L’auteur est urgentologue, ex-chef du département de médecine d’urgence de l’Institut de cardiologie de Montréal. Professeur titulaire à l’Université de Montréal, il enseigne, participe à des recherches en médecine d’urgence et intervient fréquemment sur les enjeux de santé.
Vous connaissez sûrement quelqu’un qui a déjà perdu conscience. Peut-être que c’est vous ! Parce que perdre conscience, même si ça ne fait pas partie des plans pour la fin de semaine, ça arrive à beaucoup de gens au cours de leur vie. Dans bien des cas, c’est sans gravité, heureusement. Parfois, c’est le signe d’un problème plus sérieux.
Mais peut-être une question traverse-t-elle à l’instant votre conscience : pourquoi la perd-on, justement ? Question pertinente, d’autant plus que si la nature même de la conscience n’est pas très bien comprise, les causes de sa perte, elles, sont étudiées depuis longtemps par la médecine. Bref, on connaît mieux ces mécanismes que ce qui permet de demeurer conscient — et de lire ce texte !
Les mystères de la conscience
Cette conscience encore mal comprise, on en découvre de plus en plus les fondements neurologiques. Je suggère à ce sujet le fort intéressant livre Le code de la conscience, du neuropsychologue français Stanislas Dehaene, un excellent vulgarisateur. Ses études visent notamment à comprendre ce qui survient dans le cerveau quand on prend conscience de quelque chose — c’est un début.
Ce chercheur a montré qu’au moment de prendre conscience — d’un mot, une image, une idée —, le cerveau est traversé par ce qu’il décrit comme un embrasement, un feu d’artifice d’activités qui s’illumine au moment où plusieurs régions cérébrales opèrent simultanément, paraissant alors multiplier les échanges d’informations.
Plusieurs zones de la partie externe du cerveau, le cortex, responsable des processus avancés comme ceux du langage, du jugement, de la vision ou de la planification des tâches, s’engagent alors dans un travail soutenu et requérant sans doute beaucoup d’énergie.
Aussi spectaculaire que soit cet embrasement, le substrat responsable est plutôt fragile. C’est quelque chose que les médecins d’urgence savent bien, parce qu’en cas de problème de santé sérieux, ce substrat perd de son efficacité, et les activités comme la conscience ne peuvent se poursuivre aisément.
Quand le cerveau souffre
Disons qu’un patient subit un infarctus majeur, suffisamment grave pour affaiblir son cœur, qui pompe alors difficilement, ce qui fait baisser en conséquence la tension artérielle et compromet la livraison de sang au cerveau. C’est ce qu’on appelle un choc cardiogénique.
Que se passe-t-il alors dans le cerveau ? Trois fois sur quatre, surtout chez les personnes plus âgées, l’état de conscience du patient s’altère : la conscience est en partie compromise.
Inutile alors de travailler la table de multiplication ou de planifier l’achat d’une voiture : les fonctions supérieures du cerveau étant profondément perturbées, l’état d’éveil reste incomplet — la personne est somnolente —, le jugement est altéré, le langage fonctionne partiellement. La conscience devient fluctuante.
À l’extrême, si la tension artérielle chute encore plus, l’apport d’oxygène et de nutriments au cerveau est gravement compromis, et la personne devient difficilement éveillable ; elle glisse ainsi vers le coma, état où la conscience peut être complètement perdue. Bien entendu, les traitements de soins intensifs tenteront d’aider le patient à se sortir de cette très mauvaise passe.
Les structures en cause
Du point de vue de la conscience, que s’est-il passé ? C’est dramatique, mais simple : les deux cortex, le droit et le gauche, ont été affectés en même temps par un problème déterminant, une baisse de l’apport d’oxygène en raison de la difficulté du cœur à faire circuler convenablement le sang dans le cerveau. Ce qui en perturbe le fonctionnement au point de l’empêcher de maintenir les fonctions les plus complexes comme celle de la conscience.
Retenez que les deux cortex doivent être touchés. S’il s’agit plutôt d’un AVC compromettant l’activité d’un seul côté (gauche ou droit, peu importe, car il est rare qu’un AVC affecte les deux en même temps), la conscience persiste, un seul cortex pouvant en assurer la « production ». C’est pourquoi un AVC sans autre complication compromet rarement la conscience — même si le langage, le jugement, la mobilité ou la vision peuvent être gravement affectés, selon sa localisation.
Mis à part les deux cortex, une troisième structure du cerveau est essentielle au maintien de la conscience : la réticulée, une région centrale et très profonde, située dans le tronc cérébral, dont l’intégrité est requise pour un état de conscience normal. Un AVC ou tout autre processus qui affecterait précisément cette région ferait aussi perdre conscience, même si les deux cortex demeuraient intègres.
Des causes très variées
Les mécanismes entraînant une atteinte simultanée des deux cortex et/ou de la réticulée sont très variés. Par exemple, une baisse de pression rapide lors d’un choc vagal — effet bien connu des prises de sang chez certaines personnes stressées par cette procédure —, d’une déshydratation ou d’une hémorragie peut couramment provoquer une perte de conscience temporaire, en raison de l’atteinte momentanée de la livraison de sang et d’oxygène au cerveau.
Si le cœur fait une petite pause, comme ça lui arrive de temps en temps, la baisse de pression subite qui en résulte pourra aussi causer une perte de conscience, cette fois brutale, ce qui est assez caractéristique ; un traumatisme à la tête peut également faire perdre conscience, en altérant temporairement le fonctionnement des deux cortex ; une crise d’épilepsie généralisée, perturbant l’ensemble de l’activité électrique du cerveau, aura le même effet.
Du côté métabolique, une hypoglycémie sévère, une baisse d’oxygène à la suite d’une noyade, une intoxication au monoxyde de carbone ou la consommation de sédatifs comme l’alcool ou de dérivés de la morphine peuvent également compromettre la conscience, de manière plus graduelle mais plus soutenue, parfois tout aussi profonde.
On le voit, les raisons de perdre conscience sont multiples, et bien évidemment, un tel symptôme requiert toujours une évaluation médicale, surtout si c’est la première fois. Il s’agira de remonter à la source du problème et d’apporter — on l’espère ! — des solutions, qui sont aussi variées que les les causes de cet accident assez courant que je ne vous souhaite pas de vivre.
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Peut-être que le corollaire à cet article est de parler des premiers soins à apporter. Dans les films on voit souvent les personnages maintenir assis la personne qui vient de s’évanouir, alors pour les chocs vagaux l’important est de laisser la personne couchée ce qui permettra le retour de la perfusion cérébrale. Le choc vagale étant la cause la plus fréquente d’évanouissement .
Bon idée pour un futur texte!
Je corrige quelques fautes
Que se passe-t-il quand on perd conscience ?
Dans les romans, les personnages s’évanouissent parce qu’ils ont reçu une mauvaise nouvelle. Dans la vraie vie, c’est plus compliqué, explique le Dr Alain Vadeboncœur.
J’ai perdu conscience une fois, j’avais ±17 ans, au Mexique, débuts des années 70. Ce fut le plus beau jour de ma vie. Il me tarde de revivre le moment de plénitude ressenti, comme si tout ce qui me pesait s’évanouissait, disparaissait, comme si je naissais à nouveau. Probablement le résultat d’une intoxication alimentaire. il faisait une chaleur torride, c’était en plein été. Je me souviens être devant la porte de la chambre d’hôtel accompagné par mes parents, puis je me souviens au réveil de ce si grand bien être, comme un saut dans un vide rassurant, rassérénant. porteur. Au réveil j’étais par terre dans la chambre d’hôtel. Mon père médecin n’était pas trop inquiet en me voyant reprendre mes esprits… Le si grand bien être m’a quitté peu à peu… malgré tout ce que j’ai pu faire pour tenter de le conserver par-devers moi, et je n’ai jamais pu y avoir accès de nouveau… peut-être à l’heure de ma mort… si je suis toujours conscient dans les instants qui la précéderont.
J’y pense, en parlant de mort… J’y ai rêvé un jour, en me demandant ce qu’il advenait après elle, et en rêve j’ai pu accéder à ce bien être précité… Je suis mort et je me vois, ma conscience me dit qu’il en est donc comme dans certains récits, c’est donc ça, l’esprit, l’âme, la conscience peut s’extraire du corps, mais que survient-il après… ? L’éloignement se poursuit dans la pièce puis on en sort verticalement. La maison n’est bientôt plus qu’un petit carré dans l’immensité de la surface de la Terre, je croise la lune, puis je comprends que je sors du système solaire à la vitesse de la lumière comme si ma conscience était une onde, je vois l’onde à l’horizon formant un cercle immense contenant notre système solaire tout entier, c’est vertigineux. L’être, la conscience, son énergie prend de l’expansion dans toutes les directions en même temps. … l’énergie dégagée est si intense, si pure, qu’une sensation de bien être total me remplit d’un grand bonheur jamais égalé sauf dans l’épisode précité.
Je me demande si je peux revenir et instantanément je suis à mon chevet, instantanément je suis ou pourtour de l’onde circulaire qui grandit toujours englobant maintenant une partie de notre galaxie… Je comprends que ce sera là mon vécu de bien être pendant les 13 prochains milliards d’années pour englober tout l’Univers connu, et plus encore pour englober sa partie inconnue qui aura crû pendant ces 13MM d’années. Ne sera-ce pas lassant, pas si je peux revenir sur terre. Ce que je peux faire à tout instant. Mais je quitte toujours pour me situer au pourtour de l’onde qui grandit encore dans l’univers, parce que la sensation d’infini est grisante, foudroyante, comme c’est pas permis.
Je me suis réveillé… J’ai dû faire un voyage cosmique diront certains adeptes de sciences occultes… comme M. Jourdain a fait de la prose, sans n’y rien connaître…