Quand posséder un chien ou un chat en dit long sur qui vous êtes

Pour son dernier texte de la saison, Alain Giguère s’intéresse aux propriétaires de chiens et de chats, en analysant leurs cordes sensibles comme nous le faisons pour des consommateurs de marques et de produits.

Photo : Pixabay

Près d’une personne sur trois au pays (31 %) nous dit avoir un chien et une proportion équivalente (32 %) nous dit avoir un chat (respectivement 26 % et 33 % au Québec).

On observe une surreprésentation de propriétaires de ces animaux chez les moins de 55 ans, particulièrement chez les 18-24 ans, chez les gens habitant dans de petites municipalités ou en milieu rural, ainsi que dans les foyers où vivent des enfants.

De plus, il est intéressant d’observer que c’est chez les gens qui ont un niveau socioéconomique élevé que l’on trouve la plus grande proportion de propriétaires de chiens, alors que c’est l’inverse pour les chats, ceux-ci étant davantage présents dans des foyers de niveau socioéconomique plus faible.

Un levier d’épanouissement personnel

Mais par-delà les caractéristiques sociodémographiques et socioéconomiques, ce sont avant tout, et de loin, les valeurs et postures mentales des propriétaires de ces animaux qui les distinguent, leurs motivations. Ce sont les « cordes sensibles » qui incitent les gens, sur le plan personnel, à partager leur vie avec un (ou plusieurs) de ces animaux qui les caractérisent particulièrement.

Tout d’abord, chiens et chats ont en commun qu’ils nous connectent émotionnellement à la vie, à la nature. Les gens qui ont un de ces animaux expriment un fort besoin de ce type de connexion « biomaniste », de se sentir en symbiose avec la nature et la vie en général.

Les chiens et les chats répondent aussi fondamentalement à des besoins d’épanouissement personnel. La présence de ces animaux apporte un soutien affectif qui procure un certain équilibre psychique et qui prédispose favorablement à des quêtes d’épanouissement et de développement personnel. D’ailleurs, de nombreuses études ont démontré au cours des années que la présence d’animaux avait des effets positifs et importants sur la santé à tous points de vue.

Le chien : un marqueur et un lubrifiant social

En plus de ses caractéristiques communes avec le chat, le chien a son identité bien à lui. Il cohabite avec des gens qui ont un vif besoin de s’affirmer socialement, de se dépasser et d’être fiers de leur statut auprès des autres. Il participe à l’ensemble des signes que l’on déploie pour exprimer son rang dans la société. C’est comme si on « portait » son chien comme on porte un vêtement d’une marque prestigieuse. Il est une expression de ce que l’on nomme la « consommation ostentatoire », les propriétaires de chiens étant fortement influencés par cette corde sensible que l’on retrouve normalement dans nos dossiers sur les marques.

Le chien se présente donc comme un « marqueur social ». Il dit quelque chose sur nous à ceux qui nous entourent ! Dans la même veine, on observe aussi que les propriétaires de chiens apprécient particulièrement l’expression de la violence dans les médias (films, jeux, etc.), comme s’ils étaient fiers de la « puissance » de leur animal. (Sans justifier nullement les cas de violence canine qui demeurent quand même, et fort heureusement, un phénomène tout à fait minoritaire par rapport à l’ensemble des chiens domestiques. Nous sommes dans le symbolique ici, enfin on espère.)

Le chien est aussi un « lubrifiant social ». Il vient vers nous. Il va vers les gens. Il est sociable. Il entre en relation avec ses amis humains. Il facilite notre socialisation. Les propriétaires de chiens expriment un vif besoin de socialiser, d’entrer en relation avec autrui. Le chien semble favoriser ces contacts, ces rencontres. Il médiatise en partie nos rapports avec les autres.

Marqueur et lubrifiant social, le chien contribue à la vie en société, au vivre-ensemble.

Le chat : une relation plus intimiste avec la vie

Le chat, quant à lui, est plus intimiste. Il invite à une symbiose plus étroite et respectueuse avec la vie et la nature en général. Il est plus indépendant, on va vers lui. Il suscite un allant plus important pour aller à sa rencontre, ses propriétaires exprimant particulièrement cet allant pour se connecter de façon plus intime avec la vie et avec les personnes autour d’eux.

Il est fascinant d’observer l’intérêt marqué des amis des chats pour la protection de l’environnement, l’entraide et l’engagement social, ainsi que pour les enjeux éthiques de la société. Le chat exprime cette sensibilité à la vie.

De plus, le chat s’adresse à des gens plus individualistes et idéalistes, centrés sur leur singularité et leurs exigences d’épanouissement personnel, à l’instar de sa nature plus indépendante (une sensibilité à soi qui est loin d’exclure les autres, au contraire).

Il procure aussi d’intenses expériences « polysensorielles », c’est-à-dire répondant à un fort besoin de se sentir stimulé de façon gratifiante par tous les sens (on veut toucher, sentir, se blottir, etc.).

Le chat est sensuel. Il aime se frotter contre les « objets » qu’il affectionne.

Les chats ne sont pas tous gris !

On pourra toujours m’objecter que beaucoup de propriétaires de chiens ont une relation avec leur animal qui s’apparente davantage à celle que je décris pour les chats, et vice versa. Ce qui est certainement vrai. Je décris ici un profil moyen, des caractéristiques prédominantes chez ces amis des animaux, sans les segmenter de façon plus spécifique (j’ai d’ailleurs un chien avec lequel j’entretiens une relation qui ressemble à plusieurs égards à celle que l’on peut avoir avec un chat, même s’il est gros comme un ours !).

Pour une plus grande inclusion de l’animal dans la vie sociale

La conclusion à laquelle me mène cette brève analyse m’apparaît fort évidente : en tant que société, nous devrions faire une plus grande place à l’animal. Autant dans nos collectivités que dans nos vies personnelles (enfin, pour ceux qui n’ont pas d’animal de compagnie), nous devrions favoriser l’inclusion des animaux.

Ils contribuent à l’épanouissement personnel des gens, les connectent de façon plus intime à la vie comme à la nature en général. Ils encouragent le vivre-ensemble.

De nombreuses études ont démontré les bienfaits sur la santé mentale comme physique de la présence d’un animal. Ne recommande-t-on pas de plus en plus la zoothérapie pour soulager de multiples maux ?

À Paris, on peut aller manger au restaurant avec son chien, tout comme un nombre croissant d’entreprises les acceptent sur les lieux de travail.

Il est intéressant d’observer que c’est dans les plus petites municipalités et en milieu rural que l’on trouve les proportions les plus élevées de foyers où vit un chien ou un chat.

L’urbanité tend à exclure l’animal. On doit le réintroduire !

La traviata, de Giuseppe Verdi

Pour mon clin d’œil lyrique de cette semaine, j’ai vainement cherché un extrait dans lequel pourrait figurer un animal.

Par contre, en songeant à ce concept de « marqueur social » que représente le chien, la référence m’est apparue plus évidente. Un exemple sans équivoque de marqueur social est la « courtisane » pour les bourgeois parisiens du XIXe siècle. La présence de ces femmes au bras de ces bourgeois (et ailleurs) rehaussait ostensiblement leur statut. Ces jeunes femmes leur permettaient d’exprimer leur rang social avec faste.

Un dramatique exemple du destin de ces femmes est certainement La traviata, de Verdi, d’après le roman La dame aux camélias, d’Alexandre Dumas fils, avec la mort comme seule issue (traviata signifie « femme perdue » en italien).

Le magnifique extrait retenu ici nous montre cette femme qui, découvrant l’amour pour la première fois, prend conscience qu’elle n’aura probablement pas droit à ce doux bonheur, compte tenu du statut qui lui est dévolu (folie, folie !).

Giuseppe Verdi : La traviata, Anna Netrebko, Rolando Villazón, Thomas Hampson, Wiener Philharmoniker, Carlo Rizzi (dir.), Willy Decker (prod.), Deutsch Grammophon, Festival de Salzbourg, 2005.

Alain Giguère est président de la maison de sondage CROP. Il signe toutes les deux semaines un texte sur le site de L’actualité, où il nous parle de tendances de société… et d’opéra.

Pour lire d’autres chroniques d’Alain Giguère sur des tendances de société et de marché, rendez-vous sur son blogue.  

Les commentaires sont fermés.

Bien d’accord car je trouve que la société québécoise n’est pas très sympathique aux chiens et chats, en tout cas moins que d’autres. Par exemple, j’ai un parent qui vit dans une résidence pour personnes âgées et la présence de chiens et chats est interdite de sorte que je ne puisse pas la visiter avec ma compagne canine malgré le fait que ce parent adore les chiens et voudrait bien revoir ma chienne. Autre point: la grande majorité des sentiers de randonnée et les parcs provinciaux ne permettent pas les chiens alors qu’ailleurs au pays on peut aller à peu près partout sur les sentiers avec son compagnon canin.

On dirait qu’au Québec il y a bien des gens qui ont peur des chiens et c’est peut-être un symptôme découlant du fait que les propriétaires de chiens préféreraient les chiens agressifs, pour leur protection, plutôt qu’un animal de compagnie.

Chiens et maîtres

J’habite un condo de quatre unités depuis 2001. Trois ont été vendus depuis. Deux sont occupés par des propriétaires de chiens malheureux.

Une dame retraitée est propriétaire de deux grands chiens lévriers. Ils ne sortent jamais car elle-même ne sort pas. Ses rideaux et stores sont toujours fermés donc les chiens ne voient pas non plus le soleil. Ils font leur besoins à l’intérieur. De quelle façon, je ne sais pas mais je ne crois pas qu’il y ait problème d’hygiène. On sait qu’il y a des courses de lévriers en Angleterre et en Australie. Ces chiens sont aussi l’emblême de la compagnie d’autobus Greyhoud pour leur rapidité. Elle pourrait se payer un promeneur de chien mais ne le fait pas. Je crois qu’il serait risqué de les faire sortir car ils se sauveraient rapidement.

Elle les fait garder lorsqu’elle part deux fois par année au Guatémala. Par qui? Je ne sais pas. Pendant son séjour là-bas, elle s’occupe des chiens errants. Les nourrit et les amène à un vétérinaire au besoin et ne regarde pas à la dépense. Quel contraste!

Le premier est ici depuis 5 ans, le deuxième depuis décembre 2017. Le premier était résigné et ne jappait pas. Le deuxième est plus jeune et il jappait terriblement et entretenait l’autre à en faire autant. Finalement, ils sont devenus silencieux ou presque. J’entends parfois des sons étouffés, je suppose qu’elle utilise une muselière. Je trouve tout ça inhumain. Les faire souffrir, les emprisonner pour ne plus se sentir seule.

À un autre étage, un beau cocker doux et gentil. Les maîtres ne veulent pas croire qu’il hurle lorsqu’ils le laissent seul. Heureusement qu’un des deux est sans travail et presque toujours à la maison. Avec le temps, ce chien vieillit et maintenant il se limite le plus souvent à gémir et à faire des pauses lorsqu’il angoisse – peur de la solitude. Si le stress rend les humains malades, il en est sûrement de même pour les animaux. Je leur ai suggéré l’aide d’un entraîneur canin. Le conjoint m’a fait une crise de colère.

À une adresse précédente : j’habitais une maison en rangée dans NDG. La voisine avait trois gros chiens. Quelques mois après mon arrivée, elle a fait creuser une piscine à la grandeur de sa cour. Les chiens se sont creusés un trou pour passer de sa cour à la mienne n’ayant plus d’espace pour bouger. L’hiver, la piscine servait de toilette pour chien à la grandeur. Il fallait téléphoner au Service d’hygiène de la Ville pour qu’elle fasse nettoyer.
Lorsqu’un règlement municipal a interdit d’avoir plus de deux chiens, j’en ai profité pour dénoncer qu’elle en avait trois. Un inspecteur est venu et a dû recevoir un cadeau car le troisième est resté avec les autres. Quand j’ai téléphoné à l’inspecteur, il m’a répondu qu’il s’agissait d’un chien en visite, ce qui était faux. Elle a réussi à le garder.

Un ami de 63 ans avec de longues jambes, un athlète qui pratique le jogging et d’autres sports a été mordu par un pitbull. Pendant deux semaines, on a cru qu’il ne pourrait pas s’en sortir. Ça été un dur moment.

J’ai été chez quelqu’un possédant un gros chien, qu’il faisait entrer dans une cage dans le salon lorsqu’il était seul. Il disait que ça rassurait l’animal et qu’ainsi, il ne jappait pas puisqu’il était dans sa petite maison????

Est-ce que j’aime les chiens, oui en liberté à la campagne, pas au bout d’une laisse. Les chiens sont souvent esclaves de maîtres égoïstes qui leur font subir leurs problèmes de santé mentale ou à un autre niveau, les considèrent comme un symbole de classe sociale.

Si la zoothérapie fait du bien au maître, peut-être qu’une humaine-thérapie ferait aussi du bien aux animaux.

N’ayant pas toujours été aimable (et non pas cruel) envers les chiens et chats, avec le temps, le cœur et les mœurs s’attendrissent, et ces animaux deviennent des êtres plus que juste des chiens et chats. A tel point que du chat, j’en mange tous les jours, déjeuner, dîner, souper, et parfois même en dormant. Bien sûr je ne parle pas de la chair de l’animal, mais bien de ses poils qui sont partout.
Et comme chez moi tout ce que je possède sont des biens ¨griffés¨, je fais l’envie du voisinage jusqu’au jour où ils comprennent de quelle ¨griffe¨ je parle.
Les yeux de mon chat sont le miroir de mon âme… fascinants et révélateurs.