L’essor phénoménal de la photographie de calcul

Les avancées matérielles ne suffisent plus : ce sont les algorithmes qui sont désormais derrière les meilleurs appareils photos, explique Maxime Johnson. 

Photo: Google

Le lancement récent de l’iPhone 8 d’Apple et le dévoilement cette semaine du téléphone Android Pixel 2 de Google (ci-dessus) cimentent l’importance dans l’industrie techno de la photographie de calcul, une discipline où les appareils photos sont améliorés à l’aide de logiciels de plus en plus poussés.

« Des résultats impressionnants en photographie de calcul — les nouveaux téléphones de Google obtiennent un pointage record de 98 pour la qualité de leurs photos », a écrit mercredi le président d’Alphabet (la société mère de Google), Eric Schmidt, sur Twitter, lorsqu’il a présenté le nouveau téléphone de son entreprise.

L’homme d’affaires n’a pas choisi de promouvoir le design du téléphone, ses performances ou des fonctionnalités originales. Il a plutôt vanté les mérites de sa photographie de calcul, ou computational photography, en anglais. Ce n’est pas un hasard. Cette discipline, méconnue du grand public il y a quelques mois à peine, est désormais l’une des plus en vue dans la Silicon Valley, tout particulièrement chez les fabricants de téléphones intelligents.

Qu’est-ce que la photographie de calcul ?

La photographie de calcul permet de modifier l’allure des portraits réalisés avec l’iPhone 8 d’Apple. (Photo : Maxime Johnson)

La photographie de calcul concerne le traitement des données obtenues par un capteur d’appareil photo numérique pour améliorer une image, et même pour en créer une qui aurait été impossible à obtenir autrement.

Un exemple ? Le mode panorama des téléphones intelligents permet de bouger son téléphone de gauche à droite lors de la prise d’un cliché pour enregistrer une photo beaucoup plus large que l’objectif de l’appareil ne l’offrirait normalement.

La fonction portrait des iPhone 7 Plus et iPhone 8 Plus, qui combine les données obtenues par deux appareils photos pour réaliser un portrait avec un flou artistique autour du sujet, est aussi un exemple de photographie de calcul qui gagne en popularité.

Ce mode, que l’on trouve également dans le téléphone Galaxy Note 8 de Samsung, a aussi été reproduit par Google pour son Pixel 2, mais avec un seul capteur cette fois. Il s’agit de la nouveauté qui a le plus retenu l’attention de la presse spécialisée mercredi. Une nouveauté qui n’a pas été obtenue grâce à une amélioration matérielle ou à l’ajout d’un nouveau capteur onéreux, mais plutôt à l’aide d’un code informatique.

L’appareil photo du Pixel 2 a d’ailleurs reçu le meilleur pointage à ce jour au test de performance standardisé DxOMark, même si ses caractéristiques matérielles ne sont pas les meilleures sur le marché.

Pourquoi cet intérêt soudain ?

De plus en plus de téléphones intègrent deux appareils photos pour maximiser les bénéfices de la photographie de calcul, comme l’iPhone 8 Plus et le Huawei P10 Plus. (Photo : Maxime Johnson)

Plusieurs raisons expliquent la montée récente de la photographie de calcul.

La première est physique. Alors qu’il est toujours possible d’ajouter un plus gros objectif à un appareil photo traditionnel pour capter plus de lumière — la recette pour obtenir une photo de qualité —, les téléphones intelligents disposent seulement d’un espace limité, qui restreint la taille physique de leurs composants.

Les limites de la miniaturisation font qu’il est maintenant de plus en plus difficile pour les fabricants de se démarquer avec leurs appareils photos d’une façon purement matérielle. La photographie de calcul représente donc un bon moyen d’améliorer notablement la qualité de leurs appareils et de se distinguer des autres.

L’avancée de plusieurs technologies connexes explique aussi la popularité de la photographie de calcul. Les techniques d’apprentissage automatique permettent par exemple de concevoir des algorithmes puissants. C’est d’ailleurs en analysant de grandes quantités de photos qu’Apple a pu créer un logiciel capable de discerner ce qui doit être clair et ce qui doit être flou dans un portrait.

Les processeurs des téléphones intelligents sont également de plus en plus performants, et peuvent faire des opérations complexes en temps réel lorsqu’une photo est prise, ce qui n’aurait pas été possible il y a quelques années à peine.

La photographie de calcul et les appareils photos traditionnels

Les fabricants d’appareils photos traditionnels utilisent la photographie de calcul, mais la discipline ne connaît pas encore la même popularité que dans l’industrie des téléphones intelligents. (Photo : Maxime Johnson)

L’intérêt des fabricants de téléphones intelligents pour la photographie de calcul n’a pas encore été observé chez les fabricants d’appareils photos numériques traditionnels.

Canon, Nikon, Fujifilm, Olympus et les autres utilisent tous la photographie de calcul d’une façon ou d’une autre, mais ce sont encore les performances brutes de leurs appareils qui sont mises en avant.

Si les artifices logiciels sont moins essentiels pour un appareil reflex ou sans miroir que pour un téléphone intelligent, les mêmes constats s’imposent ici aussi : la taille des appareils limitant les améliorations possibles, les logiciels sont désormais poussés et les processeurs sont de plus en plus performants.

Le fabricant qui intégrera intelligemment la photographie de calcul à ses nouveaux modèles risque d’avoir un avantage de taille sur les autres. Ce n’est donc probablement qu’une question de temps avant que la discipline transforme également cette industrie.

Qu’on se le tienne pour dit, l’âge d’or de la photographie de calcul ne fait que commencer.

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Traduction douteuse !

On photographie des personnes, des paysages mais pas des calculs (!)

Traduction pour traduction, il me semblerait de loin plus approprié et exact de parler de « photographie calculée », que de « photographie de calcul » !!!

Je ne suis pas particulièrement enthousiasmé par la traduction moi-même, mais c’est celle qui est la plus utilisée en ce moment. Peut-être qu’une autre expression prendra le dessus éventuellement. C’est encore un concept assez nouveau, il n’est pas rare que les traductions évoluent.