbants pour l’organisme, plus encore que la prise de virages.
En pratique, ces variations de vitesse sont souvent imposées par la réglementation routière (limitations, croisements, feux), mais également par l’état de la circulation. Un véhicule coincé dans des embouteillages sera contraint à une succession d’accélérations et de décélérations éprouvantes même à basse vitesse.
Et les embouteillages ajoutent aussi une contrainte psychologique. Avec l’allongement du temps de trajet, déjà long potentiellement, l’anxiété quant à l’heure d’arrivée qui recule, la fatigue, le stress, l’agacement… viennent plomber le moral des passagers. Il a été observé que de tels facteurs influencent considérablement le niveau de gravité des symptômes.
Mieux vaut donc prendre son mal en patience et garder l’esprit détendu ! Ce qui est, il est vrai, plus facile à dire qu’à faire…
Quelques astuces pour limiter les dégâts
Si vous prenez la route avec des passagers susceptibles de tomber malades, ou alors si vous êtes vous-même sensible, sachez que quelques changements dans vos habitudes de voyage peuvent vous aider. Nous les résumons ici.
En tant que conducteur :
- Faites des pauses régulières. Cela permet aux passagers de s’aérer et de réduire leurs symptômes de manière importante, voire de les faire disparaître. Parfois, les symptômes peuvent mettre du temps à se dissiper, mais de 15 à 30 minutes suffisent généralement.
- Essayez de limiter les accélérations et décélérations brutales. Roulez autant que possible à une vitesse constante et adoptez une conduite souple, y compris lorsque vous dépassez d’autres véhicules ou freinez.
- Évitez de tourner trop brusquement dans les virages sur des routes sinueuses. Les passagers doivent être le moins déséquilibrés possible dans leurs sièges.
Pour les passagers :
- Installez-vous le plus à l’avant possible du véhicule. Les mouvements y sont mieux assimilables. C’est en conduisant que l’on est le moins affecté puisque les mouvements du véhicule sont parfaitement maîtrisés.
- Évitez de vous concentrer sur des écrans et autres contenus visuels (livres, etc.), surtout si le véhicule ne roule pas à une vitesse constante. À la place, essayez de regarder par la fenêtre loin devant, en direction de l’horizon.
- Fermez les yeux ou essayez de dormir. Ralentir son activité aide à apaiser le corps.
- Inclinez votre siège vers l’arrière. Cela permet d’être moins déstabilisé par les mouvements du véhicule.
- Privilégiez des activités ludiques avec d’autres passagers en cas d’ennui : jouer à « par la fenêtre, je vois… », chanter, compter les voitures d’une couleur ou marque particulière et autres activités aussi désuètes qu’efficaces contribuent à faire passer le temps et surtout à moins se focaliser sur le malaise ressenti. La psychologie joue en effet un rôle prépondérant dans l’apparition et la disparition des symptômes !
Enfin, compte tenu du rôle prédominant de la psychologie dans l’évolution des symptômes, sachez que des passagers se sentant malades pourraient se sentir mieux avec un simple placébo (une solution sans effet démontré, mais annoncée comme étant bénéfique). Des techniques simples peuvent se montrer spécialement efficaces. Par exemple, proposer de mâcher un bonbon ou un chewing-gum, de boire une gorgée d’eau ou de respirer un peu d’air frais en vantant leurs mérites pour lutter contre les symptômes peut avoir son petit effet.
Nous vous souhaitons donc bonne route, en espérant que le voyage se fera dans les meilleures conditions !
Cet article est republié à partir de La Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.
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Je n’ai heureusement jamais eu a subir moi-même le mal des transport mais ma jeune chienne de 10 mois en est affligée. Nous avons dû nous résigner à lui donner une médication prescrite pas sa vétérinaire et lors d’un récent voyage en Abitibi, n’ayant plus de médicament, nous tourner vers les Gravol enfants, à la grande surprise du pharmacien d’ailleurs,
Quant à moi, cet article passe vraiment à côté de plusieurs dimensions importantes, reliées au mal des transports… et propose même des solutions plus que discutables, pour y remédier. Le fait d’incliner sa banquette, ou d’essayer de dormir, ou ce genre de choses… peut en effet aggraver le problème, simplement. Dans ma jeunesse, j’ai été plusieurs fois malade, en voiture, lorsque nous descendions vers le lieu de naissance de mon père, à exactement 100 milles de Québec… Trajet que nous faisions « d’une seule traite », dans une voiture beaucoup moins « moderne » que les véhicules actuels, moins bien isolée, notamment entre le châssis et l’habitacle. Aération beaucoup moins efficace, énergie cinétique (roulement), engendrant beaucoup d’électricité statique… sans doute aussi grande sensibilité aux pollens et à la fièvre des foins ou autres allergies… Mes problèmes ont fini par se dissiper au fil des ans, à mesure que je « grandissais », et surtout lorsque je me suis mis à pratiquer régulièrement le jeu de la clarinette et surtout du chant. La respiration abdominale, de mieux en mieux contrôlée, mes capacités respiratoires augmentées et gagnant sans cesse en efficacité, voilà ce qui m’a « guéri » à tout jamais de mes problèmes de mal des transports. Aucun rapport (du moins « observé ») avec des sensations de vertige ou « mal des hauteurs »… quoiqu’un lien potentiel pourrait fort bien exister, entre les deux sensations débilitantes… Un solide contrôle des capacités respiratoire (action combinée du diaphragme et des muscles abdominaux) fournit une « gymnastique abdominale » des plus salutaire et profitable pour la bonne santé générale. À recommander en toute priorité !