Les (minimes) agréments du paiement mobile

Android Pay débarque au Canada, plus d’un an après Apple Pay. Certaines technologies changent le monde, mais pas celle-ci.

Après Apple et sa solution Apple Pay, c’est au tour de Google de lancer au Canada son service de paiement mobile, Android Pay. Portrait en cinq questions d’une technologie qu’on s’habitue rapidement à utiliser, mais dont les avantages pour l’utilisateur ne s’avèrent que mineurs.

Qu’est-ce que c’est ?

Les technologies de paiement mobile mises au point au cours des dernières années transforment les téléphones intelligents en de véritables portefeuilles numériques. Ces services permettent de régler une facture en ligne, mais aussi en personne dans les magasins, en posant son appareil mobile sur le terminal de paiement comme s’il s’agissait d’une carte de crédit sans contact.

Le principal avantage du paiement mobile par rapport aux cartes traditionnelles est la rapidité. Un téléphone est généralement plus facile d’accès qu’une carte de crédit, et les technologies récemment conçues ont rendu l’opération aussi aisée qu’avec une carte de plastique.

Comme innovation, c’est peu, mais c’est suffisant. Ceux qui essaient le service tendent d’ailleurs à l’adopter par la suite. Dans le monde, le volume de transactions effectuées au moyen du service Apple Pay aurait même quintuplé par rapport à l’année dernière.

Comment ça fonctionne ?

Au Canada, les deux solutions pouvant atteindre le plus grand nombre d’utilisateurs sont Apple Pay et Android Pay, puisqu’elles sont compatibles avec la plupart des institutions financières (BMO, CIBC, Desjardins, RBC, Banque Scotia, etc.) et la majorité des téléphones lancés depuis 2014.

La marche à suivre pour payer avec un téléphone dans une boutique varie légèrement en fonction du système utilisé. Avec Apple Pay, il suffit de mettre son pouce sur le capteur d’empreintes digitales TouchID de l’iPhone et de poser l’appareil sur le terminal de paiement pour effectuer une transaction. Sur Android, on doit simplement activer son téléphone, et non le déverrouiller avec son empreinte ou son code. Dans tous les cas, on ne peut évidemment pas payer avec un téléphone dont la pile est à plat.

Les services peuvent être utilisés chez près de 80 % des commerçants au Canada, soit tous ceux équipés d’un terminal compatible avec le paiement sans contact. La limite de chaque transaction varie pour l’instant de 50 à 100 dollars selon les établissements, mais celle-ci pourrait changer avec le temps : au Royaume-Uni, la moitié des marchands ne limitent par exemple plus les transactions Apple Pay.

Dans les deux cas, il faut enregistrer sa carte au préalable, que ce soit dans l’application Wallet sur un iPhone ou Android Pay sur un téléphone Android. En plus de permettre de sauvegarder des cartes de crédit et de débit, Apple Pay et Android Pay peuvent aussi emmagasiner les informations liées aux cartes de fidélité des commerces.

Est-ce sécuritaire ?

Aucune solution n’est parfaite, mais les services de paiement mobile représentent une amélioration par rapport aux systèmes traditionnels. En effet, que ce soit avec Apple Pay ou Android Pay, le numéro de compte de l’utilisateur n’est pas conservé sur son téléphone, et il n’est jamais transmis pendant la transaction.

Notons qu’un appareil Android volé peut être employé pour effectuer un certain nombre d’achats, mais l’utilisateur n’est alors pas tenu responsable de ceux-ci. En cas de vol, il est aussi possible de désactiver son compte à distance, comme on le fait avec une carte de crédit.

À quoi ressemble l’avenir du paiement mobile ?

En tenant compte de la simplicité d’utilisation du paiement mobile et de la facilité avec laquelle il est possible d’ajouter une carte à son compte, la technologie devrait rapidement gagner du terrain au-delà des consommateurs les plus technophiles. Les prévisions varient beaucoup trop d’une étude à l’autre pour être d’un quelconque intérêt, mais toutes les sociétés d’analyse s’entendent pour dire que la technologie connaîtra une croissance soutenue au cours des prochaines années.

Par ailleurs, l’arrivée de fonctionnalités complémentaires contribuera sûrement à populariser la technologie. Dans les mois à venir, Google permettra par exemple aux marchands de combiner le paiement mobile et la lecture d’une carte de fidélité en une seule étape, ce qui devrait simplifier et automatiser l’opération. Dans certains marchés, l’intégration des cartes d’autobus ou de train à même Apple Pay ou Android Pay pourrait également aider à faire connaître la technologie.

De plus, les services d’Apple et de Google seront un jour en mesure d’emmagasiner toutes sortes de documents, comme des cartes d’identité, ce qui pourrait permettre de laisser son portefeuille à la maison pour de bon (ou du moins ses cartes, puisque le paiement mobile ne viendra probablement pas à bout de l’argent comptant à lui seul).

 À qui le paiement mobile profite-t-il ?

En économisant quelques secondes par transaction, les utilisateurs ne sont pas ceux à qui profitera le plus l’arrivée du paiement mobile. Les commerçants pourront bien optimiser leurs programmes de fidélité, mais, dans l’ensemble, la technologie ne devrait pas transformer le commerce au détail pour autant non plus.

Apple et Google ont évidemment beaucoup plus à y gagner.

On estime qu’Apple conserverait environ 0,15 % de chaque transaction effectuée par Apple Pay. Avec plus d’un milliard d’utilisateurs iOS dans le monde, le potentiel du service est évident, mais il faudrait que l’entreprise augmente ses tarifs et que la technologie gagne réellement en popularité avant qu’elle ait un effet majeur sur son chiffre d’affaires.

La chose est différente pour Google, qui ne tire aucun revenu du paiement mobile. Android Pay serait en effet une façon de rendre la plateforme mobile de Google plus complète, et non une fin en soi.

La grande question réside toutefois dans l’utilisation que feront les entreprises des données accumulées à chaque transaction. Pour l’instant, ni Apple ni Google ne met à profit ces informations. Il pourrait par contre être difficile de résister longtemps à la tentation, surtout dans le cas de Google. Alors que les données sont considérées comme le nouveau pétrole, connaître tout ce que les gens achètent, tant en ligne que dans les commerces, est certainement d’un intérêt majeur.

Dans un cas comme dans l’autre, les petits agréments des uns risquent de faire les grands profits des autres au cours des prochaines années.