Le secret des bons profs

Des écoles publiques où les enfants réussissent et où les taux de décrochage sont négligeables, c’est possible. Voici comment des enseignants y arrivent, avec une méthode simple qui pourrait transformer le système d’éducation du Québec.

Un groupe d’élèves en difficulté dont le taux de réussite passe de 37 % à 97 % en un an. C’est l’expérience vécue par Mélanie Bellefleur, enseignante d’univers social (histoire) à l’école Cap-Jeunesse, à Saint-Jérôme, avec sa classe de 4e secondaire. Son secret : les méthodes d’« enseignement efficace », qui utilisent les évaluations pas seulement pour noter les élèves, mais aussi pour savoir ce qui cloche dans la classe. « Au début, ça déstabilise, parce que ça oblige à remettre en question notre enseignement, dit-elle. Mais ça marche. »

Mélanie Bellefleur s’inscrit dans une mouvance qui est en train de transformer l’école publique classe par classe, école par école, une commission scolaire à la fois : le recours à l’enseignement efficace. En (très gros) résumé : quand son groupe ou certains élèves éprouvent des difficultés, elle sait qu’elle doit transmettre la matière autrement.

Les résultats sont appréciables. À la commission scolaire de la Rivière-du-Nord, où Mélanie Bellefleur enseigne, le taux de diplomation était un des pires au Québec il y a 10 ans, avec 58 %. Il atteint maintenant 76,6 %, soit deux points de plus que la moyenne de 74,7 % des commissions scolaires francophones québécoises !

Et la Rivière-du-Nord n’est pas « toute seule de sa gang ». De plus en plus de commissions scolaires, telles Marguerite-Bourgeoys à Montréal, de la Beauce-Etchemin ou des Laurentides, mettent en place des mesures d’enseignement efficace, comme cela se fait en Ontario, en Iowa, au Massachusetts et ailleurs. L’approche est reconnue depuis une quarantaine d’années aux États-Unis, études scientifiques à l’appui, comme étant celle qui donne les meilleurs résultats en matière de réussite des élèves. L’Ontario l’applique depuis une vingtaine d’années. Au Québec, où elle a fait son apparition il y a près de 15 ans, son déploiement s’accélère. Le mot se passe parmi les enseignants à la recherche de solutions pour atteindre — et dépasser — le seuil visé par le ministère de l’Éducation : faire réussir au moins 80 % des élèves, c’est-à-dire les aider à obtenir leur diplôme du secondaire en sept ans ou moins.

Le ministre Jean-François Roberge, lui-même un converti de longue date à l’enseignement efficace, prévoit d’ailleurs donner suite au dossier sur lequel avait commencé à travailler son prédécesseur libéral en 2017, et créer d’ici deux ans un institut national d’excellence en éducation (INEE). « On va pouvoir faire le tri, déterminer ce qui marche, dans quelles conditions, et ce qui ne marche pas », explique le ministre de l’Éducation.

« On peut faire mentir toutes les statistiques et tous les déterminants socioéconomiques avec l’enseignement efficace ! »

Dominic Bertrand, le directeur général de Marguerite-Bourgeoys

« L’enseignement efficace, ce n’est pas une méthode, mais une série de gestes », souligne Nathalie Parent, responsable de l’encadrement de la formation en enseignement efficace à la commission scolaire Marguerite-Bourgeoys, à Montréal. « En classe, poursuit-elle, ça se résume à des techniques de questionnement et d’évaluation. Par exemple, dire : “Tout le monde a compris ? Oui, bon, on passe à autre chose”, ça ne marche pas. Il faut demander : “Qu’est-ce que vous avez compris ? Comment tu le dirais dans tes mots ? Comment tu le dirais à l’autre ?” »

La commission scolaire Marguerite-Bourgeoys est la deuxième au Québec avec près de 75 000 élèves : 63 % d’entre eux n’ont pas le français pour langue maternelle, et elle en reçoit chaque année 4 200 qui ne parlent pas cette langue à leur arrivée. De plus, entre le primaire et le secondaire, elle perd 41 % de sa clientèle au profit de l’école privée. Pourtant, la commission scolaire, qui a étendu l’enseignement efficace à ses 100 établissements il y a une quinzaine d’années, affiche un taux de diplomation de 86,7 %, soit 12 points de plus que la moyenne des écoles publiques francophones du Québec !

« On peut faire mentir toutes les statistiques et tous les déterminants socioéconomiques avec l’enseignement efficace ! » affirme Dominic Bertrand, le directeur général de Marguerite-Bourgeoys.

Pour savoir ce qui fonctionne avec les élèves, et ce qui ne fonctionne pas, il faut s’appuyer sur des données « probantes », c’est-à-dire démontrées scientifiquement, selon des protocoles de recherche sur de grands groupes, comme on en voit en médecine et en psychologie. « Un médecin peut bien dire : “D’après ce que j’ai observé, vous irez mieux si vous buvez du lait.” Mais pour soigner une population, ça prend plus que des observations anecdotiques », explique Égide Royer, professeur au Département d’études sur l’enseignement et l’apprentissage à l’Université Laval et auteur de la Petite encyclopédie de l’enseignant efficace. « Ça prend un niveau de recherche scientifique qui permet de conclure que oui, globalement, la population qui boit du lait se porte mieux. Ça ne veut pas dire que les données qualitatives ou anecdotiques ne sont pas bonnes. Elles nous guident vers des études qui vont nous permettre de quantifier le résultat et de vérifier quand ça marche et dans quelles conditions. »

Il faut savoir que si le ministère de l’Éducation dicte un programme (et donc des objectifs pédagogiques à atteindre), il ne fait que « proposer » les méthodes aux enseignants. Ceux-ci ont la liberté professionnelle de décider ce qui doit être fait dans leur classe en fonction des objectifs. Les commissions scolaires n’ont pas le pouvoir non plus d’imposer des méthodes : elles organisent les écoles autour d’une direction qui relève d’elles et offrent des services. Les syndicats, eux, défendent leurs membres. Et les facultés d’éducation forment les enseignants. Dans cet engrenage très complexe, les rouages ne tournent pas tous à la même vitesse ni dans le même sens.

En enseignement, convient Jean-François Roberge, il y a « beaucoup de recettes de grand-mère, et un bon nombre sont efficaces, mais pas toutes. Il y a aussi beaucoup de modes. » L’INEE va notamment mesurer les « bonnes idées » qui émanent des facultés québécoises, mais également traduire en français des études existantes. Le ministre insiste sur le fait que cet institut, qui regroupera un réseau de chercheurs dans divers établissements, ne sera pas une « police de la pédagogie ». « Son travail sera d’analyser les différentes approches pédagogiques sur une base scientifique. » Et les données recueillies permettront d’éviter les fausses pistes.

Cela paraît une évidence, mais il y a 20 ans, il était très rare qu’on décide de mesures éducatives sur la base d’études scientifiques. « Mettre en place l’aide aux devoirs au primaire a coûté des dizaines de millions de dollars, explique Dominic Bertrand, de la commission scolaire Marguerite-Bourgeoys. Le gouvernement libéral nous l’a imposée même si toutes les études démontrent que ça ne donne strictement rien au primaire — c’est seulement au secondaire qu’une politique d’aide aux devoirs donne des résultats ! »

Dans certaines facultés, au Ministère et dans les syndicats, on rencontre toujours beaucoup de résistance face à la notion de données probantes, qui remettent en question bien des idées reçues. « Il y a encore des fonctionnaires qui disent : “C’est pas vrai” lorsqu’on leur montre nos données de recherche. Les gens ne reconnaissent même pas les faits. Ça va faire, les études d’atmosphère du type “on se sent bien” ! » rugit Marc Saint-Pierre, consultant auprès de commissions scolaires. Lui-même a lutté contre les réticences en 2009, quand il a voulu instaurer les nouvelles orientations de la commission scolaire de la Rivière-du-Nord, dont il était le directeur général adjoint (voir l’encadré).

Lors du colloque « Les données probantes en éducation : existent-elles vraiment ? », tenu à l’UQAM en avril 2019, la cinquantaine de professeurs de différentes facultés d’éducation du Québec ont eu quelques surprises au contact de la centaine d’enseignants et de cadres de commissions scolaires présents. À commencer par le fait que les enseignants ne sont pas très informés des recherches. Et que bien des chercheurs n’ont pas une idée claire de ce qui se passe dans les classes. « Il n’y a pas tant de contacts que ça entre les deux groupes », dit Isabelle Plante, professeure au Département d’éducation et de formation spécialisée, et membre du comité organisateur. « On a senti chez les enseignants le désir de chercher des pratiques réellement efficaces. Ils veulent qu’on leur propose des trucs qui marchent et qui sont validés au-delà de l’anecdote. Intuitivement, ils donnent plus de valeur à une méthode qui a été validée scientifiquement. Ils ne sont pas dans la théorie. »

L’un des grands modèles en matière d’enseignement efficace, de données probantes et de facteurs de réussite scolaire provient du groupe Visible Learning (enseignement visible) de l’Institut de recherche en éducation de l’Université de Melbourne, en Australie. Le directeur John Hattie et son équipe ont pendant 15 ans recoupé les résultats de 1 200 méta-analyses. Le groupe a recensé 138 « facteurs d’influence » sur la réussite des élèves, tant sur le plan des méthodes pédagogiques que sur ceux des conditions socioculturelles (ethnicité, famille, sexe), de la technologie et de l’organisation (taille des classes, de l’école).

Il en ressort qu’assez peu de mesures sont carrément nuisibles — c’est le cas du redoublement, qu’appliquent encore certaines commissions scolaires quand un élève éprouve des difficultés importantes. Par contre, un grand nombre n’ont pas vraiment d’effet : la taille des classes, les classes multiâges ou les devoirs au primaire, par exemple. « En éducation, trop de décisions ont été prises sur la base de croyances », dit Monique Brodeur, doyenne de la Faculté d’éducation à l’UQAM.

Toutes les études démontrent que ce qui produit de très gros résultats, c’est un enseignement directif, fortement axé sur la lecture, où l’enseignant profite de formation continue et assure la rétroaction avec ses élèves. C’est la base de l’enseignement efficace. « Ça veut dire qu’un enseignement efficace a des effets très largement supérieurs aux facteurs technologiques, organisationnels ou socioéconomiques », explique John Hattie, joint à Melbourne. En d’autres termes, les bons enseignants sont capables de surmonter les facteurs d’influence négatifs comme la pauvreté, la classe sociale ou même de mauvais programmes !

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Sur les 63 commissions scolaires francophones du Québec, seulement 10 ont un taux de diplomation supérieur à 80 %. Du côté des commissions scolaires anglophones, c’est sept sur neuf, et le taux de diplomation moyen y est de 83,5 %.

 

Martin Patry, directeur adjoint à la polyvalente de Saint-Jérôme, s’est initié aux subtilités de l’enseignement efficace dans un cours à la maîtrise en administration scolaire, à l’UQAM. Il enseignait alors les sciences à l’école Cap-Jeunesse. « À ma dernière année, j’avais fait passer le taux de réussite des élèves de 80 % à 90 % ! »

Il était plutôt sceptique au départ. « J’avais tout essayé, jusqu’à des soirées d’étude pizza-chips. Je n’avais pas vu une miette de différence ! » À la faveur d’un examen d’étape de ses élèves de 5e secondaire, Martin Patry a appliqué un système d’évaluation simple, qui tient sur une feuille Excel. Comme d’habitude, chaque élève reçoit une note en fonction de ses réponses à 20 questions — sa note d’examen. Mais une colonne permet également de compiler les résultats de la classe pour chacune des questions. Et là, surprise. « Si seulement 40 % de la classe réussit la question sur les électrolytes, ça signale qu’il y a quelque chose qui cloche dans mon enseignement. »

C’est la méthode que Mélanie Bellefleur a aussi mise en place avec succès dans son cours d’univers social. Les résultats étant communiqués aux élèves, « si la classe obtient 17 % de réussite sur une question, les élèves voient qu’ils ne sont pas plus cruches que le voisin. À l’inverse, quand ils voient qu’ils ont bien répondu à une question, ça leur donne de la confiance. Et on peut bâtir là-dessus. »

Martin Patry a aussi introduit un système de votation, en utilisant l’appli gratuite Plickers. En début d’année, il avait remis à chaque élève un carton comprenant un code-barres permettant de l’identifier. À la fin de chaque cours, il posait une question et les élèves brandissaient leur carton : quatre réponses étaient possibles, selon l’orientation de ce dernier. Avec son téléphone intelligent, Martin Patry balayait la classe, l’appli lisait les codes-barres et les résultats apparaissaient au tableau blanc. « Tout le monde embarque au lieu des mêmes deux, trois bolés. Ils savent tout de suite où ils se situent. Et l’enseignant sait quoi faire au prochain cours. »

Ce genre de contrôle quotidien (il y a d’autres méthodes) procure des informations précieuses à l’enseignant. « Un élève m’a déjà dit : “Insiste pas, je suis poche en sciences ”, raconte Martin Patry. Mais quand il votait dans la classe, cet élève-là avait 85 % de bonnes réponses. À chaud, c’était même mon meilleur ! » C’est à l’examen que la sauce se gâtait. L’enseignant est parti de ce constat pour rebâtir la confiance de l’élève et l’encourager à étudier — et le « poche » a « passé » le cours avec une note de 73 %. « Dans une logique d’enseignement efficace, on devient coach. »

L’enseignement efficace se traduit par des changements importants dans la manière dont les enseignants enseignent, mais aussi dans la façon dont les directeurs dirigent et les commissions scolaires organisent le travail. Un enseignant travaillera encore plus efficacement si la direction et la commission scolaire agissent dans le même sens, en priorisant la pédagogie (au lieu de la gestion) et en offrant un milieu stimulant et calme (autres canons de l’enseignement efficace). La qualité de cet effort collectif explique largement le succès des commissions scolaires anglophones du Québec et des conseils scolaires franco-ontariens, dont les écoles affichent des résultats très nettement supérieurs à la moyenne provinciale.

Le défi de réorganiser une commission scolaire est immense, a constaté Marc Saint-Pierre lorsqu’il était directeur général adjoint à la Rivière-du-Nord. « C’est comme bâtir un bateau sur l’eau, dit-il. On ne peut pas tout arrêter, il faut continuer avec le système en place et susciter l’adhésion du personnel. Il faut former les enseignants, leurs remplaçants, s’assurer que les programmes sont appliqués correctement. Instaurer un programme dans une classe, c’est une chose. Dans 100 classes, c’en est une autre. Et faire en sorte que ça se maintienne d’année en année malgré les changements de personnel, c’est encore un autre défi. »

La commission scolaire de la Rivière-du-Nord a même conçu un système de monitorage informatisé, qui permet de suivre les résultats et les comportements de chaque élève, pour mieux dépister les cas problématiques. Une vingtaine de commissions scolaires ont repris ce système.

L’Ontario s’est mis à l’enseignement efficace au début des années 2000 et le taux global de diplomation y est de 85 %, très au-dessus de la moyenne québécoise.

Chaque réseau qui a amorcé le virage « enseignement efficace » y a ajouté sa couleur particulière. À la Beauce-Etchemin, on appuie fortement sur les difficultés d’adaptation, pour offrir le plus tôt possible des mesures spéciales aux élèves qui en ont besoin. « Maintenant qu’on a dépassé 80 % de taux de diplomation, il faut s’attaquer aux difficultés d’adaptation si on veut monter à 90 % », dit le directeur général de cette commission scolaire, Normand Lessard, dont le maître à penser s’appelle Michael Fullan, le père de la réforme éducative en Ontario.

L’Ontario s’est mis à l’enseignement efficace au début des années 2000 et le taux global de diplomation y est de 85 %, très au-dessus de la moyenne québécoise. Les conseils francophones, avec un taux de diplomation de 93 %, font l’envie des Québécois.

Pour Dominic Bertrand, de la commission scolaire Marguerite-Bourgeoys, « le secret, c’est la cohérence. Ajouter 25 psychothérapeutes, ça peut ne rien donner si le reste est tout croche. Quand des élèves ont des difficultés d’apprentissage, il faut d’abord se demander si l’enseignement de base a été efficace, et si les enseignants ont pris les bonnes mesures pour ceux qui avaient du mal. Et là, on est capable de dire : “Cet élève-là a besoin de 30 ou 50 minutes d’orthopédagogie.” »

Cette commission scolaire a mis en place une série de mesures d’avant-garde, à commencer par des « référentiels » (des systèmes de normes et d’évaluation des mesures) pour tout le personnel, y compris les enseignants, avec la coopération du syndicat. Et elle s’appuie lourdement sur les directions scolaires, dont la priorité ne doit pas être la gestion, mais la pédagogie. Chaque nouveau directeur doit suivre une formation spéciale de plusieurs mois à l’Université de Montréal. « On a même un bureau de la statistique », note Dominic Bertrand.

À Saint-Jérôme, à Saint-Georges, dans l’arrondissement de Saint-Laurent ainsi que dans chacune des commissions scolaires qui adoptent l’enseignement efficace, les résultats des élèves, des classes et de l’école servent au dépistage précoce des futurs décrocheurs et à une meilleure allocation des ressources.

À la Rivière-du-Nord, le directeur général adjoint à la réussite Sébastien Tardif s’attend à de très bons résultats en 2022, lorsque les élèves de maternelle qui ont goûté aux nouvelles méthodes en 2009 termineront leur 5e secondaire (les statistiques sont basées sur l’obtention d’un diplôme secondaire en sept ans). « Les indicateurs vont tous dans ce sens, dit-il. Ce qu’on est en train de réussir prouve qu’il existe une marge de manœuvre pour améliorer les choses malgré l’austérité et les contraintes ministérielles. »

 

La lecture, clé de la réussite

À la suite des résultats calamiteux obtenus par sa commission scolaire en 2005 (43 % de décrochage, et jusqu’à 58 % chez les garçons), Marc Saint-Pierre a consulté la littérature scientifique. Les études montrent que les trois principaux déterminants du décrochage sont : des difficultés de lecture à sept ans, des troubles de comportement à neuf ans et des difficultés d’apprentissage en 1re secondaire. Et ces deux derniers découlent du premier. Conclusion : pour vaincre le décrochage, commençons par la lecture.

Marc Saint-Pierre a encouragé ses enseignants de maternelle à utiliser La forêt de l’alphabet. Ce petit programme (25 minutes par jour pendant 26 semaines) mis au point par Monique Brodeur alors qu’elle était professeure à l’UQAM (elle est aujourd’hui doyenne de la Faculté d’éducation) vise à enseigner aux enfants les lettres, les sons et un peu de vocabulaire.

« Quand on a voulu introduire La forêt de l’alphabet, des fonctionnaires du Ministère ont protesté en disant que notre approche était trop “scolarisante”, qu’on “volait l’enfance des enfants”, se désole l’ancien directeur général adjoint. Nous proposions une approche ludique et joyeuse, avec des jeunes assis en rond autour d’une marionnette. Les fonctionnaires y voyaient plutôt des “petits assis en rangées”. » Marc Saint-Pierre les a convaincus de les laisser essayer le programme. Les résultats ont été si positifs que celui-ci a été étendu à toutes les écoles de la commission scolaire.

Dans sa classe de 1re année, à l’école du Joli-Bois, à Sainte-Sophie, Isabelle Jean a tout de suite vu l’effet des changements introduits en maternelle. « Les cocos qui m’arrivent en 1re année sont nettement plus avancés, affirme-t-elle en montrant divers tableaux. Auparavant, les enfants pouvaient effectuer la fusion des sons, comme p + a = pa, vers février ou mars. Maintenant, c’est acquis en novembre ! Et à la fin de l’année, j’empiète sur le programme de 2e année. »

En plus de La forêt de l’alphabet, Marc Saint-Pierre a introduit une cascade de nouveaux programmes de lecture jusqu’à la 2e année, notamment Apprendre à lire à deux, de l’équipe du Laboratoire sur les pratiques d’enseignement appuyées par la recherche à l’UQAM, qui distribue des méthodes d’enseignement efficace aux enseignants qui en font la demande. « Les enseignants qui viennent à nous sont de plus en plus nombreux, dit Éric Dion, le directeur du Laboratoire. On est en train de changer le visage de l’apprentissage de la lecture au Québec. »

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J’ai bien apprécié cet article sur l’éducation.
Les informations mentionnées sont positives et donnent le goût d’améliorer les techniques d’enseignement en classe. Nous vivons depuis plusieurs années un tournant en
éducation. Il y a beaucoup de travail à faire pour que le système scolaire progresse.
L’enseignement efficace est une des solutions, à mon avis. J’enseigne depuis plus de 20 ans et j’observe une dégradation alarmante en lecture chez les jeunes.
Je pense que nous réussirons à outiller et à motiver les jeunes si la société prend à cœur leur éducation. J’inclus les parents, les éducateurs, les enseignants, les directions, le ministère de l’éducation, tous les spécialistes et les jeunes, bien sûr!
Cela demandera d’écouter les enseignants et de mettre en oeuvre des conditions de travail idéales, entre autres.
Merci pour cet excellent article,

Sylvie Bolduc

Quand j’étais formateur (pour éviter le terme « enseigner ») au secteur formation professionnelle, il y a plus de 20 ans, nous étions confrontés à l’évaluation par questionnaires dit « objectifs » (répondre par A,B,C,D,E- aucune de ces réponses). Incroyable! Le secteur « se mourait » … les employeurs ne croyaient plus en notre formation en secrétariat et comptabilité! Une fonctionnaire déterminée (réactionnaire!) et un groupe de 15 formateurs du secteur avons offert au ministre de l’époque de refaire le programme en 1 semaine (retraite fermée!) : nous lui avons prouvé que nous n’avions pas besoin de 2 ans, 56 études et des centaines de milliers de $ pour créer un programme adapté de formation. L’étudiant, le ou la candidate adulte (jeune et moins jeune) était évalué sur son APPRENTISSAGE, étape par étape (suivi personnalisé), chacun à son rythme, passant l’évaluation finale d’un module au moment ou il le demandait, ou il ou elle se sentait prêt, stages périodiques en milieu de travail (apprentissage travail-étude). Quand on lui remettait son attestation de formation (« savoir », « savoir faire » et « savoir être »), il était prêt à travailler et les employeurs s’en réjouissaient. Le secteur « jeune » qui nous « jalousait » … « on sait bien, vous n’avez pas affaire à des jeunes, à des ados, … c’est facile pour vous.! » Non, il nous arrivait après une adolescence difficile, une jeune vie d’adulte marqué par les échec, divorce, violence conjugale (nous avions une prison fédérale à sécurité max dans notre voisinage), chômage, BES (ils nous en arrivaient en formation « forcée » – pour continuer de toucher leurs prestations), … on devait d’abord leur refaire une confiance en soi, une motivation … sinon impossible de leur faire apprendre quoique ce soit. On a du demander l’aide de psycho, de conseillers, de support … à l’accueil et tout au long de la formation … de la collaboration des entreprises pour la préparation du matériel de cours adapté … et de beaucoup d’heures de travail « non rémunérés ». Moi, qui s’était d’abord inscrit en « arts dentaires » et qui suis passé à la pédagogie … par hasard, j’ai vécu un expérience professionnelle des plus riche. 30 ans, 40 ans après, je rencontre de mes anciens « étudiants » avec un plaisir partagé, de merveilleux souvenirs, de contacts humains des plus enrichissants! Être enseignant, il faut que tu aies ça dans la peau d’abord. Ça doit être une vocation pour y trouver du plaisir et de la satisfaction … comme dans plusieurs professions!

Ce qu’ils oublient de mentionner concernant l’Ontario, c’est que la note de passage est de 50%!!! Cela fait une grande différence sur le taux de réussite n’est-ce pas…

Bonjour, merci pour ce reportage. Je suis contente de voir que des profs mais surtout des commissions scolaires n’attendent plus après le gouvernement pour apporter des nouvelles façons de faire qui donnent des résultats concrets de succès. Car en tant que parent d’enfants ayant de la difficulté à réussir, je trouve très frustrant de lire que pour plusieurs organisations, la gestion passe avant la pédagogie. Celles-ci devraient relire ou voir réécrire leur mission et leur raison d’être. Sinon à quoi servent les commissions scolaires si ce n’est pour ajouter une lourdeur administrative? Pouvez-vous passer à l’éducation efficace dès maintenant svp? Nous n’avons plus le temps d’attendre après une quelconque étude. Merci

J’aimerais bien qu’on analyse et non seulement traduire ces mesures probantes dans les classes dites « régulières » de Montréal. Lors d’un congrès, j’ai appris que certaines études de Hattie ont été contredites par des chercheuses québécoises… Il y a eu tellement de bévues par le passé que c’est normal que les enseignants soient sceptiques. Aussi, je ne comprends pas pourquoi les nouveaux enseignants, qui sortent de l’université, ne connaissent pas les moyens efficaces d’enseigner?!