L’été s’achève dans le concert d’odeurs qui lui confèrent son charme. Le gazon fraîchement coupé. Les fleurs qui embaument les rues. Les effluves viandeux des barbecues. Le goudron de la chaussée tout juste asphaltée. Et, très souvent aussi, l’entêtant parfum du pot.
Suffit de sortir de chez moi pour le respirer. Dans les rues de mon quartier. Sur n’importe quelle avenue commerçante. Il y a presque toujours quelqu’un qui fume un joint. Parfois même à quelques mètres d’un policier, qui a l’air de s’en moquer comme de sa première paire de menottes.
Pas besoin d’aller au Festival d’été de Québec ou à Osheaga pour s’en rendre compte : la consommation de marijuana est entrée dans les mœurs et elle n’émeut plus personne. Sauf peut-être les divorcés du réel, dont quelques bonshommes Sept-Heures de la légalisation se sont faits les porte-paroles.
D’où qu’ils viennent, ces apôtres du déni ont ceci en commun qu’ils disent redouter qu’on banalise l’usage de cette drogue douce.
Sont drôles. Comme si on pouvait rendre banal ce qui l’est déjà.
J’hésite toujours à utiliser une anecdote pour généraliser, mais je trouve qu’il serait temps de faire preuve d’un peu de franchise dans toute cette histoire : j’ai fumé du pot. En masse. En y réfléchissant, je pense que je ne connais presque personne qui n’en a jamais consommé.
Dans le lot de ces amis et connaissances, certains fument encore régulièrement. Ils sont mécaniciens, vendeurs, avocats, médecins, ingénieurs, journalistes, menuisiers, entrepreneurs. Plutôt que de se torcher au gros rouge ou d’écluser les bières en série, le vendredi soir, ils s’en roulent un, tranquilles. Ce sont, de loin, les fêtards les plus paisibles que je connaisse.
Selon l’Institut de la statistique du Québec, les consommateurs de cannabis (réguliers et occasionnels) représentent 15 % de la population québécoise.
Banalisons encore un peu, tiens : en 2015, près de la moitié des Canadiens admettaient avoir déjà fumé du pot. Chez les 20 à 24 ans, 29 % l’avaient fait au moins une fois dans la dernière année.
On peut déjà, sans difficulté, se procurer de la marijuana médicinale. Des points de vente ouvrent et ferment au gré des flous juridiques depuis quelques mois. Commander du pot par la poste est d’une surprenante facilité. Les vétérans des Forces armées canadiennes, à eux seuls, comptent parmi les grands consommateurs de cannabis à des fins thérapeutiques. Les trois quarts de ceux qui profitent du programme de remboursement fédéral en consomment au moins trois grammes par jour. Ce qui est énorme.
Bref, non seulement la guerre à la drogue est perdue depuis longtemps, mais au point où on en est, celle au pot est une véritable farce à laquelle il est temps de mettre fin.
On peut bien trouver que les choses vont vite, voire taxer le fédéral de précipitation, mais les atermoiements des opposants me rappellent ce mème qui revient souvent sur mon fil Facebook : « Cher optimiste, cher pessimiste, pendant que vous argumentiez pour savoir si le verre d’eau était à moitié plein ou à moitié vide, je l’ai bu. Signé : l’opportuniste. »
Et ce dernier, c’est le crime organisé. Cela fait des décennies qu’il s’enfile les verres.
Je veux bien qu’on en discute. On peut argumenter sur les dangers de la consommation abusive, sur le poids économique et logistique que cette légalisation fera porter aux provinces ou aux villes, mais pour le reste, banalisons, une dernière fois : la consommation de marijuana est sans doute le geste illégal le plus commun. Et lorsqu’on aura écarté le crime organisé du cannabis, celui-ci ne fera plus de tort qu’à ceux qui en prennent.
Alors, puisqu’on ne remettra pas le dentifrice dans le tube, parlons de santé. Parlons de prévention et de conduite avec les facultés affaiblies. Faisons avec le pot comme avec l’alcool. Mais de grâce, mettons fin à l’hypocrisie dans laquelle se drapent les opposants à la légalisation. Ceux-là ont décidé d’être du mauvais côté de l’histoire. Sur la rive où se rangent ceux qui préfèrent fermer les yeux plutôt que d’affronter la réalité en face.
Tant pis pour eux. Le reste de la société peut avancer tandis qu’ils continuent de se torcher au gros rouge en se faisant croire que c’est meilleur pour la santé et, surtout, que leur morale est sauve.
Cette chronique a été publiée dans le numéro d’octobre 2017 de L’actualité.
Je ne connais pas David Desjardins personnellement, mais je pense qu’il est fondamentalement un bon gars.
Ses chroniques à l’Actualité ne m’ont jamais énormément interpellé, que ce soit par leur originalité ou leur caractère provocateur: le bon gars ordinaire exprime ce avec quoi nous sommes tous, extrême centre oblige, d’accord.
Et puis là, tout d’un coup, en prime, si j’ose dire, il s’en prend aux alcooliques, du moins à ceux qui « se torchent au gros rouge », expression qu’il emploie deux fois dans la même chronique, comme un leitmotiv.
Je trouve l’expression intéressante, et j’aurais envie de la réutiliser, encore qu’étant moi-même amateur de vin, je ne vois pas par quelle acrobatie je pourrais faire cela.
David Desjardins est-il alcoolique lui-même, ou des gens de son entourage?
Sait-il de quoi il parle?
A-t-il déjà bu du gros rouge, qui tache, bien évidemment?
Le propos est très juste.
La consommation de marijuana est effectivement beaucoup plus courante et répandue qu’on voudrait bien le croire.
Il n’y a effectivement pas d’autres options raisonnable que de légaliser cette substance qui, soit dit en passant, n’aurais jamais dû être illégale.
@ M Belley,
Vous excellez en l’art de la transposition.
Je n’ai jamais prétendu faire la guerre à qui que ce soit et à quoique ce soit. C’est l’auteur de ce blogue David Desjardins qui parle de guerre. Moi pas. Je m’étais permis de remarquer que d’un point de vue linguistique ses assertions ne tenaient simplement pas.
Lorsque vous écrivez : « L’effet du pot est souvent similaire à l’alcool », j’en déduis que vous ne savez pas de quoi vous parlez. En ce qui me concerne, je connais très bien expérimentalement les effets de diverses substances. Si d’ailleurs les effets du pot et de l’alcool étaient si similaires que cela. On se demanderait bien pourquoi vendre de la Marie-Juana si les effets sont les mêmes que les produits achetés depuis belle lurette en vente libre à la SAQ.
Les effets que vous obtiendrez avec un joint seront différents de ceux vous obtiendrez avec un Cabernet-Sauvignon ou un Merlot…. Vous obtiendrez aussi d’autres effets si vous combinez le pot avec de l’alcool et vous obtiendrez encore d’autres effets si vous combinez le tout avec des pilules… ou même avec une boisson énergisante et du tabac.
Aucune autorité ne peut contrôler la manière de consommer.
Tous les êtres humains sont confrontés à toutes sortes d’addictions, même le travail peut être une addiction. Ce qui est problématique, ce ne sont pas les addictions comme telles, c’est notre relation avec la vie. La capacité de notre corps émotionnel de résister à la mort pour ainsi vivre dans la paix, en harmonie avec notre environnement dans la durée et dans le temps. C’est pour cette raison que dans mon texte, j’avais alors parlé de pulsions.
Voici ce que monsieur Desjardins nous fait l’insigne honneur de nous écrire : « Bref, non seulement la guerre à la drogue est perdue depuis longtemps, mais au point où on en est, celle au pot est une véritable farce à laquelle il est temps de mettre fin. »
En guise de commentaires, je me propose de réécrire cette phrase et de remplacer le mot « drogue » par « daech » et le mot « pot » par « jihad ».
Voici donc de que donne cette phrase ainsi transformée : « Bref, non seulement la guerre à daech est perdue depuis longtemps, mais au point où on en est, celle au jihad est une véritable farce à laquelle il est temps de mettre fin. »
Ma question est la suivante : Est-ce que la majorité de l’opinion publique est d’accord avec cette seconde proposition ? — Je subodore que la réponse est « non » !
Et c’est tant mieux ! Pourtant d’un point de vue linguistique, si ce qu’écrit monsieur Desjardins était juste. Cela s’appliquerait pour toutes sortes de mots de substitution. Lorsqu’ici, il ne s’agit pas de banaliser quoique ce soit, mais bien d’influencer les gens à accepter toute sorte de capitulation sans aucunes conditions.
J’ai compris au moins une chose du bouddhisme, c’est qu’il est non seulement nécessaire d’être à « contrecourant »… mais que cela vital. Qu’il n’y a pas de capitulation possible devant toutes formes de pulsions de mort. Et pour moi la drogue quelle qu’elle soit, encourage précisément ce genre de pulsions.
Celles et ceux qui disent « non à la drogue » sont à mes yeux des résistants, ils bénéficient à ce titre de mon respect et reçoivent par ce fait : ma bénédiction.
Entre ne pas donner de dossier criminel à une personne qui consomme du cannabis et banaliser l’usage de substances psychotropes, il y a deux univers distincts dont les nuances semblent échapper complément à David Desjardins. Dommage qu’un être pourtant très intelligent, puisse sur certains sujets manquer autant de discernement.
Si vous ne retenez qu’une seule chose du bouddhisme et que vous le nommez hors-contexte c’est comme dire: J’ai retenu une chose du christiannisme et c’est « oeil pour oeil et dent pour dent ».
Pour Daesch il vaut la peine de continuer la guerre. Pour le pot, ça ne vaux pas la peine. L’effet du pot est souvent similaire à l’alcool, en dehors de certains effets secondaires sur le cerveau des très gros fumeurs.
Quand vous dites non à la drogue et que vous voulez continuer la guerre au pot, avez-vous pensé aussi à faire la guerre à l’alcool, au tabac, aux jeux vidéos addictifs, à la loterie, aux machines à sous? Ces addictions amènent aussi leur lot de problèmes…
@ Konfucius,
Je ne retiens rien du bouddhisme, je m’efforce de comprendre. De toute évidence vous n’avez pas compris ce que signifie le sens d’être à contrecourant. Ce qui était important dans mon texte ce n’était pas « bouddhisme » mais : « contrecourant »….
De plus vous n’avez rien retenu du christianisme, puisque l’expression : « œil pour œil dent pour dent » — que vous citez ici complètement hors contexte -, est empruntée à la loi du talion. Une loi pénale babylonienne appliquée de 1792 à 1750 avant Jésus-Christ laquelle préfigure l’écriture du code d’Hammurabi (lois mésopotamiennes), un code fondé sur la jurisprudence essentiellement (ce qui était exceptionnel en ce temps).
Euh enfin !!!! Permettez « mouai » un p’tit conseil « tout drète » en passant, quand on veut briller de mille feux, tel ce diamant brut que vous « estâssions », c’est mieux toujours de vérifier ses sources. Puis vérifier ses sources : « eh bin », c’est très bouddhiste justement.
Et que dire de la guerre à la guerre, à la souffrance, à la violence, au mal, « name it », sont elles aussi perdues? Jamais!
Ce qui m’intéresse dans le cannabis, ce n’est pas la fumée récréative qui est sensée procurer un effet euphorique, car je ne fume pas et je ne recommencerai pas suite à la légalisation non plus. Par contre, coté santé, on n’a jamais abordé les effets bénéfiques de « l’huile de cannabis ». Si je me fie à tous les témoignages sur internet (Youtube en particulier), l’usage d’huile de cannabis semble donner des résultats très surprenants de guérison de bien des maux courants et ce, même pour des maladies graves telles les cancers. J’ai un ami qui m’en a témoigné récemment avec un cancer de la peau et qui s’est soigné avec cette huile.
Pourquoi alors n’en entend-t-on pas parler plus que ça du côté médical ? Comme les pharmaceutiques ne peuvent s’approprier les effets bénéfiques d’un produit naturel, peut-être font-elles tout en leur pouvoir pour taire cette ennemie naturelle qui ferait fondre leurs revenus faramineux ?
Quelqu’un peut-il confirmer ou infirmer cette hypothèse ?
Merci d’éclairer ma lanterne.
Quand un produit naturel est actif pour soigner des problèmes de santé, une des approches envisagées par les pharmas est de développer des analogues de ce produit, qui seront des produits plus actifs et ayant moins d’effets secondaires. Si les pharmas ne l’ont pas fait, c’est soit que développer ces produits plus actifs est trop difficile, ce qui est rarement le cas, soit que le produit naturel et ses dérivés sont inactifs ou toxiques.
Vos amis qui ont utilisé l’huile de cannabis n’ont pas fait d’essai clinique. Il est fort possible que ce ne soit que l’effet placébo qui a fonctionné chez eux. De l’huile de ricin, de canola ou de St-Joseph aurait probablement été aussi efficace. Il suffit juste d’y croire.
Le canabis a d’autres noms : pot, mari, haschisch.
En petites quantités, pas trop grave, et même euphorisant. Mais en grandes quantités, des troubles graves. Tout comme l’alcool.
Le problème est ailleurs : le manque d’éducation pour se doter d’une philosophie saine de la vie. Prendre comme modèle Ulysse qui refusa pour lui-même et pour ses compagnons de manger des fleurs de lotus. Déjà, les Anciens savaient que ce qui est sain doit seul être ingéré en nous, tant pour le corps que pour l’esprit.
Décadents, incultes, paresseux, hédonistes bas de gamme, fumez, fumez, fumez ! C’est le choix idiot des gens dans force morale ou même intellectuelle.
Je ne vous insulte pas. Je secoue votre intelligence endormie.
Bluesmen comme rockeurs. Peintres comme écrivains. L’absinthe, le haschich, l’opium, le LSD, la cocaïne… En Occident, depuis la seconde moitié du dix-neuvième siècle, chaque époque, chaque art, semble avoir sa drogue. Pourquoi ces affinités ? Les substances psychoactives, « par définition, créent des états modifiés de conscience », explique le neurobiologiste Jean-Pol Tassin, directeur de recherche à l’Inserm. Ces états sont considérés comme propices à la créativité. « Depuis la nuit des temps, les chamanes d’un nombre significatif de traditions ont consommé des plantes et des molécules leur permettant d’ouvrir leurs circuits de conscience, afin d’explorer d’autres modes de perception, de compréhension et d’action », rappelle Laurent Huguelit dans les Huit circuits de conscience. Voir Baudelaire – Huxley- Leary – Gauthier -Edgar Allan Poe – Beatles – Charlebois – Hendrix – La renaissance – &…
@ Christian Loupret,
S’il suffisait de consommer quelques molécules pour ouvrir ses circuits de conscience. Cela se saurait ! Pas sûr que les « poteux » soient tous des modèles créatifs d’êtres super-conscientisés.
À ma connaissance, Mozart, Leonardo da Vinci ou Albert Einstein ne consommaient pas de produits qui altérèrent les facultés du cerveau. Ou plutôt si, Mozart a sombré entre autre dans l’alcoolisme, il a perdu sa créativité et a connu une fin tragique. Jimmy Hendrix a connu une fin tragique également. Je sais de quoi je parle, nous nous sommes croisés sur Neptune !
Bye ! Bye ! Welcome again to the Nirvana….
M. Desjardins, si vous voulez connaitre une personne qui n’a jamais consommer de pot, ça me ferais plaisir de vous rencontrer. Pas plus que la cigarette d’ailleur.
Je vais parti de ceux qui justement trouve qu’il ne faut pas banalisé la consommation de pot. Mais pas parce que c’est une drogue, mais bien parce qu’elle est fumé! Comme vous dites: le « parfum » est partout! Est-il possible de se promener sans avoir à subir l’insupportable odeur de pot? Déjà que la cigarette est un véritable fléau, l’odeur du pot est encore plus envahissante. Au moins le gars qui « se torcher au gros rouge » ou qui » écluser les bières en série » sur la terrasse ne m’oblige pas à respirer son odeur sur 2 pâtés de maison. Alors désoler si je suis un « divorcés du réel, », mais je vais continuer à engueuler tout les « potteux » qui emboucaneront mon le milieu de vie.
Monsieur Alain, je suis totalement d’accord avec vous. Pour les non-fumeurs c’est un vrai désastre: on est exposés à des fumées et à des odeurs du tabac et du pote, et ici je reprends les mots d’auteur « dans les rues de mon quartier », « sur n’importe quelle avenue commerçante » et de même aux arrêts de bus. C’est interdire de fumer du tabac et du pote dans les lieux publics que j’entends de la légalisation en premier lieu. La liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres: je suis convaincue que j’ai le droit de ne pas être fumeur passif.
M Belley;
est-il nécessaire de faire des tests cliniques pour reconnaître qu’une goutte de vinaigre sur une piqure de guêpe atténue de façon rapide et draconienne la sensation de brûlure ? L’effet placébo peut peut-être soigner des malaises ou symptômes légers, mais quand on regarde des maladies graves, je ne crois pas que l’effet « illusion » (placébo), soit d’un quelconque secours. L’utilisation des plantes médicinales (dont fait partie le cannabis) ont très souvent servi aux pharmaceutiques à créer des médicaments dérivés dont elles tirent des profits excessifs. Si elles ne l’ont pas encore fait avec le cannabis, j’y vois deux raisons possible: soit que l’huile de cannabis est vraiment trop efficace pour elles et qu’elles ne veulent pas commercialiser un produit qui guérit réellement, soit elles aiment mieux vendre des tonnes de produits inefficaces prétextant qu’elles font des recherches continues. J’opterais pour la deuxième en raison des millions de milliards de $$$ (des gouvernements et de la population) dépensées à des recherches qui n’ont à peu près rien donné jusqu’ici contre les différents cancers depuis des décennies.
Je te conseille, avant d’écrire une diatribe sur le « pot » de mettre de côté ton verre de … et que tu commences par fumer un joint. Tu saurais mieux de quoi tu parles. Il n’y aura pas de « pulsion de mort » dans ton texte, termes qui le rendent ridicule.