Après la mécanisation à la fin du XVIIIe siècle, la production de masse au début du XXe et l’automatisation au milieu du XXIe, la quatrième révolution industrielle est maintenant à nos portes. Et elle rendra les entreprises plus flexibles et plus efficaces grâce à des technologies de pointe telles que l’intelligence artificielle, la robotique, l’Internet des objets et l’impression 3D.
« Malheureusement, au Québec, le secteur manufacturier est lent à adopter les nouvelles technologies. Pourtant, il a été démontré que les entreprises qui investissent dans les technologies de l’information réussissent mieux que les autres », se désole Jacques Roy, professeur au département de gestion des opérations et de la logistique à HEC Montréal.
Même si le manque d’intérêt est fréquemment invoqué pour ce retard, les investissements nécessaires et le personnel insuffisant pour implanter ces transformations expliquent aussi souvent la réticence des entreprises à faire le saut, surtout les plus petites. Ce sont deux embûches qu’Amazon Web Service (AWS) tente de surmonter avec le lancement de plusieurs nouveaux services permettant d’amorcer facilement la modernisation des usines, aussi modestes soient-elles.
« Ce sont des services qui vont générer des économies et optimiser les activités, mais également favoriser les innovations », résume Mike Miller, gestionnaire principal pour les appareils d’intelligence artificielle chez AWS.
Parmi ces nouveaux produits se trouve Monitron, un petit capteur qui s’installe sur n’importe quelle machine rotative, comme un ventilateur, un tapis roulant ou un moteur. En mesurant la température et les vibrations et en utilisant un modèle d’intelligence artificielle mis au point par AWS, Monitron est capable d’alerter l’usine avant qu’une défaillance mécanique survienne dans l’appareil sur lequel il est posé.
« Ça permet de faire de la maintenance prédictive et d’éviter qu’un bris n’arrête la production, ce qui coûte très cher aux entreprises », explique Mike Miller. La conception de modèles d’apprentissage automatique pour prévoir quand une machine cessera de fonctionner n’est pas nouvelle, et certains équipements connectés peuvent même le faire eux-mêmes, mais Monitron donne la possibilité à une usine d’adapter ses appareils existants sans avoir à embaucher un spécialiste ou un consultant.

Le prix est aussi abordable, soit environ 900 dollars pour un ensemble de départ de cinq capteurs, et des frais mensuels de quelque 5 dollars par capteur. « Ce n’est pas sorcier. N’importe qui peut s’en servir », ajoute Dirk Didascalou, vice-président d’AWS responsable de l’Internet des objets.
AWS offre aussi une approche simplifiée avec Panorama, un système qui permet d’analyser les images obtenues par les caméras existantes dans les usines. Panorama devrait être capable d’effectuer un contrôle de la qualité pour s’assurer, par exemple, que les pièces sur une chaîne de montage sont bien peintes. Ces informations peuvent être traitées dans le nuage, mais aussi à l’usine directement si la rapidité de traitement est essentielle ou si les données doivent rester sur place pour des raisons de sécurité.
Ces deux technologies peuvent être utilisées sans programmation, mais les entreprises qui le souhaitent peuvent aussi s’en servir pour créer des fonctionnalités plus poussées, en mettant au point leurs propres modèles d’apprentissage automatique. L’effort est alors plus grand, mais le résultat est plus personnalisé. Une pisciculture pourrait par exemple employer Panorama pour détecter les poissons morts, afin de les retirer de l’eau plus rapidement.
AWS espère d’ailleurs qu’en s’initiant à ces nouvelles technologies, ses clients adopteront de plus en plus ses différents produits, les mêmes qui sont utilisés par les méga-usines connectées, comme celles de Volkswagen ou autres géants mondiaux du genre. « Nous croyons que les entreprises qui vont découvrir la puissance de l’Internet des objets et de l’intelligence artificielle en voudront plus », prédit Dirk Didascalou.
Une démocratisation attendue au Québec et au Canada
Comme AWS, les autres fournisseurs infonuagiques et leurs partenaires, mais aussi les entreprises de télécommunications, proposent des solutions clés en main pour différents secteurs industriels.
« L’arrivée de technologies faciles à implanter est une bonne nouvelle pour le Canada, puisque nous ne comptons pas beaucoup de géants industriels », estime Warren Shiau, vice-président responsable de l’intelligence artificielle et de l’analyse de données pour la firme de recherche IDC Canada. Non seulement les PME qui tirent principalement profit de ces nouveaux outils occupent une place importante dans l’économie manufacturière du pays, mais celles-ci accusent un certain retard par rapport aux PME américaines, notamment.
« Si ce n’était notre taux de change, nos entreprises seraient rarement très compétitives », note Jacques Roy. Il y a évidemment des exceptions, particulièrement parmi les centres de distribution et les entreprises plus technologiques, où les gestionnaires sont souvent plus intéressés par ces nouveaux procédés.
La démocratisation de l’industrie 4.0 pourrait être l’occasion pour les entreprises en retard de profiter des avancées technologiques de ces dernières années. Surtout que si elles ne s’adaptent pas, leurs concurrents, eux, risquent de le faire.