Des photos aux conversations en passant par les recherches sur Internet, il se cache beaucoup d’informations intimes dans le téléphone d’un adolescent. En plus d’offrir une fenêtre sur la vie personnelle de l’enfant, ces données peuvent aussi renseigner ses parents sur les dangers qui le guettent ou les craintes qu’il éprouve en silence.
Les parents devraient suivre de près ce que contiennent les appareils mobiles des jeunes, selon le journaliste Christopher Nully, qui admettait le faire avec ses ados de 13 et 17 ans dans le magazine Wired. Les risques que les enfants soient la cible de harceleurs ou de prédateurs sexuels, pour ne nommer que ces périls, seraient trop gros pour qu’on se prive de les tenir à l’œil.
Le dilemme de la surveillance n’est pas nouveau. Que ce soit en lisant leurs journaux intimes, textos ou courriels, les parents ont de tout temps été tentés d’en connaître plus sur l’intimité de leurs enfants.
Consulter un téléphone intelligent représente cependant une invasion beaucoup plus grande que la lecture d’un journal intime, qui résume en seulement quelques lignes par jour la vie de son auteur. En accédant à tout l’univers numérique de son adolescent, un parent de 2020 découvre son intimité comme jamais cela n’a été possible auparavant.
Il peut être justifié de se permettre un tel accès pour un enfant de moins de 14 ans, estime Linda S. Pagani, professeure titulaire à l’École de psychoéducation de l’Université de Montréal. Avant cet âge, un adolescent, même bien intentionné, n’est pas outillé pour affronter seul les dangers qui peuvent venir avec un téléphone intelligent et les réseaux sociaux. « Il vit des émotions très fortes et il n’a pas encore les stratégies nécessaires pour s’y adapter », explique la professeure.
Au-delà de 14 ans, l’enfant n’est guère mieux outillé, mais un autre facteur doit être pris en compte, selon Linda S. Pagani : « Le lien de confiance est impératif à cet âge. » Les parents doivent surtout instaurer un climat de confiance à la maison, qui incitera l’ado à les consulter au besoin.
C’est cette même confiance qui encouragera un enfant à poser ses questions gênantes à ses parents plutôt qu’à chercher des réponses sur Google, à leur parler de ses insécurités liées à Instagram et à leur demander de l’aide s’il se sent harcelé sur Facebook.
Il n’y a pas de solution unique à la parentalité. Si fouiller dans la vie intime de notre ado peut nous permettre de l’aider à éviter des crises graves, ce suivi peut aussi être perçu comme une attaque, qui viendra miner une confiance très importante pour son développement. Ce n’est pas facile d’être un ado à l’ère numérique. Mais ce n’est pas facile d’être un parent non plus.
Cet article a été publié dans le numéro de septembre 2020 de L’actualité.