Journal des temps inédits : Jour 5

Lorsque soudainement tout nous paraît futile et inutile, comment vaquer à nos occupations quotidiennes ?

Photo : Daphné Caron

Ce matin au réveil, l’angoisse. Noire, sourde, glauque. Le corps refuse de se lever. La tête spinne comme un hamster. Les jobs, mon entreprise, mes connaissances dans la restauration, leurs jobs, mon oncle et ma tante confinés, ma mère et son alzheimer, qui ne sait pas tout ce qui se passe dehors, mais qui ne me reverra pas avant un certain temps, les jobs : je ne veux pas me lever, je mets mon drap sur ma tête. Et ce n’est que le début de cette série de jours étranges.

Je me lèverai toutefois, passerai des appels, m’activerai pour chasser l’angoisse. Je ferai taire cette voix paralysante, travaillerai sur mes projets, ferai avancer des dossiers comme s’il allait y avoir des lendemains. « Nous sommes en guerre », martelait hier le président français. Croire pareil en mes projets.

Puis, entendre les publicités tonitruantes à la radio, qui parlent de la prochaine saison de golf, de restos de fast-food. Trouver cela surréel, éteindre la radio. Se crinquer ; il faut voir au-delà. Appeler ma mère. Appeler ma tante. Texter les amis. Se donner l’impression de s’activer. Étouffer le hamster.

De ma fenêtre de bureau, voir passer un chien. Deux chiens, dix chiens ! Jamais les chiens n’auront autant été promenés. Ça donne une destination, un chien. Regarder le chat et se demander pourquoi ça ne se promène pas, un félin. Se sentant observé, Billy bondit sur ma table de travail et se couche sur mes dossiers. Il me nargue en se vautrant. Passer mes doigts dans son pelage me calme un peu.

Niaiser sur les réseaux sociaux. Essayer de travailler. Trouver ça vain. Retourner sur Instagram. Voir les restos, les salons de coiffure, annoncer leur fermeture. Penser aux employés, aux petits employeurs, à leur angoisse. Angoisser de nouveau. S’habiller en mou. Et ça ne fait même pas une semaine que ça dure… Voir passer sur Instagram des calendriers maison de familles qui y affichent leurs activités de la semaine. Admirer ces familles. Y puiser une bonne dose de courage. Se changer, s’habiller moins mou : ça donne du pep et de la joie.

Finalement, recommencer sa journée, en mieux.

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Il y a des avantages à vivre en région très éloignée. Pas un seul cas à date. Bien sur les municipalités ont annulées tous les événements publics. L’aréna et le centre de ski sont fermés ainsi que la salle de spectable. Mais à par ça tout semble normal. Je suis aller à la pharmacie ce matin, tout le monde est aussi relaxe que si cette crise n’existait pas. En effet elle est encore virtuelle pour nous, elle n’existe qu’à travers les sites de nouvelles et les réseaux sociaux. Innévitablement un cas finira par être déclaré et puis 2,3… mais dans combien de temps? Avant que les coins les plus reculés de la planète soit atteint ça peut prendre des mois.

Mme Bazzo,

Vous vous demandiez ce que nous pourrions chanter ensemble au Québec? Pourquoi ne pas plutôt scander à une heure dite en choeur : So-so-so, solidarité!

Chère Mme Bazzo,

En effet quelle incongruité de continuer à voir et à entendre ces insondables vacuités publicitaires alors que d’autre part on nous exhorte autant que possible à demeurer chez soi !

De là, le privilège des lecteurs/lectrices invétéré(es) qui, contre mauvaise fortune bon coeur, en profitent pour enfin dévorer tous ces bouquins qui s’accumulaient depuis des temps immémoriaux !

Salutations cordiales et bon courage !

Chère Marie-France
L’anxiété de l’entrepreneure… pas suffisamment de travail, trop de travail, attente de paiements, gestion des ressources humaines… bref la source de nos angoisses est inépuisable. Après quelques jours de montagnes russes, j’ai fermé la télé, j’ai fermé l’atelier, j’ai sorti mon matériel de bricolage et mes chaudrons et je me sens plus zen. La contrôle freak en moi ne peut absolument rien faire. Les clowns n’ont pas besoin de costumes neufs en ce moment ils sont au chômage… c’est certain que l’industrie culturelle en prends pour son rhume en ce moment, mais notre joyeuse bande de créatifs saura toujours s’en sortir, j’en suis convaincue! Au plaisir de te lire! Do