Le pouvoir caché des vacances

L’achat local, c’est bon pour les fraises ou la musique, mais ça l’est aussi pour le tourisme. 

Ceci n’est pas qu’une journée de canyoning dans Charlevoix. (Photo : © Marc Tremblay, Canyoning-Québec)

Pour évaluer les performances économiques du Québec, on aime bien chronométrer le temps passé au travail ou mesurer la cadence des chaînes de production. Mais jeter un œil sur ce que font les gens pour s’évader en vacances est révélateur aussi !

L’ardeur investie pour décrocher du boulot et s’accorder du bon temps seul ou en famille nourrit un succès économique qui fait rarement les manchettes. Ce qui se passe dans les auberges ou sur les plages de la province est loin d’être anodin. Car les vacances des uns donnent beaucoup de boulot aux autres : 350 000 personnes vivent de près ou de loin du tourisme, soit presque 9 % des travailleurs du Québec ! Près de 13,5 milliards de dollars y ont été dépensés en activités touristiques en 2015, un nouveau sommet.

Le cinquième de la manne provient de visiteurs étrangers, dont les dépenses font entrer de précieuses devises dans l’économie. Si on considérait ce tourisme venu d’ailleurs comme une exportation — l’idée n’est pas farfelue : pour que ses charmes rayonnent, il faut « vendre » le Québec à l’étranger —, ce secteur serait le troisième pilier du commerce extérieur québécois, après les avions et les lingots d’aluminium vendus par les géants industriels.

Les Québécois eux-mêmes jouent aux touristes comme jamais. Chez eux et, de manière croissante, ailleurs. Leurs dépenses lors de voyages hors du pays ont plus que doublé en 15 ans, pour atteindre sept milliards de dollars. En soi, c’est une bonne nouvelle. Si les Québécois voyagent plus qu’avant, c’est qu’ils en ont les moyens. Ce n’est pas une tare économique pour une société que de compter de plus en plus de personnes assez riches pour se payer des vacances à Cuba ou une virée à Paris.

Sauf que…

Le nombre de touristes venus de l’étranger, lui, n’a pas suivi la même tendance à la hausse, et cela a déséquilibré ce qu’on appelle dans le jargon économique la « balance touristique » : il y a aujourd’hui un écart de plus de quatre milliards de dollars entre la manne touristique qui sort du Québec et celle qui y entre.

Le gros défi est donc de réussir à attirer un plus grand nombre de touristes étrangers au Québec. Et les astres s’alignent bien dans le ciel estival. Le New York Times et l’équipe des guides Lonely Planet ont déclaré que le Canada, avec ses célébrations entourant son 150e anniversaire, était l’endroit le plus intéressant au monde à visiter en 2017. Montréal déploie également ses charmes pour fêter son 375e anniversaire. Sans compter que le dollar canadien à la baisse permet des vacances au rabais, notamment pour les Américains, les Européens, les Asiatiques…

Le Québec a par ailleurs enfin réussi à rassembler ses forces au sein d’une toute nouvelle alliance touristique, à qui il a confié des ressources accrues pour se promouvoir à l’étranger.

La route des vacances est aussi plus attirante que jamais grâce aux idées folles qui prennent vie aux quatre coins du Québec. Qui aurait cru, il y a cinq ans, que Coaticook deviendrait une destination touristique à ne pas rater ? Les magiciens de la lumière de Moment Factory y ont créé une expérience inédite en forêt, qui se répand maintenant ailleurs au Québec.

Et si les Québécois eux-mêmes se laissaient convaincre de profiter davantage des attraits de la province, l’effet pourrait être puissant ! Bon, d’accord, il peut être tentant d’opter pour une police d’assurance contre la météo capricieuse en s’achetant un forfait dans les Caraïbes, même en plein été, comme le veut la tendance. Mais une seule fin de semaine de plus passée au Québec par chacun représenterait des retombées supplémentaires de trois milliards de dollars, selon le ministère du Tourisme.

L’achat local, c’est bon pour les fraises ou la musique, mais ça l’est aussi pour le tourisme. Bonnes vacances !