Les tendances du CES 2023

Des voitures qui changent de forme pour économiser de l’énergie. Des gants qui permettent de toucher des objets dans le métavers. Des gadgets un peu plus verts, ou un peu mieux connectés. Voici les innovations qui ont retenu l’attention de notre chroniqueur techno.

Photo : Maxime Johnson

Après une année à distance et une année en demi-teinte à cause de la pandémie, le CES (le plus grand salon de l’électronique, anciennement connu sous le nom de Consumer Electronics Show) était de retour en force la semaine dernière à Las Vegas, aux États-Unis.

Cette grand-messe technologique a permis comme toujours d’en savoir un peu plus sur les gadgets à venir au cours des prochains mois, mais aussi sur les tendances qui devraient marquer l’industrie de l’électronique pendant les prochaines années. 

Un développement (un peu plus) durable

L’environnement et le développement durable étaient plus présents que jamais cette année au CES. Le kiosque de Samsung y accordait d’ailleurs plus d’espace qu’aux téléviseurs, habituellement le pain et le beurre de l’entreprise lors de ce salon.

Comme plusieurs autres, le géant coréen a en effet profité du CES pour présenter toutes ses dernières avancées vertes, de la réduction de la consommation d’eau dans ses usines à l’amélioration des emballages de ses télés (par exemple, les boîtes, qui n’ont plus d’agrafes depuis 2022, sont désormais collées à l’aide de ruban adhésif en papier).

La présence de matériaux recyclés dans les produits était aussi beaucoup plus mise en avant que d’habitude. Au lieu de dévoiler une gamme de nouveaux gadgets, le fabricant d’accessoires Belkin a ainsi annoncé que six de ses appareils les plus vendus, comme des chargeurs, seraient désormais composés de 73 % à 76 % de plastique recyclé postconsommation. « Nous avons commencé par nos plus grands vendeurs, mais nous allons ensuite le faire avec nos autres produits également », précise Jen Wei, vice-présidente responsable des communications et du développement entrepreneurial chez Belkin. 

D’autres marques, comme Pivet, ont quant à elles présenté des accessoires, entre autres des étuis pour téléphones intelligents, créés avec du plastique biodégradable. Les matériaux du genre constituent toutefois plus l’exception que la règle.

L’autre grande tendance verte cette année sera la prolifération des stations de stockage d’énergie pour les maisons connectées. Ces grandes batteries qu’on installe au mur et qui permettent de mieux gérer sa consommation énergétique ne sont pas nouvelles, mais elles étaient omniprésentes au CES.

Au Québec, des appareils du genre peuvent par exemple emmagasiner de l’électricité pendant la nuit et l’utiliser le matin pendant les événements de pointe hivernaux, afin de profiter de la tarification dynamique d’Hydro-Québec (qui permet d’économiser en réduisant sa consommation lorsque le réseau d’Hydro-Québec est chargé). Ils peuvent aussi fournir de l’énergie en cas de panne de courant.

Dans certains cas, comme avec la solution de gestion de l’énergie Schneider Home, ces appareils sont également couplés à des panneaux solaires, à un chargeur pour voitures électriques et à un boîtier électrique intelligent, ce qui permet de gérer sa consommation énergétique avec précision (en éteignant automatiquement n’importe quel appareil de sa maison, même s’il n’est pas connecté, par exemple). « Ça facilite le travail pour le consommateur », résume Florent Berard, vice-président responsable de la stratégie et du développement durable chez Schneider Electric. « Avec la crise énergétique que l’on vit cette année, de plus en plus de gens se rendent compte de l’importance de réduire sa consommation », observe-t-il.

Les technologies d’hier, revisitées

Il était facile d’avoir une impression de déjà-vu au CES 2023. Plusieurs fabricants ont en effet dévoilé des appareils utilisant des technologies passées de mode, comme des ordinateurs dotés d’un écran autostéréoscopique, capables d’afficher des images en 3D sans qu’on ait à porter de lunettes.

Contrairement au début des années 2010 (la dernière fois que des écrans 3D autostéréoscopiques ont été présentés par des marques connues au CES), des fabricants comme ASUS et Acer profitent cette fois-ci des dernières avancées en intelligence artificielle pour suivre le mouvement des yeux de l’utilisateur et améliorer l’effet 3D. Je ne parierais pas sur les chances de succès de cette technologie en 2023 (puisque les consommateurs ne semblent pas intéressés et que le contenu est toujours aussi rare), mais le résultat est quand même impressionnant.

Parmi les autres technologies de retour, notons la télé sans fil. Et on ne parle pas ici du simple fait d’avoir des applications comme Netflix ou Tou.tv sur une télé intelligente. La Signature OLED M de LG, par exemple, rassemble plutôt tous les ports du téléviseur dans un boîtier séparé de l’écran afin d’avoir une installation plus propre, et transmet sans fil le son et l’image vers la télé, sans pour autant faire de compromis sur la qualité, comme c’était le cas auparavant avec les adaptateurs HDMI sans fil.

L’aérodynamique active

L’industrie de l’automobile est de plus en plus présente au CES. Sans que ce soit une tendance majeure, j’ai notamment remarqué chez au moins deux entreprises, Mercedes-Benz et le constructeur canadien d’équipement automobile Magna, l’utilisation de pièces permettant de modifier la forme d’un véhicule en mouvement afin d’améliorer son aérodynamisme.

Par exemple, sur la Mercedes-Benz Vision EQXX, une voiture de développement capable d’atteindre une autonomie de 1 200 km sur une seule charge, un petit aileron s’allonge derrière l’automobile lorsqu’elle est sur l’autoroute afin de rendre l’air plus fluide autour du véhicule. 

Le concept n’est pas nouveau, puisque des technologies du genre existent dans les voitures de haute performance, mais ici, on s’en sert plutôt pour augmenter l’autonomie des véhicules.

La Vision EQXX n’est qu’un prototype conçu pour aider les ingénieurs et designers de Mercedes-Benz à créer des autos moins énergivores, mais plusieurs de ses innovations pourraient se retrouver dans des véhicules de production au cours des prochaines années. « Je suis convaincu que l’aérodynamique active est quelque chose que nous verrons dans nos futures autos de série », prédit l’ingénieur de Mercedes-Benz Daniel Schindler.  

Ressentir le métavers

La réalité virtuelle sera bientôt encore plus immersive qu’elle ne l’est déjà. C’est du moins ce que j’ai pu constater en portant le chandail — moulant à souhait — OWO Skin. Celui-ci est doté d’électrodes capables d’envoyer de petits chocs pour simuler notamment la sensation d’une épée qui perce le corps, de piqûres d’insectes ou encore d’une balle qui entre dans l’abdomen et ressort dans le dos. L’effet est saisissant (littéralement).

L’OWO Skin est l’un des nombreux appareils dévoilés au CES pour augmenter le réalisme du métavers, cette série d’univers virtuels où les entreprises technologiques prévoient qu’un jour nous passerons une partie de notre vie, que ce soit pour travailler, nous amuser ou consommer.

Des entreprises ont aussi présenté des gants haptiques pour ressentir des objets virtuels que l’on prend dans ses mains, et une autre a même conçu un système pour sentir les odeurs en réalité virtuelle.

Aucune des technologies que j’ai essayées ne m’a toutefois convaincu (les gants haptiques, par exemple, ne sont pas assez réalistes, et l’OWO Skin l’est un peu trop !). Il faudra visiblement attendre encore quelques années avant que ces appareils soient prêts pour le grand public.

L’année de Matter

Le nouveau protocole Matter (anciennement connu sous le nom de CHIP), qui permet aux objets des maisons connectées d’interagir et qui fait en sorte qu’un appareil d’une certaine marque soit compatible avec celui d’une autre, était omniprésent au CES 2023.

Ce ne sont pas les produits eux-mêmes qui ont retenu l’attention au salon (aucun nouvel appareil Matter ne s’est réellement démarqué du lot), mais plutôt l’adoption du protocole par à peu près tous les fabricants, des plus petits aux plus gros. Cette adoption massive est de bon augure pour la suite des choses, surtout pour les consommateurs qui se sentent souvent perdus quand vient le temps d’équiper une maison connectée.