Se voir en grand

Les Québécois aiment encore voir leurs histoires et leurs vedettes sur grand écran. Notre cinéma mérite d’être mieux soutenu qu’il ne l’est présentement.

Photo : Christian Blais pour L’actualité

J’ai passé mon automne au cinéma : tant de bons films à voir, québécois au premier chef ! Mais les salles étaient plutôt dégarnies, peu importe la provenance du long métrage.

L’argument économique joue, mais à quel point ? Après tout, 57 % des Québécois paient maintenant les services de Netflix, et les autres plateformes de visionnement en ligne voient également leur popularité augmenter. Cumuler les abonnements finit par paraître dans un budget.

C’est pourquoi même si le coût du billet est le premier élément reconnu comme un obstacle à la fréquentation des salles, selon une étude commandée le printemps dernier par Téléfilm Canada, je crois que le confort du salon pèse lourd dans la balance.

D’ailleurs, dans cette étude menée par ERm Research, les répondants faisaient aussi valoir des préoccupations de confort, découlant de la pandémie. Il était question de souci sanitaire, de doute quant à la propreté des salles, du manque d’espace personnel, sans oublier ceux qui disaient franchement préférer regarder un film à la maison. Mis ensemble, ces éléments avaient plus d’importance que les coûts.

Qu’ils soient amateurs occasionnels ou cinéphiles affirmés, les Québécois aiment encore voir leurs histoires et leurs vedettes au grand écran. Il y a de quoi bâtir sur un tel constat.

L’étude révélait donc qu’en dépit d’un certain retour des spectateurs en 2022, « la fréquentation prévue est en baisse d’environ 40 % par rapport à la fréquentation autodéclarée avant la pandémie ».

Ce sont les cinéphiles assidus qui décrochent le plus : ceux qui auparavant se déplaçaient pour une dizaine de films en six mois prévoient maintenant le faire pour cinq. Or, dans leur cas, outre les coûts et le confort, on constate que le contenu a une influence : les films canadiens, ou ceux mettant en vedette des artistes canadiens, les incitent à se rendre en salle.

C’est encore plus vrai au Québec, souligne l’étude. Qu’ils soient amateurs occasionnels ou cinéphiles affirmés, les Québécois aiment encore voir leurs histoires et leurs vedettes au grand écran. Il y a de quoi bâtir sur un tel constat.

Mais pour cela, les films doivent être à l’affiche suffisamment longtemps ! J’ai raté bien des productions québécoises faute de les avoir attrapées dès leur sortie. Une semaine ou deux après la première projection, c’était déjà trop tard.

Surtout, ils doivent être à l’affiche tout court. Montréal, Québec, Sherbrooke sont bien desservies, quelques autres villes aussi. Mais dans les petites, le cinéma américain occupe la quasi-entièreté du temps d’écran. Quand un film québécois se glisse dans la programmation, c’est que des célébrités sont de la distribution. (C’est déjà mieux que pour les films européens, presque complètement ignorés !)

Il faut également raviver le plaisir de voir un film en salle. Parler de l’obscurité, de la chimie qui opère lorsqu’on rit ou frissonne à l’unisson avec des inconnus qui tout à coup partagent les mêmes émotions que soi… Dans les salles que j’ai fréquentées cet automne, on présentait une publicité où India Desjardins, Rémy Girard, Céline Bonnier et d’autres expliquaient avec un sourire ravi pourquoi le grand écran offre une expérience prenante, différente. Un message simple transmis par des gens connus et appréciés du public… mais qui prêchait à des convaincus : si on l’entendait, c’est parce qu’on était déjà rendus au cinéma ! Il aurait plutôt fallu le diffuser sur les réseaux sociaux, là où se trouvent les jeunes qui ignorent tant d’aspects de la culture québécoise.

Et pourquoi pas des émissions — qu’elles soient en ligne, en balado ou traditionnelles — consacrées uniquement au cinéma, plutôt que des chroniques dispersées ici et là ? Une version contemporaine d’À première vue, des années 1980, où René Homier-Roy et Chantal Jolis puis Nathalie Petrowski s’affrontaient brillamment sur les films qu’ils avaient vus. Il y a encore des mordus de cinéma pour livrer de tels combats !

Au contraire, le désintérêt domine chez les grands diffuseurs, comme en témoigne la décision de Radio-Canada de ne plus présenter le Gala Québec Cinéma. Il y avait bien de la légèreté dans ce choix, vu le mandat de la société d’État et les cotes d’écoute plus que respectables de quelque 500 000 téléspectateurs.

En cette époque où la culture américaine nous avale et où chacun se replie sur lui-même, n’en va-t-il pas de notre santé collective de non seulement soutenir la créativité d’ici, mais aussi d’inciter les gens à se mêler les uns aux autres ? Pour les salles de cinéma, c’est d’autant plus important qu’à l’inverse des arts vivants ou des musées (qui ont par ailleurs leurs propres défis de fréquentation), elles sont directement en concurrence avec la maison.

Pourtant, sortir constitue une pause si salutaire dans la routine des jours… En tout cas, moi, vous saurez où me trouver durant le congé des Fêtes !

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Le mal est très profond. Je viens de regarder les 2 premiers épisodes de Three Pines basé sur l’œuvre de Louise Penny qui écrit en anglais mais dont l’action se passe dans les Cantons-de-l’Est. Or, le rôle de l’inspecteur Gamache, un vrai Québécois dans les livres de Mme Penny, est joué par un Anglais qui ne parle pas français… Si on écoute la série dans la langue qu’elle a été faite, en anglais, elle manque l’air de réalité des Cantons-de-l’Est et la traduction française donne au moins cet air de réalité avec la voix de Guy Nadon pour Gamache, qui est beaucoup plus réaliste. Nous avons des acteurs internationaux qui auraient été très bons dans le rôle de Gamache en français et en anglais, comme Guy Nadon probablement mais certainement quelqu’un comme Roy Dupuis, un habitué d’Hollywood.

C’est vraiment insultant pour les Québécois de faire une série qui se passe ici mais qui en fait pourrait se passer n’importe où dans la monde anglo-américain. On veut plaire au monde anglophone mais on leur enlève les vraies affaires, les confortant dans leur idée de suprématie culturelle. On peut dire que c’est «Business as usual»!

Cinéphage invétérée pendant de nombreuses années, j’ai constaté avec horreur l’augmentation graduelle du volume du son dans les salles. J’avais commencé à porter des bouchons pour y aller.
Dernièrement, j’ai simplement demandé un remboursement dès les premières minutes. Les autres dans la salle m’ont confirmé que les décibels les incommodaient aussi. Mais personne ne s’est manifesté au guichet. C’est pourquoi j’achète désormais des DVD que je visionne chez moi. Heureusement, le ciné-club de St-Jean-sur-Richelieu offre un menu irrésistible d’excellents films dont le volume est géré par un technicien compétent.
Alors dans mon cas, ça n’a rien à voir avec le confort du salon. Le visionnement en salle me manque.