
La série aura été chaudement disputée jusqu’à la fin: les deux clubs ont obtenu le même nombre de buts, 12, et un nombre pour ainsi dire identique de chances de marquer, 102 pour Montréal, 98 pour Ottawa. On attendait de Price qu’il vole au moins un match dans cette première ronde, et l’on peut maintenant arrêter le débat avec ce blanchissage : les Canadiens semblaient bien décidés à gagner sur la foi d’une performance étincelante de leur meilleur joueur. Ça en était même un peu exagéré, pour tout dire.
On gagne et on perd avec ses meilleurs
Le sort des Sénateurs d’Ottawa a toujours reposé sur les performances d’Erik Karlsson et du trio composé de Kyle Turris, Mark Stone et Clarke MacArthur. Le match de dimanche n’a pas fait exception. Les membres du trio de Turris ont tous passé plus de 15 minutes sur la patinoire à forces égales, alors que Karlsson a de son côté joué pas moins de 22 minutes dans cette situation. En plus de jouer 14 minutes avec Marc Methot, le capitaine des Sénateurs a passé près de 7 minutes en compagnie de Patrick Wiercioch, soit presque autant que le 3e duo de son équipe !
À l’instar du trio de Turris, le trio de Jean-Gabriel Pageau a offert des performances constantes tout au long de la série, mais on ne peut en dire autant de celui piloté par Mika Zibanejad. Lorsque l’unité du numéro 93 trouvait le moyen de menacer, la défensive du CH craquait sous la pression, multipliant les chances de marquer accordées. Or, rien de tout ça dimanche soir. Outre des chances en or en fin de match pour Zibanejad et Bobby Ryan (alors que le filet des Sénateurs était désert), ce trio a été complètement neutralisé par ceux de Lars Eller et de Torrey Mitchell.
En fait, si le Canadien a souvent paru embouteillé dans son territoire, il a de manière générale évité de donner aux Sénateurs les chances nécessaires pour menacer Price. Dimanche soir, Ottawa a obtenu 12 chances de marquer à forces égales (mais seulement 6 après la première période) et 5 autres lorsqu’ils ont substitué un 6e attaquant à la place du gardien. Carey Price a donc eu son gros mot à dire en toute fin de match, mais autrement, une fois la première période passée, il n’a guère été menacé.
L’émergence des joueurs de soutien
Le jeu des trios d’Eller et de Mitchell est d’ailleurs une des grandes surprises de cette série. On attendait d’eux qu’ils tiennent leur bout, sans plus. En fait, lorsque je décodais les clés de la série, la jonction entre le trio d’Eller et la paire défensive Emelin/Petry m’apparaissait comme un des points faibles à exploiter chez le CH. Il n’en fut rien. Alors que Tomas Plekanec a traditionnellement été le centre qu’on utilisait en priorité lors de missions défensives, on a vu Mitchell et Eller prendre du galon au cours de la série. Des 110 mises en jeu disputées en zone du Canadien à forces égales, 34 l’ont été en présence de Plekanec ou Eller et 44 avec Mitchell (16 avec deux de ces joueurs en même temps). Seulement 16 mises en jeu près de Carey Price ont été disputées sans que l’un de ces trois joueurs soit sur la glace.
Ce qui distingue le travail d’Eller et de Mitchell de celui de Plekanec, c’est le peu de mises en jeu en zone offensive disputées par les deux premiers. Ce qui ne les a pas empêchés d’aider l’équipe. Suite au cinquième match, on a beaucoup étrillé Michel Therrien sur le fait qu’il insistait pour utiliser ses quatre trios, ce qui enlevait du temps de jeu à Lars Eller. Mais Therrien n’avait aucune raison de se priver du travail du trio de Mitchell, qui a fait ses preuves au cours de la dernière série. En fait, on ne devrait pas se surprendre de le voir éventuellement réduire le temps de glace de David Desharnais au profit des trois autres. On a donné à Desharnais beaucoup de mises en jeu en zone offensive, sans que les résultats soient au rendez-vous, ne serait-ce qu’au niveau du temps de possession.
Le résultat et la manière
On avait souligné en début de série que le style de jeu pratiqué par le Canadien, basé sur le «placement de rondelle», prédisposait l’équipe à de nombreux revirements en zone neutre. En observant les sorties de zone défensive des deux équipes, deux constats troublants émergent. Pour le Canadien comme pour les Sénateurs, lorsqu’on sortait de son territoire en contrôlant la rondelle, on parvenait à s’établir avec celle-ci en zone offensive dans 67 % des séquences. Lorsqu’on dégageait simplement la rondelle en zone neutre, les résultats étaient franchement plus mauvais : on s’est établis en zone offensive moins d’une fois sur cinq, la rondelle revenant dans le territoire défensif 50 % du temps.

Le fait de s’appuyer avec autant d’insistance sur les dégagements, les lobs et autres longues passes à des joueurs en fond de zone neutre est un cercle vicieux pour le Canadien. Chaque sortie incontrôlée ramène son lot de rondelles en zone défensive, qui appelle ensuite à un autre lot de dégagements en zone neutre, et ainsi de suite. On met donc énormément de pression sur les défenseurs. Ottawa n’a pas toujours su exploiter cette particularité du jeu montréalais. Il sera intéressant de voir comment les choses tourneront contre Detroit ou Tampa Bay.
Price, Pétry, Eller, Gibert, Émelin, Patterynn, Prust, Gally, Mitchell ont été les meilleurs à mon avis.
Le problème relié à l’utilisation d’Eller (de loin le meilleur moteur offensif lors du dernier match, sinon de la série, malgré le rôle défensif qui lui est obstinément dévolu) n’est pas tant le temps de jeu que la privation systématique d’ailiers capable de contribuer offensivement. Évidence enrageante, lorsque Therrien lui a retiré Parenteau (pour renflouer DD, évidemment) au profit de Weise. Le fait que Therrien croit encore que Weise est une option défensive solide (et supérieure à Parenteau, ce qui est très discutable) est la cerise sur le sundae!
Même si je prend pour le canadien, l’arbitre a sifflé trop tôt, car la rondelle n’a jamais arrêté. Donc, je crois vraiment que le but de Pageau était bon, pourquoi l’arbitre a sifflé s’il ne voyait pas la rondelle. Pour vérifier si un but est bon, on va voir avec les caméras et dans ce cas, il aurait dû le faire. Même si on dit que l’arbitre avait sifflé, les règles existent pour tous. Avoir été à la place des sénateurs j’aurais demandé une reprise du jeu par caméra.
Luc Chouinard
Malheureusement pour les Sénateurs, les règles de la LNH empêchent une reprise vidéo de ce jeu. Le seul temps que ce genre de jeu peut être revu est lorsque la rondelle entre dans le but sans qu’un autre joueur la touche. En d’autres mots il faut que ce soit un « jeu continue », la raison étant que les joueurs peuvent arrêter de jouer lorsqu’ils entendent le sifflet (la rondelle elle ne réagit pas au sifflet). Dans le cas du but de Pageau, le sifflet a été très rapide et il est clair que le but de Pageau est arrivé tellement près du sifflet qu’aucun joueur n’a eu le temps de réaliser que le sifflet s’était fait entendre car on ne voit aucun changement dans leur mouvement (ou manque de mouvement dans le cas de Price). Une solution à ce dilemme serait de donner des micros aux arbitres afin qu’ils puissent communiquer rapidement entre eux, comme on le fait au soccer. Il est clair que le deuxième arbitre pouvait très bien voir la rondelle et il aurait pu indiquer à celui qui était mal placé (et qui a sifflé) que Price n’avait pas le contrôle de la rondelle.