Bien des gens ignorent à peu près tout de leur plancher pelvien, aussi appelé périnée. On a pourtant vraiment intérêt à le garder tonique et en santé ! Ce groupe de muscles situés dans le bassin, entre le pubis et le coccyx, forme une sorte de hamac qui passe sous la vessie et l’utérus. L’urètre, le vagin et l’anus le traversent.
Prendre soin de cette partie de son anatomie peut éviter bien des désagréments plus tard dans sa vie, dont des fuites urinaires. Cependant, il n’est jamais trop tard pour renforcer son périnée. « Je vois des patientes de 80 ans et nous avons de très bons résultats », souligne Geneviève La Flèche, physiothérapeute en rééducation périnéale.
Même si la santé du périnée concerne plus particulièrement les femmes, en raison des conséquences de la grossesse et de l’accouchement, les hommes en ont également un, note la physiothérapeute Marie-Christine Trahan sur le site de l’Ordre professionnel de la physiothérapie du Québec.
Comment savoir si on a un bon plancher pelvien ?
Le plancher pelvien doit être suffisamment fort et flexible pour maintenir les sphincters de l’urètre et de l’anus bien fermés. Cela vous permet donc de rire, d’éternuer ou de faire un effort physique sans craindre une fuite d’urine, de selles ou de gaz.
De plus, un plancher pelvien sain a la force nécessaire pour garder en place les organes pelviens comme l’utérus, le vagin, le rectum et la vessie. Il joue aussi un rôle dans le maintien d’une bonne posture et dans la sexualité ; un périnée que l’on est en mesure de bien détendre et de bien contracter facilite l’atteinte de l’orgasme.
Que se passe-t-il lorsque le plancher pelvien s’affaiblit ?
« Au départ, certaines femmes peuvent remarquer que de petites gouttes d’urine s’échappent lorsqu’elles font un effort comme tousser ou sauter », observe la Dre Josianne Paré, professeure au Département d’obstétrique-gynécologie de la Faculté de médecine de l’Université de Sherbrooke.
Si le plancher pelvien n’a plus la force et la coordination nécessaires pour résister à l’augmentation de la pression dans l’abdomen au moment de l’effort, les sphincters ne seront plus en mesure de se fermer suffisamment, explique Geneviève La Flèche.
Chez certaines femmes, le mauvais fonctionnement du plancher pelvien provoque une difficulté à évacuer les selles, ce qui peut occasionner de la constipation. D’autres peuvent aussi ressentir des douleurs au moment des relations sexuelles, par exemple lors de la pénétration. Enfin, l’affaiblissement du plancher pelvien peut mener à la descente d’organes.
Qu’est-ce qui peut affaiblir le plancher pelvien ?
« Des études ont montré notamment l’effet du vieillissement et de la ménopause », souligne Geneviève La Flèche. La diminution des niveaux d’œstrogènes rend en effet les muscles plus minces et moins flexibles. La grossesse et l’accouchement malmènent aussi le plancher pelvien, tout comme l’obésité ou une intervention chirurgicale dans la région périnéale (telle qu’une opération à l’utérus ou à la prostate).
Pour ce qui est de la pratique du sport, l’effet sur la santé du périnée n’est pas tout à fait bien compris, conclut un article publié en 2019 dans la revue Sports Medicine. Selon les auteurs, les activités modérées comme la marche diminuent les risques d’incontinence urinaire, mais chez les athlètes féminines, ce risque est plutôt multiplié par trois.
Selon Geneviève La Flèche, ce ne serait pas le sport en tant que tel qui est problématique, mais plutôt la façon dont il est pratiqué et son intensité. « Une femme qui se lance soudainement dans une activité physique plus exigeante, par exemple le CrossFit, et qui ne le fait pas de la bonne façon peut imposer un stress mécanique trop fort à son plancher pelvien », explique-t-elle. Il est important de bien engager les abdominaux lorsqu’on force, de ne pas les pousser vers le bas et de ne pas bloquer la respiration.
Dans quels cas est-il préférable de consulter un professionnel de la santé ?
Si vous avez des inquiétudes concernant votre plancher pelvien, c’est le bon moment pour consulter. Vous pouvez en parler à un médecin, qui pourra évaluer la situation et vous orienter vers un gynécologue ou un physiothérapeute spécialisé en rééducation périnéale. Certains de ces physiothérapeutes travaillent dans le réseau public, mais l’offre est limitée. Vous pouvez également prendre rendez-vous avec un tel professionnel en clinique privée. Le bottin de l’Ordre permet de trouver ceux qui pratiquent la rééducation périnéale dans votre région.
Il est aussi indiqué de consulter de façon préventive, par exemple pendant la grossesse. Certaines femmes le font pour savoir comment bien pousser au moment de l’accouchement ou comment renforcer leur plancher pelvien. D’autres voient un spécialiste après l’accouchement pour savoir comment reprendre le sport sans danger.
Comment soigne-t-on les troubles ?
Le traitement n’est pas exactement le même pour toutes les femmes, précise Geneviève La Flèche.
Lors du premier rendez-vous, la physiothérapeute posera d’ailleurs des questions sur le fonctionnement de votre plancher pelvien (par exemple, sur la fréquence et le degré de l’incontinence s’il y en a, sur la présence de symptômes tels qu’une lourdeur dans le bas-ventre, sur la difficulté ou non à atteindre l’orgasme, etc.). Elle procédera aussi à un examen physique, avec votre consentement. « Nous allons évaluer l’alignement du bassin et de la colonne vertébrale de même que les abdominaux, explique-t-elle. Nous examinerons aussi l’intérieur du vagin. » Si une femme n’est pas à l’aise avec un examen interne, il existe d’autres options.
La professionnelle pourra ensuite utiliser des techniques manuelles pour assouplir certains muscles qui seraient tendus et suggérer différents exercices, comme ceux de Kegel. « Par exemple, on peut proposer de faire semblant de retenir un jet d’urine ou un gaz, illustre Geneviève La Flèche. On peut également demander de contracter le plancher pelvien complètement puis de le relâcher complètement de façon successive et rapide. »
Pour que ces exercices soient efficaces, assurez-vous de contracter les bons muscles. Mal exécutés, les exercices de Kegel peuvent même nuire à la santé du plancher pelvien. « Quand les gens m’en parlent, je leur demande comment ils les font », raconte Geneviève La Flèche. Un truc : posez la main à plat sur la région du périnée ; lors de la contraction, le muscle doit se décoller de la main et aller vers l’intérieur, et non pousser la main vers l’extérieur. Les femmes ont un deuxième truc à leur disposition. Après avoir inséré un doigt dans votre vagin, vous devez sentir qu’il est aspiré vers l’intérieur au moment de la contraction. S’il est expulsé vers l’extérieur, c’est que vous poussez plutôt que de contracter.
Si les exercices ne sont pas suffisants, la physiothérapeute peut avoir recours à l’électro-neurostimulation. Une sonde est alors insérée dans le vagin et envoie un petit courant électrique pour stimuler les muscles.
« La même sonde peut aussi être utilisée pour une approche appelée le biofeedback », ajoute Geneviève La Flèche. L’appareil capte alors les contractions pour les reproduire sur un écran d’ordinateur. Cela pourrait vous aider à mieux savoir si votre plancher pelvien est bien contracté.
Selon l’INESSS, une dizaine de séances de rééducation périnéale traitent efficacement l’incontinence urinaire (ou la préviennent chez les femmes enceintes). Des exercices doivent aussi être faits à la maison, généralement cinq jours par semaine pendant 12 semaines.
Comment prévenir les problèmes
Certains gestes du quotidien peuvent protéger le plancher pelvien. Par exemple, lorsqu’on soulève un objet lourd, il faut éviter de bloquer la respiration, ce qui fait augmenter la pression dans l’abdomen.
« Lorsqu’on va aux toilettes, il est préférable de relâcher les sphincters pour leur permettre de s’ouvrir, plutôt que de pousser », ajoute Geneviève La Flèche. Prendre une bonne position pour déféquer en plaçant les pieds sur un petit banc et en s’inclinant vers l’avant, le dos droit, peut aussi être bénéfique.
Pour ce qui est du sport, la physiothérapeute souligne qu’il est important de progresser graduellement, afin de laisser le temps à la musculature de s’adapter.
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Merci pour ce bon article