Ce qui avait été présenté comme une bonne nouvelle pour Twitter n’a pas eu l’effet escompté. En retirant des milliers de comptes inactifs de son service, Twitter allait libérer des noms d’utilisateurs parfois convoités et les remettre en circulation. Un compte inactif n’est toutefois pas seulement lié à un utilisateur qui n’a aucun intérêt envers les microblogues. Il peut aussi appartenir à quelqu’un de décédé, et sa présence peut apporter du réconfort à ses proches.
Twitter a rapidement corrigé le tir. « Nous vous avons entendu par rapport à l’impact que cela aurait sur les comptes de personnes décédées. Cela nous avait échappé », a avoué mercredi l’entreprise sur son site. La mesure est donc mise sur la glace, le temps qu’un moyen soit instauré pour permettre de commémorer les comptes de défunts.
Difficile de s’y retrouver
L’annonce ratée de Twitter est malheureusement le symptôme d’un problème généralisé avec les entreprises technologiques : celles-ci gèrent dans l’ensemble plutôt mal la mort de leurs utilisateurs.
Facebook est l’exception à la règle. Le site a mis en place il y a quelques années la possibilité de transformer le compte d’une personne décédée en compte commémoratif. Celui-ci est identifié de la sorte, il n’apparaît plus dans les suggestions de nouveaux contacts des autres, ses paramètres de confidentialité peuvent être modifiés et une personne peut choisir un légataire de son vivant, ce qui simplifie le transfert de son compte après sa mort.
Une politique aussi détaillée est rare. Instagram permet de commémorer un compte, mais il ne l’identifie pas de la sorte. La plupart des autres sites, comme LinkedIn, permettent de faire retirer un compte, mais pas de le commémorer. D’autres, comme les sites financiers ou les sites personnels, ont des politiques en place pour transférer le nom d’utilisateur et le mot de passe à une autre personne, mais le processus est souvent long et ardu, et demande l’envoi de nombreux documents officiels. Dans bien des cas, les données personnelles d’un utilisateur meurent simplement avec lui, même si celles-ci pourraient être intéressantes pour d’autres (les listes de lecture Spotify d’un proche, par exemple).
Ces mesures variées et incomplètes forcent les internautes soucieux de bien planifier leur mort numérique d’inscrire dans leur testament ce qu’ils souhaitent qu’il advienne de leurs comptes en ligne. Le formulaire de la Chambre des notaires du Québec Patrimoine : votre guide 360 contient d’ailleurs une section à cet effet. Le processus est toutefois long, il doit constamment être renouvelé et le légataire devra se plier aux limites de ce que lui permettent les plateformes.
Les utilisateurs devraient aussi se doter d’un gestionnaire de mots de passe, un logiciel qui sauvegarde ses noms d’utilisateurs et mots de passe sur Internet. Plusieurs d’entre eux permettent d’identifier un proche qui pourra prendre contrôle de tous leurs comptes (ou de certains seulement) après leur mort.
La solution ne passe pas par les utilisateurs
Les mesures mises en place à l’heure actuelle mettent malheureusement la pression sur les épaules des utilisateurs avant leur mort et sur les légataires. Certains principes pourraient toutefois être adoptés par les géants technos dès la conception de leurs services, ce qui faciliterait les successions numériques.
Offrir une solution adaptée : chaque plateforme devrait offrir la possibilité de commémorer des comptes avec un degré de sophistication plus ou moins élevé. On s’attend par exemple à plus d’un service qui permet de créer ou de communiquer qu’un site de magasinage.
Bien informer : les informations par rapport aux comptes commémoratifs devraient être claires et complètes, indiquant notamment ce qui sera conservé et pour combien de temps. Elles devraient aussi être faciles à trouver dans les paramètres, et non nécessiter une recherche approfondie.
Permettre de désigner un légataire : la possibilité de choisir un légataire de son vivant facilite grandement le transfert des informations personnelles après son décès.
Faciliter l’exportation des données : les informations personnelles d’un défunt qui l’a choisi devraient pouvoir être exportées facilement, afin d’être affichées ailleurs si c’est ce qui est souhaité.
Le numérique occupe une place de plus en plus importante dans la vie des gens. Ces principes simples pourraient permettre de mieux refléter cette place après leur mort qu’à l’heure actuelle.