Les élections dangereuses

La fraude électorale ne concerne pas que les États-Unis. Au Canada, des mesures ont été instaurées pour protéger les élections fédérales du 21 octobre, mais la meilleure arme pour contrer les « fausses nouvelles » sera peut-être… votre vigilance.

Photo : Peter Power / La Presse Canadienne

L’intégrité des élections fédérales canadiennes est menacée. Des mesures ont été mises en place pour contrecarrer les ingérences étrangères, mais le défi s’annonce de taille pour l’État, les plateformes en ligne et les électeurs, à qui revient le rôle de dernière ligne de défense.

Le modus operandi des groupes d’intérêt ou des puissances étrangères qui emploient les outils de communication modernes pour influencer des élections démocratiques commence à être connu. Des comptes sur les réseaux sociaux attirent d’abord des milliers (parfois des millions) d’admirateurs en publiant des images et des messages visant à attirer leur sympathie, puis ils sèment la zizanie.

Des comptes bannis sur Facebook et Instagram en novembre 2018, à la veille des élections de mi-mandat aux États-Unis, agissaient ainsi de façon coordonnée pour s’attaquer aux médias et attiser les tensions raciales et religieuses dans ce pays.

Des campagnes de désinformation sont aussi menées pour miner la crédibilité de politiciens ou promouvoir des intérêts étrangers, et des attaques informatiques sont lancées pour dérober des informations personnelles. Elles sont souvent déjouées, mais touchent aussi parfois la cible, comme lors du piratage des serveurs du Parti démocrate pendant les élections de 2016 aux États-Unis.

De telles menaces pèsent également sur le Canada. En 2017, la ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, critique du régime de Vladimir Poutine, a été victime d’une campagne de salissage orchestrée par la Russie et reprise dans une série de blogues et de pages Facebook.

Des mesures ont été instaurées pour protéger le processus électoral fédéral du 21 octobre prochain. Facebook a mis en ligne un outil pour vérifier toutes les publicités ciblées d’une même page (une qui dirait une chose aux pauvres et une autre chose aux riches, par exemple). Le public peut aussi signaler à l’Agence France-Presse qu’un lien devrait être considéré comme une fausse nouvelle. L’Agence analyse alors son contenu et publie un correctif au besoin. Les fausses nouvelles ont dès lors une moins grande portée sur Facebook, mais elles n’en sont pas chassées, malheureusement.

Élections Canada mise pour sa part sur la récente refonte de la Loi électorale, qui interdit le financement de groupes par des intérêts étrangers et lui permet de mieux encadrer les publicités électorales sur les réseaux sociaux. L’organisme a aussi amélioré sa sécurité informatique. Pendant la campagne, il surveillera les tentatives de fraudes électorales et analysera des publications en ligne pour déterminer s’il s’agit de publicité électorale illégale.

Tout cela est bien, mais tant du côté des réseaux sociaux que d’Élections Canada, on laisse aux utilisateurs la responsabilité de déterminer le contenu problématique. Facebook, Twitter et les autres ne reconnaissent pas automatiquement les fausses nouvelles, tout comme Élections Canada ne fait pas de suivi systématique des dépenses en ligne par des groupes tiers.

La naïveté des internautes a été jusqu’ici leur talon d’Achille. Elle leur fait partager des fausses nouvelles et s’indigner contre des campagnes organisées précisément à cette fin. C’est pourtant leur vigilance qui devient l’arme de défense la plus importante pour protéger les élections. Il est difficile de se sentir rassurés.

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C’est bien beau de pointer Facebook du doigt, mais les racines du problème sont beaucoup plus profondes et sont à chercher ailleurs. Il y a tout un système d’éducation à revoir. Un système qui a mis en berne l’effort intellectuel, qui n’encourage plus les futurs adultes à la réflexion et au jugement. Et je ne parle pas que du Québec ou du Canada. C’est pire aux États-Unis.

Il faut faire plus que demander aux gens d’être vigilants ; il faut se demander pourquoi ils ne le sont pas. En un mot, pousser la réflexion un tantinet plus loin.