Les finissants du secondaire et les élèves en difficulté, grands perdants de la crise sanitaire

Un sondage mené auprès d’élèves du primaire et du secondaire montre que certains groupes vulnérables auront besoin d’une aide adaptée pour se sortir du marasme causé par la pandémie.

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Tous les auteurs sont rattachés à l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Patrick Charland est professeur titulaire au Département de didactique ; Jonathan Bluteau est professeur agrégé au Département d’éducation et formation spécialisées ; Marie-Hélène Bruyère et Yannick Skelling-Desmeules sont assistants de recherche ; Marion Deslandes Martineau est étudiante-chercheuse à la Chaire UNESCO de développement curriculaire ; Olivier Arvisais est professeur au Département de didactique.

La crise de la COVID-19 a eu l’effet d’une bombe sur les systèmes d’éducation partout dans le monde. Dès le début de la crise, au printemps 2020, la scolarisation de plus d’un milliard et demi d’élèves a été interrompue en raison des mesures sanitaires, avec des conséquences majeures reconnues très tôt par l’UNESCO.

Ces dernières incluent notamment une réduction du filet de sécurité sociale des enfants, une exacerbation des inégalités sociales et éducatives ainsi qu’un accès nettement insuffisant aux technologies.

L’année scolaire 2020-2021, au cours de laquelle la majorité des élèves ont pu réintégrer l’école au Québec, s’est elle aussi accompagnée de nombreux défis dont on ne connaît pas encore tous les effets. On peut penser par exemple aux défis liés à la santé et au bien-être des enseignants et des élèves, à la pénurie de personnel, aux mesures sanitaires mises en place à l’école, aux éclosions de cas menant à la fermeture de classes, voire d’établissements scolaires, à l’enseignement en ligne ou hybride, aux nouvelles modalités d’évaluation, etc.

Un suivi des conséquences de la pandémie

Nous avons lancé un projet de recherche avec la Chaire UNESCO de développement curriculaire (CUDC), en partenariat avec le ministère de l’Éducation du Québec. Nous avons cherché à décrire les conséquences de la COVID-19 sur l’organisation, les écoles, le personnel enseignant et les élèves lors de l’année scolaire 2020-2021.

Un questionnaire a été envoyé aux élèves et aux enseignants du primaire et du secondaire en deux temps, soit en décembre-janvier et en mai-juin. L’idée était de connaître leurs impressions par rapport aux effets de la pandémie.

Les résultats préliminaires présentés dans cet article concernent les élèves des trois centres de services scolaires (CSS) participants. Il s’agit de centres de services en régions urbaine et périurbaine, dont certaines écoles sont en milieu rural. Quatre dimensions liées aux effets de la COVID-19 ont été évaluées :

  1. Le niveau d’inquiétude par rapport à diverses situations liées à la COVID-19, par exemple le fait d’être isolé des autres ou la santé des proches et des membres de la famille ;
  2. Le niveau d’anxiété et de dépression, se traduisant par des troubles d’adaptation liés à des peurs ou inquiétudes excessives, un repli sur soi, une agressivité très réactive, de l’insomnie, de la dépréciation de soi, etc. ;
  3. La motivation, qui comporte deux composantes complémentaires : la valeur d’une matière scolaire, ou l’intérêt qui lui est accordé, et les attentes de succès (en mathématiques, en français et en sciences) ;
  4. Le bien-être ressenti à l’école, qui se manifeste par exemple par la bonne humeur, le calme ou l’appréciation générale de ses journées.

Certains groupes plus affectés que d’autres

De janvier à juin 2021, on constate que les élèves du primaire et du secondaire tendent à s’adapter aux contraintes sanitaires dans leur milieu scolaire. Le niveau d’inquiétude rapporté a diminué légèrement, mais significativement, entre ces deux mois. Les filles perçoivent également moins d’effets de la COVID-19 au mois de juin qu’en début d’année. Il est à noter que les vaccins ont commencé à être administrés massivement durant cette période.

Outre cette tendance générale somme toute positive, les élèves en situation de handicap ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage (HDAA) demeurent plus lourdement affectés par la COVID-19. En janvier, les résultats de l’enquête laissaient déjà entrevoir davantage d’inquiétude et moins de bien-être chez ces derniers que chez leurs pairs. En fin d’année, non seulement cette situation demeurait inchangée, mais elle se voyait même exacerbée.

Les élèves du deuxième cycle du secondaire présentent quant à eux un bilan moins positif que l’ensemble des autres élèves par rapport aux effets de la COVID-19. En janvier, ils avaient déjà été reconnus comme étant plus affectés que les élèves de tous les autres cycles, et ce, pour toutes les dimensions évaluées (inquiétude, anxiété, motivation et bien-être).

En juin, c’était toujours le cas. Bien que leur perception des conséquences de la COVID-19 soit demeurée stable pour la plupart des dimensions, leur capacité d’adaptation semblait moindre que celle observée chez les autres élèves. Cette observation peut paraître contre-intuitive, étant donné l’amélioration du contexte sanitaire.

Des groupes vulnérables qui auront besoin d’aide adaptée

En général, on notait en fin d’année chez les élèves une certaine résilience et une belle capacité d’adaptation, surtout au primaire. En revanche, au secondaire, l’amélioration de janvier à juin 2021 était moindre.

L’étude aura permis de cibler deux groupes d’élèves plus vulnérables, soit les élèves HDAA et ceux du deuxième cycle du secondaire. En ce qui a trait à ces derniers, il importe également d’accorder une attention spéciale aux finissants de 2020-2021, qui sont actuellement en début de parcours au cégep ou à la formation professionnelle.

En effet, leur moins grande adaptation à la COVID-19 par rapport à leurs pairs en fin de parcours au secondaire pourrait avoir des répercussions dans cette nouvelle étape de leur cheminement scolaire et dans l’intégration d’un nouveau milieu.

À l’issue de l’étude, nous espérons que les résultats favoriseront la mise en place de mesures d’aide adaptées pour les élèves, particulièrement les groupes vulnérables. Par exemple, des initiatives telles que la bonification de l’offre d’activités parascolaires structurées ou d’activités physiques extérieures peuvent aider l’ensemble des élèves quant à leur bien-être, leur gestion du stress et leur adaptation socioémotionnelle.

Pour une perspective plus approfondie de l’incidence de la COVID-19 sur les milieux scolaires, la suite du projet comprend une mise en relation des réponses aux questionnaires avec celles issues d’entretiens avec différents acteurs des CSS participants.

Nous allons également analyser les résultats des élèves pour les années scolaires 2018-2019, 2019-2020 et 2020-2021, afin de tenter de déceler la présence d’une tendance. Des discussions sont aussi en cours pour poursuivre l’étude dans les années scolaires subséquentes, afin de vérifier les effets à plus long terme de la COVID-19 sur les enfants et adolescents.

Cet article est republié à partir de La Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

The Conversation
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Décrire les symptômes (inquiétude, anxiété, impacts sur la motivation, impacts sur le bien-être) qui affectent les élèves en situation de handicap ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage (HDAA) n’en identifie pas les causes et le lien tissé à la Covid comme facteur d’exacerbation est également de nature conséquentielle.

Selon les paramètres qui la décrivent ici, cette recherche se contente de dresser un portrait situationnel qui ne nous renseigne pas sur les conditions scolaires qui occasionnent l’hypertrophie de la détresse USUELLE véue par les élèves vulnérabilisés : PLANS D’INTERVENTION BÂCLÉS, cosmétiques et non systémiques, diagnostics escamotés, objectifs de réhabilitation non ordonnancés, désignation farfelue des répondants, moyens improvisés, absence de suivis des actions entreprises, intervenants livrés à eux-mêmes, PRIVATIONS MUTIPLES DE SERVICES À HAUTEUR DES BESOINS…
Par ailleurs, l’hypertrophie de la vulnérabilité se met en place dès les débuts du primaire et ce serait primordial de ne pas l’occulter.
Il y aurait beaucoup à ajouter, mais, enfin, sous-titrer qu’ « Un sondage mené auprès d’élèves du primaire et du secondaire montre que certains groupes vulnérables auront besoin d’une aide adaptée pour se sortir du marasme causé par la pandémie. » laisse perplexe : les besoins non répondus des groupes vulnérables remontent aux années 70 et se sont amplifiés dès les débuts 90 avec l’introduction, par Égide Royer , du modèle de l’Iowa dans la gestion des PI des écoliers en TC, application devenue depuis lors généralisée à toutes les catégories d’ÉHDAA.
La pandémie aggrave les vulnérabilités des élèves comme elle a aggravé le sort des personnes âgées dans les CHSLD, mais ce sort est scellé et était scellé depuis belle lurette !
On éradiquera pas le virus qui hante le système scolaire depuis des lustres en l’associant à la COVID…

Patrick JJ Daganaud, systémicien de l’adaptation scolaire et sociale.