Résultats positifs

Santé mentale, espérance de vie, ITSS, drogues: des chiffres, et une entrevue avec le Dr Alain Poirier.

Illustration: Sébastien Thibault

Plus du tiers des jeunes de 15 à 24 ans présentent un niveau élevé de détresse psychologique, selon l’Institut de la statistique du Québec. Et pourtant, le Dr Alain Lesage, psychiatre et chercheur au Centre de recherche de l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal, est plutôt optimiste quant à la santé mentale des jeunes qui entrent dans l’âge adulte.

La prévalence des troubles anxio-dépressifs, qui touchent un ado sur 10, n’a probablement pas augmenté dans la population. « On en parle plus, on les diagnostique plus, et on les traite plus aussi », explique le psychiatre.

La santé mentale a enfin acquis assez d’importance pour qu’on s’en occupe, comme on l’a fait avec l’hypertension et les maladies cardiovasculaires il y a 30 ans. « À ce moment, 40 % des gens qui faisaient de l’hypertension ne le savaient pas. Aujourd’hui, on peut prendre sa tension à la pharmacie et la plupart des gens hypertendus sont traités. »

Même si nous avons l’impression de vivre dans un monde de plus en plus anxiogène, la jeune génération pourrait s’en sortir mieux que les précédentes. Bon nombre de ces jeunes ont en effet fréquenté les centres de la petite enfance, créés en 1997, un modèle qui a fait ses preuves pour offrir un effet protecteur aux enfants dont la mère présente un trouble de l’humeur, eux-mêmes plus à risque de souffrir d’anxiété ou de dépression au cours de leur vie.

Et même si l’Organisation mondiale de la santé affirme que la dépression est désormais la première cause d’incapacité au travail, on peut se réjouir du fait que la santé mentale figure enfin parmi les préoccupations des gestionnaires en entreprise.

88 ans pour les hommes / 90 ans pour les femmes

C’est l’espérance de vie prévue en 2060 par les démographes de l’Institut de la statistique du Québec. Elle est actuellement de 80 ans pour un garçon né en 2015 et de 84 ans pour une fille.

Le Québec pourrait alors compter 33 600 centenaires ; ils étaient 1 200 en 2011.

4 questions au Dr Alain Poirier

Vice-président à la valorisation scientifique et aux communications, Institut national de santé publique du Québec

1. On entend parfois que l’espérance de vie de la jeune génération risque d’être moins élevée que celle de la précédente en raison de la progression de l’obésité. C’est vrai ?

Des études sérieuses aux États-Unis sont arrivées à cette conclusion en faisant des projections il y a une dizaine d’années. Mais il y a moins d’obèses au Québec qu’aux États-Unis. Et il y a eu tellement d’amélioration pour d’autres types de mortalité, comme les suicides ou les accidents de la route, que l’espérance de vie des jeunes qui ont 18 ans aujourd’hui continuera d’augmenter. Il y a environ 300 morts par année sur les routes, alors que c’était autour de 2 000 au début des années 1970. Les jeunes fument beaucoup moins que les générations précédentes ; ça aussi, ça améliore l’espérance de vie.

2. De quoi les jeunes adultes d’aujourd’hui risquent-ils de mourir ?

On est dans la futurologie… Mais je serais étonné que le cancer ne soit pas encore la première cause de mortalité dans 50 ou 60 ans. Le tabagisme existe toujours, il y a des contaminants environnementaux, et la consommation de fruits et de légumes n’est pas encore optimale.

Les maladies cardiovasculaires sont la deuxième cause de décès et, à mon avis, elles le resteront. Elles ont énormément diminué au cours des dernières décennies, mais le taux d’obésité, lui, a progressé… ce qui augmente le risque de diabète et de maladies cardiovasculaires.

3. Quels problèmes de santé publique mériteront une surveillance particulière au cours des prochaines décennies ?

De plus en plus d’études montrent que des situations négatives vécues durant l’enfance, comme de la violence ou de la pauvreté, causent non seulement des problèmes psychosociaux, mais aussi des problèmes de santé physique à l’âge adulte, comme des cancers, de l’arthrite, etc.

En prévention, on peut bien s’attaquer à des choses précises, comme le tabagisme, mais le plus important, c’est de partir du bon pied dans la vie. Ça passe par de bons services aux jeunes enfants et aux familles, mais aussi par une redistribution efficace de la richesse.

4. Les jeunes qui auront 18 ans en 2018 atteindront la majorité dans une société où le cannabis sera légal. Cela vous préoccupe-t-il ?

Le cannabis est déjà consommé, même s’il est illégal. On devra avant tout ne pas en faire la promotion. Il faut absolument qu’on le sorte d’une logique commerciale qui pousse à faire du profit ou à amener des revenus à l’État, comme on l’a fait avec le tabac ou l’alcool.

Sous surveillance

Les maladies infectieuses transmissibles par des insectes, comme la maladie de Lyme et l’infection au virus du Nil occidental. En augmentation en raison des changements climatiques.

L’obésité. Elle touche un adulte sur six au Québec et l’OMS prévoit qu’elle continuera de croître sur la planète au cours des 15 prochaines années.

La consommation excessive d’alcool. Elle a augmenté de 22 % chez les 22 à 27 ans de 2000 à 2012 (plus récentes données disponibles).

La chlamydia, la gonorrhée et les autres infections transmissibles sexuellement et par le sang. En résurgence depuis le début des années 2000, elles constituent à elles seules près des trois quarts des cas de maladies à déclaration obligatoire enregistrées sur le territoire québécois. Et ça n’a pas l’air de s’améliorer.

Source : Programme national de santé publique 2015-2025

42 %

Proportion de Québécois de 18 à 24 ans qui ont consommé du cannabis au moins une fois dans la dernière année. (Source : Institut national de santé publique du Québec)

>>> J’AURAI 18 ANS EN 2018

Lily  ChartrandLaval / Sciences de la santé / Collège Jean-de-Brébeuf / Métier rêvé : médecin

« On a un système de santé universel au Québec, et il doit être protégé. Tout le monde devrait avoir accès à des soins de santé, peu importe son revenu, sa classe sociale. Mais en même temps, il est tellement mal en point. Avec toute l’attente qu’il y a, je ne peux pas reprocher à quelqu’un d’aller au privé. Personnellement, je l’ai fait. C’est sûr qu’il y a des changements à apporter. Réalistement, avoir un système à deux vitesses désengorge le système public. »

« Je reconnais qu’au Québec on a des valeurs et une langue différentes. Peut-être qu’une façon de protéger ça, ce serait la séparation. Ce n’est pas clair pour moi. »