Pourquoi fait-on de l’anxiété ?

L’anxiété est nécessaire à notre survie, mais elle peut devenir envahissante et souffrante. Pour dompter les symptômes physiques et psychologiques qu’elle provoque et la ramener à un niveau tolérable, des traitements psychothérapeutiques et pharmacologiques sont recommandés.

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«Pourquoi j’ai dit ça ? Qu’est-ce qu’elle va penser… » « Il n’est pas encore rentré, quelque chose de grave est sûrement arrivé. » Des pensées négatives qui reviennent en boucle, cela s’appelle des ruminations mentales. C’est un symptôme assez classique d’anxiété. Et les sensations physiques qui les accompagnent, comme des palpitations ou des tensions, n’ont rien d’agréable. 

Souvent, les personnes qui en souffrent sont incapables d’expliquer pourquoi elles ont autant d’appréhensions. Elles ont l’impression de faire de l’anxiété sans raison. 

Le psychologue Camillo Zacchia, clinicien privé montréalais spécialisé dans le traitement des troubles anxieux et vice-président de l’organisme Phobies-Zéro, se fait rassurant : « Toutes nos peurs sont là pour une raison », affirme-t-il. En effet, elles servent à nous protéger des dangers, qu’ils menacent notre intégrité physique (blessure, maladie, etc.), notre esprit (peur de perdre le contrôle, peur de l’échec, etc.) ou notre image (peur d’être jugé, anxiété sociale, etc.). 

Ainsi, on vit tous de l’anxiété pour différentes raisons et à divers degrés. Mais chez les personnes atteintes d’un trouble anxieux, elle est souffrante et nuit au fonctionnement quotidien, explique le psychologue.

Quels sont les symptômes les plus fréquents du trouble d’anxiété généralisée ? 

En plus des ruminations et des inquiétudes diverses, la personne touchée peut ressentir d’autres symptômes psychologiques, selon le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-5). En voici quelques-uns :

  • irritabilité ;
  • difficulté à se concentrer, trous de mémoire ;
  • peur de mourir, de perdre le contrôle ;
  • sentiment d’irréalité, d’être détaché de soi.

Ces pensées sont souvent associées à des symptômes physiques. Elles peuvent donner mal au ventre et perturber notre sommeil, ou faire que les muscles sont constamment tendus. Diarrhée et maux de tête fréquents ? Il y a peut-être de l’anxiété là-dessous.

Divers autres malaises peuvent apparaître avec une intensité variable, selon le DSM : 

  • étourdissements, vertiges ou impression d’évanouissement imminent ;
  • nausées ;
  • palpitations ou accélération du rythme cardiaque ;
  • sensation d’étouffement ou d’étranglement ;
  • transpiration excessive ;
  • bouffées de chaleur ou frissons ;
  • tension, tremblements ou secousses musculaires ;
  • serrements et douleurs à la poitrine ;
  • engourdissements ou picotements.

Lorsque la panique s’installe, ces symptômes physiques peuvent être ressentis de façon brutale et faire croire à un malaise cardiaque.

Les anxieux peuvent finir par adopter des comportements d’évitement, pour ne pas faire face à une situation qui ferait naître ces malaises. Ils peuvent aussi se trouver dans un état de vigilance constant. 

Quand consulter ?

Une personne qui ressent plusieurs de ces symptômes et qui vit de la détresse a tout intérêt à en parler à un professionnel de la santé, qui pourra établir si elle souffre bel et bien d’un trouble anxieux ou s’il s’agit d’autre chose. Elle gagnera à le faire avant d’avoir de la difficulté à mener ses responsabilités sociales, professionnelles ou familiales.

Qu’est-ce qui cause l’anxiété ?

Trois grandes causes peuvent expliquer l’anxiété, selon le Dr Zacchia : notre nature humaine (l’instinct de survie), notre personnalité et nos expériences.

Bien que ressentir de l’anxiété soit désagréable, elle nous permet d’être en vie ! Fut une époque où l’on vivait dans la nature, et notre instinct nous permettait de survivre dans un environnement hostile, où les falaises, les animaux, les endroits clos et les étrangers représentaient des menaces. Aujourd’hui, dans un monde moderne, cet instinct est encore présent en nous, mais il n’est plus toujours adapté : « Être dans une caverne et qu’un lion y entre, c’était dangereux. Maintenant, on n’a plus à avoir peur d’être coincé dans un ascenseur ou un tunnel, mais le corps réagit encore et ça vient de la nature humaine », affirme le Dr Zacchia.

À cela s’ajoutent des caractéristiques individuelles, propres à la personnalité. Tout le monde n’a pas la même capacité à lâcher prise, à tolérer le doute et l’incertitude. La sensibilité à l’anxiété comme telle varie aussi d’une personne à l’autre. À l’image d’un détecteur de fumée, « parfois le détecteur est trop sensible et se déclenche à la moindre toast brûlée », illustre le psychologue.

Enfin, les expériences vécues vont renforcer ou non nos peurs. À titre d’exemple, si l’on dérape en voiture l’hiver sur la chaussée glacée, on sera plus vigilant et craintif par la suite. 

Les relations que l’on entretient avec nos proches et nos collègues de travail peuvent aussi provoquer de l’anxiété, tout comme nos problèmes de santé ou notre consommation de substances telles que l’alcool ou la caféine, surtout si elle est abusive.

Qu’est-ce que le trouble d’anxiété généralisée ?

Lorsque l’anxiété devient envahissante, souffrante et nuit au fonctionnement, on parlera d’un trouble anxieux. Il en existe différents types ; le trouble anxieux généralisé (TAG) en est un — tout comme les crises de panique et le trouble panique, la phobie sociale ainsi que les troubles phobiques spécifiques (comme la peur du sang). 

Les personnes avec un TAG vivent une anxiété et des inquiétudes excessives pour de nombreux événements ou activités. Elles s’inquiètent de leur santé, de leurs finances, de l’avenir, pour leurs proches, etc. Elles ont de la difficulté à contrôler leurs crises d’anxiété, qui sont fréquentes. Elles ressentent aussi plusieurs symptômes physiques et psychologiques. Ces difficultés doivent durer depuis au moins six mois pour qu’un tel diagnostic soit posé, selon le Manuel Merck, destiné aux professionnels de la santé. 

Le Dr Zacchia explique que le TAG peut être vu comme une « allergie à l’incertitude ». Les personnes anxieuses ont bien du mal à lâcher prise et à tolérer l’incertitude inhérente à la condition humaine, dit-il. Un exemple : « Même si le risque de mourir dans un accident d’avion ou un tremblement de terre est de presque zéro, ce n’est pas zéro ! Donc, il faut tolérer le “on ne sait jamais”. » Les anxieux doivent apprendre à le faire.

Peut-on guérir un trouble anxieux ?

Il est possible de traiter un trouble anxieux. L’objectif sera d’amener l’anxiété à un niveau plus fonctionnel et gérable.

Plusieurs voies efficaces peuvent être empruntées, selon l’Association des médecins psychiatres du Québec (AMPQ) : l’éducation psychologique en groupe, la psychothérapie, la médication ou une combinaison de ces éléments. 

Tout ce qu’une personne peut faire pour maintenir son bien-être (ce qu’on appelle les autosoins) aide aussi au rétablissement, toujours selon l’AMPQ. Il s’agit autant d’adopter une bonne hygiène de vie (sport, alimentation, sommeil) que d’utiliser des techniques de relaxation et de respiration.

Du côté de la psychothérapie, la thérapie cognitivo-comportementale est la plus recommandée, selon le Manuel Merck. Elle agit sur les mécanismes de l’anxiété, c’est-à-dire « les pensées, les comportements et les émotions », fait savoir le Dr Zacchia. « On fera face graduellement à nos peurs pour nous désensibiliser et on apprendra à tolérer le doute. » Il ajoute que certains vont compléter avec la méditation pleine conscience pour arriver à lâcher prise. 

« Si la personne n’avance pas suffisamment en psychothérapie, on va considérer l’ajout de médicaments », poursuit le Dr Zacchia. Pour les cas graves, il recommande la médication sans attendre, dès le début de la thérapie. 

On prescrira généralement des antidépresseurs pour réduire les symptômes et favoriser le sommeil. Le psychologue explique que ces médicaments aident à lâcher prise, ainsi qu’à diminuer la peur, les réactions et l’évitement, pour regagner de la confiance. Comme ils doivent être pris plusieurs semaines avant d’être efficaces, il est possible qu’un tranquillisant soit prescrit temporairement. 

Ressources disponibles :

Relief – Le chemin de la santé mentale

Phobies-Zéro (ligne d’écoute : 1 866 922-0002)

Site du Dr Camillo Zacchia

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