Chaque parent rêve que son enfant s’accomplisse en classe, qu’il y découvre des intérêts, des passions, des ambitions. Or, lorsque l’heure des devoirs se transforme en champ de bataille, que les notes dégringolent, que l’enfant refuse même d’ouvrir un livre, l’école peut rapidement devenir une source d’angoisse.
Ce scénario est plus courant qu’on pourrait le croire puisque, selon une étude de l’Institut national de santé publique du Québec publiée fin 2021, près de la moitié des parents avaient alors déjà remarqué un retard dans le développement de leur enfant depuis le début de la pandémie. Les enseignants du Québec le constatent eux aussi : le vérificateur général mentionne, dans un rapport paru en décembre 2022, qu’un sondage réalisé auprès de 175 d’entre eux dénotait une inquiétude grandissante par rapport aux retards en lecture des élèves du primaire, exacerbés par la fermeture des écoles lors de la première vague de la pandémie de COVID-19.
Une préoccupation qui se confirme à la lecture d’une nouvelle étude de l’Observatoire pour l’éducation et la santé des enfants, à paraître en avril 2023, et dont L’actualité a obtenu copie. Après avoir comparé les résultats de 2019 et de 2021 à l’examen ministériel de lecture des élèves de la 4e année du primaire, les chercheurs concluent que « les enfants faibles en lecture (20 % inférieurs) ont subi des pertes d’apprentissage importantes [durant la pandémie] ». Si la moyenne générale à cet examen n’a diminué que de 8 %, les résultats des écoliers identifiés comme en difficulté ont chuté de 15 % à 20 %.
Bien des parents voudraient intervenir, mais il n’est pas toujours évident de savoir vers qui ou quoi se tourner pour attiser la flamme de la lecture. Voici les conseils de l’orthopédagogue et doctorante en éducation Josianne Parent, qui s’intéresse aux meilleures approches pour aider les enfants du primaire à surmonter des difficultés en écriture et en lecture.
Pourquoi est-ce important d’atteindre et de maintenir un bon niveau de lecture ?
L’apprentissage de la lecture est fondamental dans la réussite éducative, puisque cette aptitude est sollicitée dans toutes les matières. Au quotidien, cette compétence est essentielle pour développer une bonne culture générale. Elle nous donne accès à d’autres réalités, d’autres modes de vie, et nous permet d’acquérir des connaissances dans une multitude de domaines et de mieux comprendre le monde qui nous entoure. Lire représente aussi un défi cognitif. C’est une action qui fait appel au raisonnement, à la capacité de faire des liens et de décoder les sous-entendus.
Quels sont les signes qui devraient inquiéter un parent ?
Les signaux à surveiller varient selon l’âge. Un enfant de première année qui hésite beaucoup, qui a de la difficulté à décoder les mots, devrait attirer l’attention. Comme il est en processus d’apprentissage, c’est normal qu’il commette des erreurs. Toutefois, s’il se trompe sans s’en rendre compte, c’est signe qu’il ne comprend pas ce qu’il est en train de lire.
À partir de la deuxième année, la motivation est un facteur important. Un jeune qui ne montre pas d’intérêt envers les livres ou qui n’arrive pas à trouver un sujet ou un format qui lui donne envie de lire devrait préoccuper son parent, même si cela ne signifie pas nécessairement qu’il a pris du retard dans ses apprentissages. Dès la troisième année, les textes deviennent plus longs et exigent un véritable effort de compréhension. On passe du concret — Martine cueille des pommes — au récit. Normalement, l’élève devrait commencer à se poser des questions sur ce qu’il lit, être capable de réfléchir à sa lecture et d’en parler.
Que faire pour aider son enfant à progresser ?
Le premier réflexe devrait être de le faire entrer le plus possible en contact avec les livres. Je conseille aux parents de visiter des bibliothèques et des librairies avec leur petit lecteur, et de le laisser choisir des ouvrages et des sujets qui l’intéressent. Animaux, mécanique, science, espace, fleurs, sorcières… Il y en a pour tous les goûts.
Ensuite, c’est très important de lire avec son enfant. Les parents ont souvent tendance à le faire spontanément au début du primaire, puis à délaisser cette activité quand les élèves sont plus autonomes. Avec les plus vieux, de 9 à 12 ans, je suggère de lire une page tour à tour. En plus d’offrir du temps de qualité, le parent donne ainsi un bon modèle de lecture, puisqu’il utilise une bonne prosodie, c’est-à-dire que son rythme, sa musicalité et son intonation reflètent sa compréhension du texte. Il permet aussi à l’enfant de se concentrer sur l’histoire et de rester accroché. Je recommande également d’interagir autour de la lecture, en s’amusant à faire des prédictions ou en attirant l’attention du jeune sur certains détails.
Est-ce qu’il existe d’autres outils que les livres pour aider notre enfant en lecture ?
Oui, il y en a beaucoup. Imprimer une recette, suivre un plan pour construire une cabane à oiseaux, réaliser les étapes d’une expérience scientifique… La lecture est partout. Chaque intérêt peut se transformer en occasion de lire.
Le jeu est aussi une bonne approche. Plusieurs jeux de société — je pense notamment à la collection Placote des éditions Passe-Temps, et à leur gamme L’as de la lecture — sont conçus pour aider les enfants à décoder des mots plus difficiles tout en s’amusant et en passant du temps en famille. Les devinettes peuvent également être une façon de travailler les inférences et la compréhension.
Il existe aussi des plateformes Web qui donnent accès à des livres en format numérique, comme Boukili et les services numériques offerts par certaines bibliothèques. La tablette peut être un outil intéressant pour un jeune lecteur qui aime les interactions. Les livres numériques permettent souvent de faire apparaître des images, de changer la police, de choisir des scénarios différents.
Si notre enfant refuse de lire, doit-on l’y obliger ?
Non. Si l’enfant se sent obligé, il risque d’accoler une connotation encore plus négative à la lecture. On peut par contre le lui proposer régulièrement, tenter de trouver de nouveaux formats de livres ou de nouveaux sujets pour l’intriguer. Dans un même ordre d’idées, il vaut mieux ne pas trop questionner son enfant sur sa compréhension de ce qu’il lit. Certains parents veulent bien faire en achetant des cahiers reproductibles avec des textes et des questions pour continuer les apprentissages. Ça peut toutefois entraîner une démotivation de l’enfant. Sauf en cas d’indication contraire de l’école, le rôle du parent devrait se limiter à lire avec l’enfant, visiter les bibliothèques et le mettre en contact avec le livre.
À la maison, les livres doivent être perçus comme un loisir, un moment de plaisir. Je recommande souvent d’aménager un petit coin lecture ludique, de le fréquenter en tant qu’adulte, et de montrer à notre enfant combien on aime lire.
Des livres pour commencer
Virginia Houle, libraire et copropriétaire de la librairie jeunesse Le Repère, à Granby, nous recommande quelques livres susceptibles de plaire aux premiers lecteurs, ainsi qu’aux plus récalcitrants.
Premières lectures
- Ben entreprend le soccer (et toute la collection « Ben entreprend ») de Julia Gagnon et Danielle Tremblay, éditions MD, 24 p.
- Chloé et les animaux (et toute la collection « Histoires de lire ») de Chloé Varin et Orbie, éditions Fonfon, 16 p.
- Le p’tit bout de papier de Gilles Tibo et Steve Beshwaty, La Bagnole, 24 p.
- L’araignée (et toute la collection « Les petits dégoûtants ») d’Elise Gravel, La courte échelle, 32 p.
Pour les plus grands
- Fou du hockey : Mon premier but d’Alain M. Bergeron et Maco, Auzou, 160 p.
- CSI Ruelle, tome 1 : Mystère au jardin communautaire d’Audrée Archambault et Cab, La Bagnole, 352 p.
- Bizarre mais vrai ! Voyage dans le temps (et toute la collection « Bizarre mais vrai ! ») Collectif, Scholastic, 208 p.
Je ne connais pas toutes vos suggestions, mais elles semblent excellentes. Les livres de Élise Gravel ainsi que la collection « Bizarre mais vrai ! » sont des classiques que mes enfants lisent et relisent. J’aimerais aussi suggérer, pour les plus grands, la collection « 100 infos insolites sur… » des éditions Usborne (disponible en français et en anglais). Ça aussi, chez nous, c’est une collection gagnante.
J’ai entendu, un jour, l’auteur Québécois Simon Boulerice dire que nous sommes tous à un seul livre de devenir un grand lecteur ou, du moins, un lecteur plus régulier. J’ai tendance à croire qu’il dit vrai. Il faut juste trouver ce qui nous plaît, peu importe le style. Ça a marché avec mes enfants et je crois bien que c’est à la portée de tous.
Je ne connais ni l’un ni l’autre.D’ailleurs au vu du prénom de l’un j’en ai conclu à une femme écrivain.Au contraire de ce que pensent beaucoup j’aime les diatribes entre écrivains et mieux encore lorsque ces derniers en viennent aux mains.Surtout lorsque la vérité , longtemps contenue, jaillit des entrailles de chacun des protagonistes.Tel un geyser crache sa soupe brûlante des entrailles à la lumière du jour.La vérité sans fard ni fariboles.Nous sommes des sanguins, nous les algériens.Je ne vois pas pourquoi les écrivains ne le seraient – ils pas?Ce sont des êtres humains comme tout le monde après tout. Je ne vois pas en vertu de quel principe des écrivains n’auraient pas le droit de se taper dessus. On se souvient de l’épisode cocasse où deux écrivains François Chalais et Jean Edern- Hallier s’échangèrent au cours d’une violente altercation force coups de poings lors d »une émission de philippe Bouvard à Nice dans les années 80.Les écrivains ont tous les droits même celui de se cracher dessus.
Adrien de saint-Alban
Si les recettes de cuisine et les plans de construction d’une cabane à oiseaux sont de bons outils pour aider nos enfants en lecture, les bandes dessinées et les magazines jeunesse, comme les Explorateurs ou J’aime lire, le sont tout autant. En plus, les jeunes les aiment et en redemandent.
Pourtant, on les mentionne rarement. Est-ce une forme de snobisme envers ce genre « inférieur » de littérature par rapport au livre et à la « vraie » littérature ?