
À peine 5 % des jeunes d’aujourd’hui lisent par plaisir des livres en version papier. C’est le constat de Thierry Karsenti, chercheur à l’Université de Montréal, qui a interrogé 114 élèves d’écoles secondaires québécoises.
Dans les classes où l’enseignant de français fait lire des livres numériques, l’intérêt augmente. Après un an de pratique, 30 % des élèves interrogés avaient lu au moins un livre qui ne figurait pas parmi les lectures obligatoires, pour leur simple plaisir. «Ça fait encore 70 % des élèves qui ne sont pas intéressés. La tablette n’est pas une panacée, reconnaît Thierry Karsenti. Mais elle présente beaucoup plus d’avantages que d’inconvénients.»
Le chercheur a présenté ses résultats dans le cadre du 2e Colloque international en éducation. Organisé par son centre de recherche, le rassemblement accueille, les 30 avril et 1er mai à Montréal, 35 conférenciers internationaux et quelque 1 500 d’enseignants nord-américains, européens et africains. Le 3e Sommet du iPad et du numérique en éducation se déroule simultanément au même endroit.
Les élèves interviewés par le chercheur ne se sont pas fait prier pour lui décliner les avantages de la tablette. Ils trouvent des milliers de livres gratuits sans avoir à se déplacer. Ils peuvent partager leurs découvertes en envoyant un hyperlien plutôt que de devoir prêter leur exemplaire. Ils trouvent la lecture plus intéressante, grâce au contenu multimédia de plus en plus souvent présent dans les livres jeunesse numériques. La plupart lisaient plus longtemps que s’ils avaient eu un livre papier entre les mains.
«Un élève m’a dit que lorsqu’il ne comprend pas un mot, il appuie dessus pour avoir la définition. Avec un livre papier, il ne va jamais chercher dans le dictionnaire : il passe par-dessus le mot sans le comprendre», rapporte Thierry Karsenti.
Un avantage bien réel du numérique sur le papier. «J’ai demandé aux autres élèves s’ils cherchaient des mots dans le dictionnaire papier, parfois. Il n’y en avait pas un seul qui le faisait. Zéro !»
Une enseignante rusée a expliqué au chercheur ce qu’elle faisait pour inciter à lire les élèves les plus réfractaires. Elle leur fait lire du Agatha Christie sur support numérique — puis, à la fin du premier chapitre, elle leur demande d’écrire, sur un post-it virtuel, le nom du meurtrier, avec deux ou trois arguments. Cette «note» est ensuite partagée à l’ensemble de la classe, grâce à une application. Les élèves se dépêchent de lire les chapitres suivants pour savoir s’ils ont raison, ou pour modifier leur réponse ou leurs arguments au fil de l’action.
Une telle activité aurait pu facilement être réalisée avec une bonne vieille feuille de papier et un crayon, bien sûr. Mais les enseignants doivent désormais faire preuve de beaucoup d’imagination… «Ce n’est pas facile d’intéresser les jeunes à un livre écrit par un auteur aujourd’hui décédé, alors qu’ils ont accès à des jeux vidéo, aux réseaux sociaux et à tant d’autres divertissements», souligne Thierry Karsenti.
Le chercheur insiste sur l’importance de la lecture pour apprendre du vocabulaire, la structure de longs textes et bien d’autres choses. «Pour cela, il faut lire des romans ou des essais, et pas seulement des statuts Facebook», dit-il. Si la tablette peut y contribuer, pourquoi ne pas s’en servir ? demande-t-il.
Avec un aussi petit échantillon et ne sachant rien de la composition de celui-ci, il est impossible de conclure qu’à peine 5 % des jeunes lisent par plaisir des livres en version papier à partir de l’étude de monsieur Karsenti. La marge d’erreur de cette étude est au minimum de 10 %. On pourrait arriver à 15 % ou encore à 0 avec un autre échantillon…
Au sujet de l’enseignante rusée:
La note est peut-être communiquée à l’ensemble de la classe, mais certainement pas « partagée » à l’ensemble de la classe.