
Les adversaires des libéraux auront beau dire que le Plan Nord « n’est que du marketing », le reportage de Jean-Benoît Nadeau prouve le contraire. Les autochtones qui trouvent enfin des emplois, les Jamésiens qui désormais gouvernent conjointement leur coin de pays avec les Cris, les entrepreneurs qui profitent à fond du boum savent que ce Plan a déjà changé le Québec. Et ce n’est pas dû qu’aux conditions du marché du minerai !
Loin des caméras des médias, qui franchissent rarement le 49e parallèle, le Plan Nord impose son rythme. Le prochain gouvernement, peu importe sa couleur, devra en prendre acte. Et s’atteler à pallier les douleurs de croissance de ces collectivités nordiques où le prix des maisons double, où le salaire des soudeurs explose (mais pas celui des enseignants ou des infirmières), où les garderies sont rares et les municipalités débordées.
Le Plan Nord n’appartient pas qu’aux libéraux. C’est celui d’un Québec qui a bien besoin d’accroître sa richesse, collective et individuelle, pour faire face aux défis de demain.
S’il faut s’inquiéter d’une chose dans cette campagne, ce n’est pas tant des promesses – parfois irréalistes – déjà faites, que de celles qui n’ont pas été faites !
À la mi-campagne, aucun parti n’avait proposé de solutions au monstrueux déficit des caisses de retraite des municipalités, qui plombe l’avenir. Ce déficit – alourdi par la baisse des taux d’intérêt et le ralentissement mondial de l’économie – s’est creusé de 55 % en un an, et ce chiffre ne tient pas compte de Québec et de Montréal ! Pour payer les rentes promises, les municipalités devront imposer davantage les résidants, réduire les services… ou encore les prestations des pensionnés !
Dans certaines municipalités, comme Longueuil, le déficit du régime de retraite des policiers est presque aussi élevé que toute la masse salariale des employés de la Ville. Où trouver cet argent, sinon dans les poches des contribuables ?
L’Union des municipalités propose des solutions : hausser l’âge de la retraite, cesser d’indexer totalement les rentes au coût de la vie, ne plus subventionner les retraites anticipées. Mieux : mettre en place des régimes dont la rente varie selon les rendements du régime. On entend déjà le concert de protestations.
Les régimes de retraite sont l’éléphant que tout le monde fait semblant de ne pas voir, mais qui s’invite aux pourtours de la campagne. Frais dentaires remboursés pour les ados, médecins de famille pour tous, garderies à sept dollars maintenues. Jolies promesses. Mais qui paiera si le Québec ne s’enrichit pas avec le Nord, si l’économie mondiale continue de tourner à petite vitesse et que les taux d’intérêt restent bas ?
À tout moment, l’éléphant pourrait, d’un seul petit coup de trompe, fracasser les promesses. Pourtant, aucun des partis n’ose dire ce qu’il compte faire pour protéger le Québec des colères du pachyderme. Comme si, par une curieuse pensée magique, ils espéraient tous que la bête disparaisse, annihilée par cette « main invisible » du marché si souvent critiquée, surtout par les formations de gauche. Y a-t-il, sur les bulletins de vote du 4 septembre, un dompteur d’éléphants ?